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André Gide s'est toujours intéressé à la traduction de grands auteurs. Son oeuvre de traducteur va de Conrad à Tagore, de Pouchkine à Shakespeare. Il tenait que, pour devenir écrivain, il fallait avoir traduit des auteurs étrangers. Son entreprise la plus étrange est sans doute celle qui concerne Arden de Faversham, tragédie anonyme de 1592 tirée d'un fait divers aussi réel que les noms des personnages, et qui fut attribuée à tous les grands auteurs élisabéthains, Shakespeare en tête. Pourquoi une pièce anonyme ou apocryphe plutôt qu'un autre Shakespeare ? André Gide souligne à plusieurs reprises le caractère très «curieux» de l'oeuvre et y voit une parodie de drame bourgeois : un notable est assassiné par l'amant de sa femme et par celle-ci, qui emploient des tueurs à gages. C'est la première tragédie familiale anglaise, les caractères sont brutaux et puissants, la pièce montre une grande connaissance du coeur humain. Dans sa traduction, André Gide déploie des qualités de concision, de fermeté, d'élégance et de clarté. Il allège, condense, clarifie et, surtout, il a le sens du théâtre et s'adapte à l'avance à la scène. Ses metteurs en scène préférés, un Copeau, un Barrault, n'ont qu'à s'emparer de son texte, à défaut d'Artaud, qui y avait d'abord songé.
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