Kazuo Ishiguro, un Nobel de littérature incontestable !
Une chose est sûre, le Nobel de littérature 2017 sera incontestable, après les remous provoqués l’an passé par la nomination de l’auteur de chansons Bob Dylan. Avancés par les bookmakers du Prix Nobel aux côtés de Kazuo Ishiguro,...
Il écrit peu et on attend ses livres : huit romans depuis Lumière pâle sur les collines, quand Les Vestiges du jour et Auprès de moi toujours ont été portés à l'écran. Kazuo Ishiguro est une star de la littérature, traduit en...
Kazuo Ishiguro, un Nobel de littérature incontestable !
Chaque année révèle ses surprises et bien heureusement les pépites foisonnent !Un bon cru que celle-ci où les auteurs confirmés nous ont surpris, d'autres ont acquis leur notoriété en recevant de nombreux prix, certains sont carrément époustouflants par leur talent ou leur œuvre colossale. Prenez le temps de les lire, vous ne serez pas déçus !
Il écrit peu et on attend ses livres : huit romans depuis Lumière pâle sur les collines, quand Les Vestiges du jour et Auprès de moi toujours ont été portés à l'écran. Kazuo Ishiguro est une star de la littérature, traduit en trente langues. Le Géant enfoui, son sublime nouveau roman mêle les légendes arthuriennes qui ont suivi l'effondrement de Rome au grand thème de la mémoire qui draine son oeuvre. Il a accepté, pour lecteurs.com, de donner une vidéo et une seule à l'occasion de la sortie du livre en France en mars.
Mr Stevens, majordome a servi avec rigueur et fidélité un lord Anglais pendant environ 35 ans de 1920 à 1955. Suite au rachat de la propriété, son nouvel employeur, un riche américain lui octroie quelques jours de congés. Un voyage à la recherche de Miss Kenton, ancienne intendante lui fait découvrir la campagne anglaise qu’il parcourt avec gourmandise en se remémorant son passé, le faisant ainsi découvrir au lecteur. Un livre magnifique d’où se dégage une atmosphère nostalgique des événements passés avec parfois l’amertume d’avoir raté une occasion, tant la haute estime de son devoir primait toute autre circonstance. Cette parenthèse enchantée offre au majordome l’opportunité de s’interroger sur la façon d’exercer son art, d’évaluer la façon dont il a habité et habite sa fonction comme un véritable sacerdoce. Très belle découverte !
Nostalgie, mélancolie et poésie sont les mots qui viennent à l'esprit à la lecture de ce voyage. De ces voyages devrais-je dire. Voyage physique, voyage dans le temps et voyage intérieur pour ce majordome en pleine réflexion sur l'avenir et sur le sens de son rôle dans la société. Pas une vraie remise en question, il n'en est plus capable.
Vers la fin, un inconnu rencontré sur un banc lui explique que le soir est le meilleur moment de la journée, celui où l'on peut enfin se relaxer après avoir accompli son devoir.
Voilà ce à quoi, Stevens n'a pas droit. Son devoir n'est jamais terminé, pas plus que son apprentissage.
Tout corseté dans sa dignité, il sait qu'il est passé à côté de l'amour et d'une vie d'homme mais se refuse à y penser plus avant et reste avant tout un majordome.
Une ambiance surannée, très "british". Un style à la hauteur du sujet. Une belle oeuvre avec en filigrane cette interrogation : un majordome, aussi grand soit-il, doit-il toujours soutenir son employeur ?
Rien de nouveau sous le soleil
Avec cette lecture j’ai fait un voyage étrange. Ce conte au ton monocorde, car il est narré par Klara, AA (Amie Artificielle), m’a fait adopter le point de vue de l’androïde.
Au début Klara fait l’expérience de la vitrine du magasin dans lequel elle attend preneur. Josie, adolescente malade passe devant la vitrine et souhaite l’adopter.
Ce qui finit par arriver.
Le lecteur va découvrir dans la famille de Josie un mode de fonctionnement où l’humain et ses interactions ont peu de place.
Ce qui m’a le plus perturbée c’est le comportement de la mère. Femme qui a un poste important dans un cabinet juridique, visiblement cette position sociale est très importante pour elle. Elle jongle et délègue, Josie a une gouvernante et maintenant une AA.
Lorsque Josie est malade les crises sont terribles, la maladie n’est jamais nommée et l’on apprend qu’elle a eu une sœur décédée. Le malaise est prégnant.
« Je pense qu’il vaut mieux ne pas avoir emmené Josie aujourd’hui. Elle ne se sentait pas bien. Mais à présent que nous sommes assises ici, elle me manque. […] OK Klara puisque Josie n’est pas là, je veux que tu sois Josie. Juste un petit moment. Puisque nous sommes là. »
Nous découvrons à petit pas ce qui constitue la maladie de Josie et la possible fonction de Klara.
Cette famille a pour voisins Helen et son fils Rick. Josie et Rick sont très liés même si les deux ont des futurs différents.
L’écriture met en place l’histoire par petits traits, des détails d’une précisions extrême, qui nous fait vivre cette histoire de l’intérieur. Pour Klara l’extérieur se découpe en cubes ou boîtes.
Toute en retenue et d’une attention de tous les instants, elle est comme le majordome Les Vestiges du jour, d'un' dignité omniprésente.
Klara est fascinante, sa bizarrerie attachante et la proximité que le lecteur éprouve pour elle troublante.
Le monde du futur ainsi présenté, où les « intellectuels » surtout les ingénieurs sont substitués, c’est le cas du père de Josie, qui vit désormais dans une communauté, induit pour la mère ce comportement vis-à-vis de sa fille. Cette femme vit dans la peur et vous découvrirez de quelle peur il s’agit.
Ce ton monocorde induit une tristesse de tous les instants, elle est comme le soleil voilé par de gros nuages gris.
L’auteur nous dévoile ses préoccupations, telles les inégalités qui croissent avec les technologies, les idéologies d’extrême droite qui s’en nourrissent, ces méritocraties qui montent et induisent un chômage massif et donc un apartheid, dès le plus jeune âge il y a ceux qui font partie de l’élite et les autres.
Ici, il y a les « relevés » (les améliorés) et les non-relevés.
En fait l’auteur laisse au lecteur un champ des possibles à exploiter, comme s’il ne voulait pas aller plus loin.
Un livre qui interroge et nous fait voir le monde sous un autre prisme.
La fin est d’une cohérence totale avec l’analyse.
En conclusion
« Croyez-vous au cœur humain ? Je ne me réfère pas simplement à l’organe, bien sûr. Je parle dans le sens poétique. Le cœur humain. Pensez-vous qu’une telle chose existe ? Cette chose qui rend chacun de nous spécial et unique ? »
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/03/10/klara-et-le-soleil/
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