Passionné(e) de lecture ? Inscrivez-vous gratuitement ou connectez-vous pour rejoindre la communauté et bénéficier de toutes les fonctionnalités du site !  

Jean-Philippe Toussaint

Jean-Philippe Toussaint
Jean-Philippe Toussaint est un écrivain et réalisateur belge né le 29 novembre 1957 à Bruxelles, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris (1978) et titulaire d'un DEA d'histoire contemporaine. Il est l'auteur de neufs romans, tous publiés aux éditions de Minuit, qui se caractérisent par... Voir plus
Jean-Philippe Toussaint est un écrivain et réalisateur belge né le 29 novembre 1957 à Bruxelles, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris (1978) et titulaire d'un DEA d'histoire contemporaine. Il est l'auteur de neufs romans, tous publiés aux éditions de Minuit, qui se caractérisent par un style et un récit minimalistes. Il a été en 1996 lauréat de la Villa Kujoyama et a obtenu le Prix Médicis du roman français en 2005 pour Fuir. Ses romans sont traduits dans une vingtaine de langues. Le « dépouillement souriant » de ses textes est poussé à l'extrême dans ses réalisations cinématographiques.

Avis sur cet auteur (48)

  • add_box
    Couverture du livre « L'échiquier » de Jean-Philippe Toussaint aux éditions Minuit

    Henri-Charles Dahlem sur L'échiquier de Jean-Philippe Toussaint

    Le livre en train de s’écrire

    C’est durant le confinement que Jean-Philippe Toussaint a écrit son livre le plus intime, où il évoque ses souvenirs d’enfance, son père, ses amis à son œuvre littéraire. Le tout en 64 chapitres, comme autant de case de L’échiquier.

    «Les échecs — leur...
    Voir plus

    Le livre en train de s’écrire

    C’est durant le confinement que Jean-Philippe Toussaint a écrit son livre le plus intime, où il évoque ses souvenirs d’enfance, son père, ses amis à son œuvre littéraire. Le tout en 64 chapitres, comme autant de case de L’échiquier.

    «Les échecs — leur symbolique, leur romantisme, leur abstraction rassurante — ont toujours été intimement mêlés pour moi à l’écriture. Ils sont le sujet de mon premier roman, Échecs. Et, depuis que j’ai donné ce même titre, Échecs, à ma traduction de la nouvelle de Zweig, les deux textes se rejoignent dans mon esprit dans une boucle temporelle vertigineuse. Je commence ainsi à prendre conscience que, si je continue à tirer sur ce fil — le fil du jeu d’échecs —, c’est toute la pelote de ma vie qui pourrait se dévider, se débobiner et se dérouler dans ces pages.» Et voilà comment, durant les journées de confinement Jean-Philippe Toussaint décide de meubler son temps en divisant sa journée en deux, la traduction de Échecs de Stefan Zweig d’une part et l’écriture de réflexions autour de sa passion pour ce jeu d’autre part. C’est cette seconde partie qui a donné ce livre riche de souvenirs et qui va bien au-delà du projet initial. Car effectivement, très vite la pelote de sa vie s’est dévidée… Une pelote que l’on voit se dérouler au fur et à mesure dans ce livre en train de s’écrire.
    Son point de départ pourrait se trouver dans un hall d’école, pavé alternativement en plaques blanches et noires. Des cases sur lesquelles les pièces seraient constituées des membres de la famille, des amis d’enfance, des auteurs qui ont accompagné l’auteur de La salle de bain. À la place du roi et de la reine, on placera son père Yvon, «directeur du Soir de Bruxelles, une personnalité reconnue, bien introduite auprès de la classe politique et habituée des plateaux de télévision» et avec lequel il jouera longtemps aux échecs. Jusqu’à ce qu’il soit plus fort que lui et qu’il mette fin à ces échanges, se refusant à perdre. Un père qui aura la lucidité de voir en son fils un futur écrivain. Sur sa mère, qui tenait une librairie-galerie, il est plus discret, mais aussi plus tendre, tout comme pour ses deux grands-mères et pour Madeleine, celle qui deviendra son épouse.
    S’inspirant de Georges Perec – il s’agit d’aller d’une case à l’autre sans jamais y revenir – le romancier passe de la famille aux amis, les Bonhomme, Garrec, Caratini, Lehrer. Ou encore Dominique D. un camarade de classe fantasque dont il apprendra la mort tragique. Un drame qui frappera aussi Gilles Andruet, le champion d’échecs qui le fera progresser et dont il ne voudra pas croire qu’il a été assassiné.
    Hommage émouvant aux amis disparus, ce livre évoque aussi les grands maîtres, Fischer et Spassky, Karpov et Kasparov, Youssoupov ou encore Kortchnoï que l’auteur a failli pousser au nul, sans doute l’une de ses réussites majeures.
    Bien entendu, la littérature échiquéenne ne pouvait manquer dans ce livre. Zweig, cela va de soi, tout comme Perec, mais aussi Nabokov et sa Défense Loujine, Borges et même Lewis Carroll.
    Dans cette vraie-fausse autobiographie, Jean-Philippe Toussaint joue beaucoup et propose au lecteur de jouer avec lui. Avant de finir sur une note plus grave, comme il l’a confié à Livres-Hebdo : «Dans le jeu d'échecs le rapport à la mort est évident, il faut tuer le roi, le temps se réduit comme peau de chagrin, le temps de la partie c'est le temps de la vie. Il y a de même dans le travail d'écriture cette acuité au temps qui passe. Je crois qu'il faut être hypersensible à la mort pour bien écrire.» Est-il utile d’ajouter que ce livre est très bien écrit ?
    NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. En vous y abonnant, vous serez par ailleurs informé de la parution de toutes mes chroniques.
    https://urlz.fr/oHLo

