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De l'existence de dieu(x) dans le tram 56

Couverture du livre « De l'existence de dieu(x) dans le tram 56 » de Gerard Adam aux éditions Meo
  • Date de parution :
  • Editeur : Meo
  • EAN : 9782930333571
  • Série : (-)
  • Support : Papier
Résumé:

Quatre fois par semaine, j'emprunte à la station Anneessens le tram 56 de très approximativement 13 h 24 pour aller tenir une consultation de médecin-conseil au square Albert 1er. Mes confrères, accros de la bagnole, ne me voient jamais partir sans me souhaiter avec des trémolos bonne chance et... Voir plus

Quatre fois par semaine, j'emprunte à la station Anneessens le tram 56 de très approximativement 13 h 24 pour aller tenir une consultation de médecin-conseil au square Albert 1er. Mes confrères, accros de la bagnole, ne me voient jamais partir sans me souhaiter avec des trémolos bonne chance et bon courage, comme si je m'enfonçais en diligence dans les territoires d'Apaches sur le sentier de la guerre. Il est vrai qu'embarquant dans le ventre de la place où se tient chaque soir le marché du sexe homosexuel, je ne sors du tunnel que pour traverser le quartier de Cureghem, un des plus décriés de la capitale, réputé lieu de tous les trafics, arrachages de sacs et autres car-jackings.
J'aime bien le tram 56. La STIB affecte à cette ligne d'anciens modèles aux banquettes inconfortables, qui asseyent face à face leurs usagers cosmopolites, Maghrébins, Africains, Européens du Sud et Anderlechtois de souche, dont s'enchevêtrent les accents bigarrés. Contrairement aux lignes qui desservent les beaux quartiers, nul accordéoniste rom n'y joue son Goran Bregovi?, nul SDF n'y mendie " une p'tite piécette, une p'tite tartine, une p'tite cigarette ". Je pense qu'ils ont tort. Les bourses les mieux remplies ne sont pas celles qui se dénouent le plus facilement (.) Aussi, vanné, grincheux, atrabilaire, ai-je failli récriminer contre un Black affalé sur son siège, dont les jambes écartelées entravaient l'accès au fauteuil d'en face. Considérant toutefois la stature de rugbyman, les paluches de catcheur, le crâne rasé, l'oeil aussi vitreux qu'injecté sous l'arcade proéminente, je m'en suis prudemment abstenu, mettant avec une tolérance bien à propos son attitude sur le compte de la came dont il était bourré. Tandis que je me faufilais en douceur, un frémissement a parcouru le fauve, un soupçon de lueur humanisé le néant du regard, il m'a semblé, ou était-ce illusion, que le corps se mouvait de quelques millimètres avant de retomber en léthargie.

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