Découvrir le baroque du monde entier, à travers ses thèmes essentiels, les extases, les anges, les vanités, les affects, le rôle du spectateur, le sens du pouvoir, dans ses dimensions spirituelle et sensuelle.
C'est l'objectif de cet ouvrage qui s'attache aux extrêmes d'un art total, où les matières - marbre, stuc, bois dorés -, les ormes et les effets - de l'architecture à l'infime détail d'une torsade ou d'une lumière - sont captés par l'oeil d'un photographe de grand talent et analysés par l'esprit pointu d'un spécialiste passionné.
Il n’existe pas un baroque mais bien des baroques. Ce mot embrasse bien des sens mais celui qui semble avoir été le premier, désignait en joaillerie une perle irrégulière. La notion d’imperfection, de déséquilibre, d'inharmonieux, voire de monstrueux, est donc attachée à cette esthétique née dans les dernières années du XVI° siècle pour dominer les arts jusqu’à la fin du XVIII° siècle. Très longtemps discrédité, considéré comme un art décadent face à la calme rigueur du classicisme, le baroque pourrait être caricaturé par les mots « tourmenté, extatique, tumultueux, exacerbé, excessif ». Ici, dans cet ouvrage de Giovanni Careri et de Ferrante Ferranti, le baroque est à nouveau réhabilité en tant que période de l’histoire de l’art des plus foisonnantes. Né essentiellement à Rome, d’abord dans le champ architectural, il se veut un art de la mise en scène totale qui fait également appel à la peinture et à la sculpture. La civilisation occidentale (catholique) a tenté d’imposer cette esthétique dans toute l’Europe (les Pays-Bas résisteront), la Russie, la Chine, l’Amérique du Sud … Le baroque s’est imposé grâce à la circulation des créateurs, des ambassadeurs, des prosélytes religieux (les jésuites). Art religieux, art politique, art de propagande, il est également un art de la manipulation, imposée aux foules à fin de les convaincre, en jouant sur les émotions fortes. Le Caravage, le Bernin, François Duquesnoy, Borromini, Velázquez sont convoqués aux côtés de tous les autres artistes de l’époque.
Les illustrations au cadrage parfois excentré (et des détails exceptionnels) parviennent à renouveler l’habituelle iconographie liée au baroque (et au rococo). Si bien que le voyage en vaut la peine : de Rome à Bruxelles, de Saint-Pétersbourg à Madrid, de la Bohème au Mexique, des extases aux martyrs, des premières natures mortes aux vanités philosophiques, le baroque s’impose comme la première expression de notre actuel monde du spectacle. Et pour cette simple raison, mais riche en implications esthétiques, cet ouvrage est une réussite.
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