Basil Zaharoff, puissant homme d'affaires et légendaire marchand d’armes
Mais toujours en toi vibre cet amour de la mère. Un amour qui te soutient, t'enjoint de tenir, de te montrer docile et courageux, de lui témoigner ta gratitude en veillant à ne rien faire qui pourrait la peiner. (p107)
Lambeaux de vie, d'une enfance qui a marqué toute une vie, de la perte de sa mère à laquelle il fut arrachée à peine né, morte affamée pendant la guerre dans un asile d'aliénés, de l'amour d'une seconde sans lien du sang mais avec des liens d'amour inconditionnel, une seconde famille qui l'a accueilli et reconnu comme l'un ses siens. C'est de cela qu'il est question dans ce récit très chargé en émotions et aveux d'un homme, Charles Juliet, qui s'adresse à ses mères perdues, comme un hommage à leur courage face parfois à des injustices, mais également à lui-même avec l'emploi du "tu" pour donner à l'ensemble une ambiance d'intimité encore plus forte accentuée par la simplicité et la sincérité de la parole mise en mots.
Comment rester de marbre face à cette mère inconnue, qui perdit son premier amour avec un sentiment de culpabilité, qui subit sa vie faite de grossesses et du dur travail de mère et de paysanne, elle qui rêvait et aurait eu la possibilité d'études mais qui était plus utile sur les terres que sur un banc d'école, qui ne fut jamais entendue, écoutée.
Mais au bout du compte, ces instants que tu passes à arpenter les chemins en parlant les mots qui montent de ta nuit, ne te soulagent guère, et de jour en jour grandit en toi une âpre révolte à l'idée qu'on peut mourir sans rien avoir vécu de ce qu'on désire si ardemment vivre (p77)
Comment ne pas entendre la voix de Charles Juliet retraçant son parcours, peu doué pour les études et placé comme enfant de troupe très jeune avant d'avoir eu la révélation que l'écriture allait être à la fois sa bouée mais également son destin, malgré la difficulté d'écrire, de trouver l'inspiration, les mots justes.
Je suis toujours aussi intéressée par le travail de l'écrivain, ce qui se cache derrière les mots, la plume, le parcours emprunté et lorsque j'ai découvert lors d'une émission de La Grande Libraire Charles Juliet , sa façon discrète d'être incroyablement présent, le choix et la profondeur des mots qu'il utilisait, son humilité et sa simplicité, s'exprimant à la manière d'un poète, je n'ai eu qu'une envie le lire et d'avoir confirmation de ce que j'avais ressenti. Nous sommes le plus souvent ce que notre enfance fut et restons souvent marqué à jamais par celle-ci.
Une enfance et une histoire simples, rurales, comme il en a existé tant mais quel hommage à ses mères qui lui donnèrent tant, même si la chaleur des sentiments n'était pas exprimée, quel regard à la fois distancié par rapport à l'enfant qu'il a été mais également très intime, se révélant à lui-même certains aspects de sa personnalité, de ses choix. Une plongée dans son moi le plus profond pour faire le lien entre tout ce qui l'a construit et devenir l'homme de lettres qu'il est devenu.
Tu as l'inestimable satisfaction de te dire que le destin a prouvé qu'il t'accordait le droit de vivre. (p113)
Ecrit entre 1983 et 1995, sans effet linguistique mais avec la sincérité du cœur, il porte un regard à la fois bienveillant, reconnaissant mais également critique sur une époque où la femme n'était que deux bras, un ventre et qu'il lui était pas reconnu d'avoir des ambitions et des capacités. Un récit d'enfance, à la fois doux et révolté mais sans violence parce que les mots suffisent par eux-mêmes, parce qu'il n'est pas nécessaire d'en rajouter, parce qu'avec le temps et le recul, il a compris et accepté celle qui l'a engendré et celle qui l'a élevé.
C'est un vibrant chant d'amour pour ses femmes silencieuses inconnues et une introspection sur une enfance qu'il accepte et vénère parce qu'elle a fait de lui l'homme qu'il est.
Coup de coeur.
Toute sa vie, Charles Juliet a tenu un journal qu'il publiera. Ce premier tome prend place durant la jeunesse de l'auteur. Il vient de quitter les enfants de troupe et d'abandonner ses études de médecine pour se consacrer à l'écriture avec ferveur.
J'aime énormément Charles Juliet. Pénétrer dans ses pensées de jeune homme, sa démarche d'écrivain, son rapport à la vie et à l'art est un privilège.
J'ai savouré ce journal et lirai les tomes suivants sans aucun doute.
A lire à son bureau.
« Moisson » regroupe les poèmes d’une vie, des poèmes, certains inédits, rassemblés et mis en gerbe.
Ce qui caractérise la poésie de Charles Juliet, c’est la sobriété jusqu’à l’âpreté, voire une certaine rudesse. Il faut voir là le reflet de la vie de l’auteur qui a perdu sa mère très jeune, qui a connu la dureté de l’école militaire pour être ensuite placé chez une famille de paysans.
La quête de la mère est omniprésente tout au long de l’œuvre.
« Tu es cette mère que j’ai perdue
Mais comment croire
Que la mort
Avait pu t’emporter »
La poésie de Charles Juliet est dépouillée, elle va à l’essentiel et la frugalité de ses mots donne sa force au poème.
« Des mots
me viennent
ils sont
les mots arides
de la soif »
Le propos est âpre, l’angoisse est là, à chaque page et l’on sort bouleversé par cette lecture.
Ce recueil a reçu le prix Goncourt de la poésie en 2013
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