  • add_box
    Couverture du livre « L'échiquier » de Jean-Philippe Toussaint aux éditions Minuit

    Yv Pol sur L'échiquier de Jean-Philippe Toussaint

    C'est le confinement dû à la pandémie de COVID qui est à l'origine de ce livre. Dès le début, arpentant les rues de son enfance -les Belges n'avaient pas besoin d'attestation de sortie-, Jean-Philippe Toussaint se retrouve devant son ancienne école. Puis les souvenirs remontent et les projets de...
    Voir plus

    C'est le confinement dû à la pandémie de COVID qui est à l'origine de ce livre. Dès le début, arpentant les rues de son enfance -les Belges n'avaient pas besoin d'attestation de sortie-, Jean-Philippe Toussaint se retrouve devant son ancienne école. Puis les souvenirs remontent et les projets de rencontres, de colloques s'éloignent, s'annulent. L'écrivain entre alors dans son bureau de Bruxelles et se met à écrire sur sa vie, ses rencontres et sa découverte puis sa passion pour le jeu d'échecs. "J'étais là, immobile, devant l'échiquier de ma mémoire -et j'y resterai tout au long de ces pages, c'est la présent de ce livre, c'est son présent infini." (p.9). 64 chapitres, autant que le nombre de cases de l'échiquier. Simultanément, il commence à traduire le livre de Stefan Zweig, Le joueur d'échecs.

    Il est des écrivains dont on achète les livres sans même en connaître les thèmes. Jean-Philippe Toussaint fait partie de ceux-là, même si sans rien dévoiler, le titre et la quatrième de couverture -un simple échiquier bleu et blanc- laissaient peu de doutes sur ce livre-ci. Cependant, croire que l'auteur se limite à ses parties d'échecs serait trompeur, car il invoque ses souvenirs d'enfance, d'adolescence et de jeune adulte, dans le même temps qu'il parle de sa manière d'écrire, de ses raisons, de ce qu'écrire lui procure : "J'ignorais qu'écrire des livres, au-delà du plaisir que j'y prendrais, serait un moyen de me préserver des offenses de la vie. Car si j'écris, si un jour je me suis mis à écrire, c'est peut-être précisément pour ériger une défense contre les arêtes coupantes du réel." (p.74)

