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Avec Prudientienne Gbaguidi, au Bénin : les livres au cœur

Portrait d'une libraire engagée, membre du jury du Prix Orange du Livre en Afrique

Avec Prudientienne Gbaguidi, au Bénin : les livres au cœur

Elle est l’une des figures les plus actives de la vie littéraire béninoise. Prudientienne Gbaguidi, vice-présidente de l’Association Internationale des Libraires Francophones, n’écrit pas de livres, elle en vend chez Savoir d’Afrique, la librairie de Cotonou qu’elle a fondée. Et en promeut la diffusion à travers différentes Associations.

Portrait d’une femme inspirée et passionnante.

 

Quiconque a rencontré Prudientienne Gbaguidi aura été saisi par son énergie communicative, elle qui a fait des livres sa patrie il y a bien longtemps. Elle se souvient émue que, petite fille, elle raffolait des livres de la collection Caméléon Vert. « Ce sont des contes de nos grands-mères. J’en ai beaucoup lus, les autrices Kidi Bebey et Véronique Tadjo faisaient partie de cette collection ». À l’université, c’est pour la littérature engagée du Continent qu’elle se passionne, transportée par Ferdinand Oyono, Camara Laye et ses compatriotes Olympe Bhêly-Quenum et Jean Pliya. « Ils dénonçaient beaucoup de choses, ils s’intéressaient notamment à la vie des femmes et aux faits sociaux en Afrique après la décolonisation », se souvient celle qui milite pour que le livre soit accessible au plus grand nombre.

Pour autant, rien ne la destinait aux métiers du livre. « Je voulais être juriste, se souvient-elle. Mais je me suis spécialisée en administration générale parce que je ne m’imaginais pas au Barreau ». C’est par hasard que Prudientienne Gbaguidi postule à la librairie catholique Notre-Dame où elle est embauchée comme secrétaire. Et par passion qu’elle y gravira tous les échelons, jusqu’à en devenir directrice en 2014.


Cette expérience est fondatrice. Sous les encouragements de la directrice de l’époque, Prudientienne Gbaguidi se forme aux métiers du livre. « Comme ce type d’études n’existe pas au Bénin, elle ne cherchait que des formations dispensées par France édition en collaboration avec l’AILF (l’Association Internationales des Libraires Francophones, ndlr). Je me suis cramponnée au métier de libraire », précise-t-elle. L’AILF, dont elle est vice-présidente depuis 2021, joue un rôle important pour la diffusion des livres dans la francophonie, mais pas seulement. « L’association regroupe les libraires francophones des quatre coins du monde et leur permet de se faire entendre sur le plan national et international. On organise aussi des séminaires entre les libraires et les éditeurs pour comprendre ce que nous pouvons améliorer, afin que le livre puisse vivre dans le monde entier », explique-t-elle.

 

La Caravane du livre

Faire vivre le livre, Prudientienne s’y emploie chaque jour. Ainsi, en 2018, a-t-elle relancé la Caravane du livre au Bénin. Une activité organisée par l’AILF, qui permet chaque année de découvrir les livres, à travers des rencontres avec des écrivains, des libraires et des éditeurs. Cette année, le Bénin, le Niger, la Côte-d’Ivoire, la Guinée, le Togo et le Sénégal y participent ainsi que deux auteurs phares, par ailleurs lauréats du Prix Orange du Livre Afrique, dont elle est l’un des membres du jury : Yamen Manaï (lauréat 2022) et Djaïli Amadou Amal (lauréate 2019). « En Afrique, il y a des gens qui n’ont jamais vu ou touché un livre, cela leur permet de comprendre ce qu’on entend par écrivain et par éditeur », précise Prudientienne Gbaguidi.

 

Professionnalisation et ouverture

Outre ces activités, Prudientienne, qui considère que pour aider les lecteurs « il est important de ne pas rester à la maison les bras croisés » a créé sa librairie, Savoir d’Afrique, à Cotonou. « La littérature béninoise et plus largement la littérature africaine ne sont pas très connues au Bénin, je veux aider les Béninois à avoir des livres ». Mais avec quelle ligne éditoriale ? « Sans limite » réplique celle qui a créé la première association des libraires de son pays. « Je peux promouvoir des auteurs qui écrivent aussi bien sur nos valeurs que sur celles de l’Occident, sur le vaudou que sur la religion catholique ». 

Prudientienne Gbaguidi lutte également avec ferveur contre le piratage. « Les livres contrefaits nous envahissent. Il faut que les lecteurs ne trouvent que des livres édités en librairie. Pas du piratage ni des photocopies qu’ils peuvent acheter par terre ou dans les kiosques ». Pour autant, elle est confiante : un agrément pour être libraire ou éditeur existe depuis peu, et des lois seront bientôt votées pour contrer le piratage. « Il y a une floraison de libraires et d’éditeurs. Les Béninois s’intéressent aux livres ! » raconte, pleine d’optimisme, celle qui n’en a pas fini de faire découvrir la littérature africaine.

Article de Marjorie Bertin

Photo © Juste Hlannon

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