Un cinquième roman où la mélancolie s'ajoute à l'humour ravageur de l'auteur
C'était un coin de nature paisible. Aujourd'hui la forêt est juste magnifique, les couleurs sublimes, impossible d'imaginer qu'un accident nucléaire a eu lieu, et pourtant ...
Ils ont cinq jeunes ; Fred et Sarah, Marc et Lorna et Alessandro. Ils n'ont pas voulu quitter les lieux après l'accident estimant que leur vie est là surtout pour Fred et Sarah près de Vic.
Dans ce petit coin paisible, une communauté d'irréductibles est surveillée par des drones. Un horizon de trois ans, c'est ce qu'ils ont pour vivre en autarcie. De toute façon, foutu pour foutu... ils savent ce qui leur arrivera. Ils respectent les protocoles de sécurité, les mesures des invisibles radiations, la combinaison, le masque .. l'iode, mais à quoi bon !
C'était leur choix de rester de ce côté du mur après l'accident, surveillés par les drones. Leur vallée est tellement belle, la forêt magnifique et puis c'est l'amitié et la solidarité qui les animent. Ils sont témoins de ce désert humain à l'herbe grasse, la nature foisonnante qui masquent l'ennemi invisible.
Les descriptions de la nature sont magnifiques, elles m'ont fait penser au très bel album d'Emmanuel Lepage "Un printemps à Tchernobyl".
La communauté est unie, bien décidée à rester là jusqu'au moment ou "un enfant va naître", ce qui va tout changer, une vie, un nouvel espoir...
L'écriture est limpide, c'est fluide. La tension monte peu à peu dans l'écriture décortiquant les pensées de chacun, Fred pour commencer, s'exprime à la première personne, cèdera sa place à chacun qui tour à tour nous donnera son ressenti. C'est fort, prenant, un très beau récit emprunt d'humanité démontrant que la vie s'impose toujours dans ces terres au règne animal.
Un joli ♥ de cette rentrée.
Les jolies phrases
On ne soupçonne rien. C'est le plus terrible de cette vie. Se dire qu'on ne voit rien, et quand on ne voit rien, et quand on voit il est trop tard. On ne discerne pas les radiations. Tout est normal. Bien trop normal, et c'est là le vertige.
On survole un territoire qui n'est que bleus, des bleus résineux, huilés, des trous bleus qui dévorent la lumière, des bleu horizon, des Prusse, des Charron, parfois des ondées de bleu barbeau, qui semblent plus claires.
Notre existence a beau être limitée, forcément limitée, je crois qu'on n'a pas envie de vivre dans un capharnaüm où plus rien n'aurait d'importance. Les choses qu'on range seront là demain, et c'est déjà une bonne raison d'y prêter attention. Cela n'empêche pas les coups de folie, les moments où tout ceci nous gave, où plus rien n'a de sens, et alors ça brûle, ça jette, ça casse, les murs en prennent pour leur grade, mais ce ne sont qu'éclats, on arrive à se raisonner, il y en a toujours un pour cela, souvent Alessandro ou Lorna, et on nettoie derrière, gentiment, patiemment, un peu contrits d'avoir perdu nos nerfs.
Ce sont nos instruments qui donnent la mesure qui nous attend dehors. De longs bips tout en ronflement, des sons saccadés, une syncope de bruits métalliques qui n'en finissent pas dès qu'on met le pied dehors, l'impression de vivre sous respirateur, un carcan entêtant, sans fin, qui dit inlassablement qu'on a beau marcher et chercher, il n'y a jamais, jamais, de zone saine, sauf à l'intérieur des maisons, et encore, je crois qu'on n'a plus trop envie de savoir, on coupe nos engins dès qu'on est chez nous. La vie serait impossible, s'il s'avérait qu'il y a nulle part où aller.
L'air frais me saisit. Ça sent bon. Comme avant. J'en prends plein les poumons. On ne soupçonne rien. C'est le plus terrible de cette vie. Se dire qu'on ne voit rien, et quand on voit, il est trop tard;
Pense aux tranchées, mec. On est dans une putain de tranchée. On est comme eux. On sait que c'est désormais là que ça se passe. On sait qu'on va se faire dégommer, qu'on sorte, qu'on reste, mais c'est trop tard pour faire quoi que ce soit d'autre. Ce sont les tranchées qui nous obligent. Rien d'autre.
https://nathavh49.blogspot.com/2023/09/les-terres-animales-laurent-petitmangin.html
Depuis que j’ai fini de lire ce roman, je ne sais pas quoi en penser.