    A l'heure où il entre en vieillesse -c'est lui qui le dit, pas moi-, et où la COVID contraint à un isolement, JP Toussaint revient sur son enfance entre Bruxelles et Paris, ses rencontres, ses débuts aux échecs contre son père, puis avec des copains : "De nombreux journaux, ces temps-ci, donnent la parole à des intellectuels pour les inciter à "penser la crise", à nous dire ce que pourrait être le monde qui succédera à la pandémie, à réfléchir à ce que sera l'après. Mais mon sentiment -la seule intuition saillante qui me soit venue à l'esprit ces temps-ci-, c'est que la pandémie, loin de m'ouvrir de nouveaux horizons pour l'après, me renvoie en permanence à l'avant." (p.82)

    N'étant point féru d'échecs- je ne sais que le déplacement des pièces- j'aurais pu me désintéresser, mais ce ne fut pas le cas, car le jeu est le prétexte que prend l'écrivain pour faire un portrait de lui à différents âges. Très bien écrit. Narcissique, diront certains. Sans doute, mais c'est souvent le thème d'une autobiographie. La réflexion sur l'écriture et la traduction m'a semblé la plus intéressante et la plus développée car, même si je n'écris pas, j'aime savoir pourquoi et comment, un jour, on décide décrire, comment on corrige ses textes, on choisit tel mot plus qu'un autre, celui dont le lecteur se dit qu'il est là pour une bonne raison. Et là, si l'on voit que ce beau texte littéraire est travaillé, précis, il ne sent pas la sueur, tout coule parfaitement, comme si JP Toussaint l'avait écrit d'un jet.

  • add_box
    Couverture du livre « L'instant précis où Monet entre dans l'atelier » de Jean-Philippe Toussaint aux éditions Minuit

    Passemoilelivre sur L'instant précis où Monet entre dans l'atelier de Jean-Philippe Toussaint

    Le titre est le leitmotiv de la narration qui introduit chaque nouveau paragraphe décrivant Monet à l’œuvre de ses nymphéas. Ce texte court, brillamment écrit montre bien l’attitude de l’artiste face à son travail colossal qui sent que son achèvement sera également sa finitude d’être humain et...
    Voir plus

    Le titre est le leitmotiv de la narration qui introduit chaque nouveau paragraphe décrivant Monet à l’œuvre de ses nymphéas. Ce texte court, brillamment écrit montre bien l’attitude de l’artiste face à son travail colossal qui sent que son achèvement sera également sa finitude d’être humain et qui le corrige, l’amende par petites touches pour faire durer le plaisir de l’accomplir et de repousser la mort. L’auteur nous offre également une remarquable description des souffrances de la vieillesse qui s’installe progressivement, mais dont les effets délétères sont atténués par la création artistique.

  • add_box
    Couverture du livre « L'échiquier » de Jean-Philippe Toussaint aux éditions Minuit

    Marie-Laure VANIER sur L'échiquier de Jean-Philippe Toussaint

    « J’attendais la vieillesse, j’ai eu le confinement » C’est sur ce quasi alexandrin que J.P Toussaint commence ce que l’on pourrait nommer son  « journal de confinement.» En effet, comme l’explique l’auteur hanté par la vision du désoeuvrement, dans la mesure où tout ce qui était prévu fut...
    Voir plus

