Quand on vient de rater son Capes à cause d'une simple panne d'oreiller, les perspectives d'avenir ne sont pas réjouissantes. Que peut tenter Manon Melmann pour gagner sa vie ? Tailler les végétaux hirsutes des jardins de Paris ? S'improviser baby-sitter sans le moindre talent pour l'exercice ? Sous l'effet de circonstances inattendues, la voilà chroniqueuse radio. Le genre de tribune idéale, pense-t-elle pour bazarder quelques clichés de la pensée facile. Mais c'était sans compter sur le succès croissant, la peopolisation, la bêtise et l'agressivité de ses contemporains... Elles font un tintamarre funeste, les trompettes de la renommée.
Née à Lorient, d'une Bretonne et d'un «gars de la Royale», Marylinn Maurage est enseignante en lettres. Tout en essayant d'apprivoiser des moutons sauvages d'Ouessant et des élèves de BTS (moins sauvages), elle tente de domestiquer les mots... et les maux de ses contemporains. Son premier roman Migrateur (L'Arganier) est salué par la critique pour son ironie, la nervosité du style et l'allégresse du récit. Pour Portrait de femme à la tête de chien, la romancière a choisi Paris, le plus urbain des décors, le plus sauvage aussi.
Portrait d'une femme à la tête de chien, un drôle de titre, dur à écrire, dur à dire. Dur à penser ! Ce portrait, c'est un peu la structure de l'œuvre que je retiens, celui de son héroïne: Manon Melmann. Une nana et ses aventures que j'ai suivi avec attention, mais qui m'ont laissé dans une certaine perplexité : je ne saurais dire si je l'ai adoré ou si je l'ai détesté.
Surement une impression ressentie par la plupart des membres de son public, consentant ou non à son succès, détracteurs ou fans... Manon devient très vite célèbre, et elle doit en assumer les conséquences. Heureusement, elle n'a pas la langue dans sa poche, c'est d'ailleurs ce qu'il lui a valu d'obtenir un poste en tant que chroniqueuse et animatrice de débat dans une petite radio locale.
Le fait d'avoir la plus grande partie de l'intrigue se passant permet des fantaisies à l'auteur et à la maison d'édition, comme tenter une mise en page originale avec le dialogue à l'antenne (comme des discours au théâtre, ou une retranscription d'interview). J'ai trouvé cela intéressant et drôle, mais à force, on s'y perdait : la preuve, l'éditeur lui même a confondu certains noms d'intervenants dans la construction du dialogue, une ou deux fois. Avec la verve de Manon, la langue bien pendue, et les crocs acérés, il faut s'accrocher pour suivre ses échanges houleux et apprécier ses critiques avisées ! A nous de voir, ensuite, si on apprécie ou pas... Mais avec l'avis si tranché de la jeune femme, parfois, on est pas d'accord avec ses arguments, et on ressent une certaine déception à aller à contre sens de l'intrigue. Mais c'est tout l'intérêt du débat, et de cette critique de la société à travers Manon : nous montrer des arguments que nous n'aurions pas imaginé !
Mais le fil n'est pas systématiquement perdu, et on apprécie suivre Manon dans ses péripéties, pour savoir comment cette étudiante au destin raté va se sortir de ses ennuis. C'est une aventure loufoque qui lui arrive, et une célébrité inespérée qui la porte ! On est emporté, on la suit, on la lit et l'écoute (oui, on croit l'entendre quand elle s'énerve !) mais on vient à vite douter de certaines facilités... et à nous poser des questions sur une intrigue peut être en second plan dangereuse, au parfum de complot et de mystère... Qui finira par être dévoilée ! Nous laissant agréablement penser que nous n'étions pas de mauvais enquêteurs.
Dommage que la si maligne Manon n'ai pas vu venir le piège ! On perçoit les limites du personnage ... Mais rarement de l'intrigue, qui vient nous entraîner dans des aventures et des retournements de plus en plus loufoques !
La question que je me pose, pour les futurs lecteurs, est tout simplement : vont-ils adhérer au caractère de Manon et accepter de la suivre ?
Espérons que oui, pour qu'ils puissent découvrir cette critique acerbe de notre quotidien bien servie par la plume de l'auteure, et un récit plein d'audace, autant dans la construction, que dans l'idée, ou ses personnages secondaires assez consistants dans leurs rares apparitions. Une intéressante expérience, comme une plongée dans le monde journalistique et politique, que je conseille à tous les curieux de nouvelles approches de notre société, et les amoureux de la langue bien mordante !
Des ouvrages pour les adultes et les plus jeunes, qui aident à découvrir et comprendre la culture sourde
Avec la collection "La BD en classe", le Syndicat national de l’édition propose des supports pédagogiques autour de thématiques précises
Découvrez les auteurs, autrices et libraires qui accompagneront le président du jury Jean-Christophe Rufin !
Une plume vive, des héros imparfaits et une jolie critique de notre société