    « J’attendais la vieillesse, j’ai eu le confinement » C’est sur ce quasi alexandrin que J.P Toussaint commence ce que l’on pourrait nommer son  « journal de confinement.» En effet, comme l’explique l’auteur hanté par la vision du désoeuvrement, dans la mesure où tout ce qui était prévu fut soudain annulé, il fallut trouver d’autres occupations. Ses projets partent alors dans trois directions : une traduction du « Joueur d’échecs » de S. Zweig (roman dans lequel un personnage central est confiné lui aussi!), un essai sur la traduction (qui va très vite être abandonné) et un livre autobiographique qui prendra la forme d’une plongée en soi-même, d’un va-et-vient constant entre les lieux d’autrefois et ceux d’aujourd’hui, un texte qui sera en somme une espèce d’« échiquier de la mémoire ».
    Jamais me semble-t-il le ton de J.P Toussaint n’a été aussi personnel ni aussi intime.
    Ce confinement le ramène dans un premier temps vers les lieux du passé : l’école de la rue Américaine, le quartier de l’enfance : les rues Jules Lejeune et Washington, la place Leemans à Bruxelles, le collège de l’Ermitage... À vrai dire, j’avais l’impression de lire un texte de Modiano : les mêmes évocations un peu troubles, la même opacité qui donne un caractère étrange et mystérieux aux souvenirs. Des noms et des prénoms reviennent mais pas forcément des visages. L’auteur raconte le destin incroyable d’amis qui sont morts, très jeunes souvent. Il semble surpris par le peu de choses dont on se souvient des gens qu’on a croisés. Toussaint nous transporte dans un passé lointain et gris duquel émergent des êtres aux contours flous tandis que d’autres visages se font plus précis.
    Évidemment l’auteur s’interroge : « L’heure de l’autobiographie, pour moi, aurait-elle sonné ? » La mort rôde… Difficile de ne pas se sentir concerné par le temps qui passe. Le ton devient mélancolique.
    Les souvenirs d’enfance conduisent l’écrivain à évoquer le jeu d’échecs auquel il jouait régulièrement avec son père, grand journaliste et directeur du Soir. Se dessine alors la relation au père et le souhait de ce dernier que son fils devienne écrivain. « Je n’ai pas eu la vocation, j’ai eu la permission.» Et de préciser : « Le livre que je suis en train d’écrire est un livre d’origine. C’est l’histoire d’une vocation, non pas comment je suis devenu joueur d’échecs - non, je ne suis pas devenu joueur d’échecs-, mais comment je suis devenu écrivain. »
    J.P Toussaint propose aussi des analyses, des réflexions théoriques au sujet de la littérature. Il dit ce qu’elle est ou n’est pas. Il dit de quel ordre est son travail sur la langue et les mots.
    À cela s’ajoutent des passages vraiment très drôles : certaines scènes sont franchement irrésistibles comme celle où il essaie des masques dans une pharmacie, celle du rendez-vous chez l’ophtalmologiste, le docteur Praggnanandhaa ou bien la scène où il avoue à Madeleine, sa femme, que cette crise sanitaire « finalement, ça l’arrange » (en effet, visiblement, il a plutôt très très bien vécu son confinement!) Nous assistons là à de véritables scènes d’anthologie ! Ses réflexions sur ses problèmes de traduction sont aussi très amusantes. Cela crée des ruptures de ton étonnantes où l’on surprend l’auteur dans sa vie quotidienne..
    Toussaint nous propose ainsi un récit autobiographique fragmenté en 64 chapitres (comme les 64 cases du jeu d’échecs.) Le propos semble moins structuré qu’à l’ordinaire et donne l’impression d’épouser le flux de la mémoire : on passe d’un souvenir à l’autre, d’une anecdote à une réflexion sur l’écriture ou la vie. Tout est mouvement et l’on se déplace librement sur l’échiquier de l’existence : « Tout au plus me contenterai-je de promener négligemment mon Cavalier de case en case au gré de mes souvenirs, en tâchant de redonner vie à quelques fragiles silhouettes furtives et émouvantes qui ont traversé ma vie. »
    « L’échiquier » est un texte très intime dans lequel on a l’impression de découvrir un auteur qui dit souhaiter que ce livre soit « un rempart contre le monde extérieur, un talisman, une égide. Je voulais que ce livre soit une réflexion plus ample sur la littérature, je voulais que ce livre dise l’origine de ce livre, qu’il en dise la genèse, qu’il en dise la maturation et le cours, et qu’il le dise en temps réel. Je voulais que ce livre soit sensible, concret, malicieux, humain, ombrageux, généreux, je voulais que ce livre soit tout à la fois un journal intime et la chronique d’une pandémie, je voulais que ce livre ouvre la voie à la tentation autobiographique, qu’il soit une conjonction de hasards et de destinée, de contingences et de nécessité... »
    Oui, le livre est tout cela. Il m’a beaucoup touchée.

    LIRE AU LIT le blog