J’ai aimé la première moitié : nous suivons Fred puis Sarah, un couple qui survie dans un village coupé du monde après que la centrale d’à côté ait explosé. Ils ont choisi de rester car leur fille est enterrée dans ce village.
J’ai aimé découvrir leur quotidien habillés de scaphandre, un compteur à la main ; leur façon de se nourrir avec de vieilles boites de conserve ; leurs promenades dans les bois bleus si beaux.
Et puis arrive un peu de vie dans cet univers stérile, et j’ai perdu le fil : je n’ai plus compris Sarah qui m’a paru perdre pied petit à petit ; l’obsession de Fred à aller contre la volonté de sa femme ; le choeur des amis qui se fait pressant.
L’auteur m’a laissé sur ces Terres animales en pleine interrogation.
L’image que je retiendrai :
Celle des ouzbeks qui arrivent au village et s’installe. Une complicité se créé entre les femmes.
https://alexmotamots.fr/les-terres-animales-laurent-petitmangin/
Coup de coeur pour ce roman puissant et poignant. Il tire sa force des trois personnages que l'auteur met en scène , de l'amour qui les lie,de l'inévitable empathie que le lecteur a pour ce père veuf qui conduit ses deux fils de son mieux vers l'âge adulte. Cette famille lorraine d'un milieu simple a des valeurs , elle a foi en l'école et en l'éducation ,l'on s'implique dans la vie locale,le père continue à militer à gauche .
La construction du récit est intéressante : un rythme très vif, des ellipses qui déroutent le lecteur.
Fus l'aîné des garçons est très affecté par la mort de sa mère.Il prend soin de son cadet Gillou.
Fus change quand il est en terminale et s'oriente vers un IUT.Ses copains ne plaisent pas trop à son père.Et le Bernard pense avoir vu Fus zoner avec les fachos.Toutefois Fus ne change guère au sein de sa famille alors que son père est très froid avec lui.Quand Gillou est admis en classes préparatoires à Paris, Fus l'aide dans sa recherche d'un logement.Alors que trouve-t-il chez les frontistes ?
Puis le drame commence.quand Gillou et son père conduisent Fus à l'hôpital car il est en piteux état après s'être battu. Il est placé dans un coma artificiel.Les gendarmes viennent l'interroger , il a été attaqué par des antifascistes.
Puis c'est l'escalade dans l'horreur…
Les terres animales
Ils sont cinq. Cinq avoir choisi de rester après « l’accident ». Cinq à avoir résisté aux pressions, aux injonctions, aux menaces qui les poussaient à fuir pour toujours ces terres irradiées par l’explosion de la centrale. Avec quelques autres, ils ont fait le choix de rester quel qu’en soit le prix, quels qu’en soient les risques, par attachement à leurs terres, par attachement à leurs morts. Ensembles, ils ont construit un équilibre fragile fait d’entraide et d’amitié, une résistance passive dont ils savent les jours comptés. Mais un évènement inattendu viendra fissurer leurs quiétude et menacer leurs précaires existences.
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Dans ce nouveau roman, Laurent, Petit Mangin, nous embarque dans un roman post apocalyptique. Point de survivalisme ou de dystopie ici cependant, car ces questions sont vite à écartées pour recentrer le roman sur les rapports humains, sur ce qui fait leur humanité face a une nature aussi majestueuse que menaçante. Dès les premières lignes, le ton est donné, et on retrouve avec plaisir le talent de l’auteur à dire simplement les sentiments, les émotions, la vie. Dans cet univers clos où chaque jour est une victoire, ces irréductibles ont su recréer une bulle de bonheur. Une vie faite de joie et de bonheur simple, une vie comme les autres, si l’on fait abstraction des compteurs Geiger, des sas de décontamination ou des survols de Drône. Une vie bousculée par l’arrivée d’une nouvelle vie, qui va rebattre les cartes faire flancher les certitudes car comment envisager l’espoir quand on l’avait a jamais abandonné? Comment se projeter dans un avenir quand on le sait sans issue? Dès lors les rapports vont se tendre, des failles vont apparaître et la tension monter crescendo de façon habile et inéluctable, faisant naître un champs de bataille invisible où tout semble inchangé et où pourtant plus rien n’est pareil.
Dans ce huis clos palpitant, l’auteur une fois encore explore ses thèmes de prédilection. L’amour, l’amitié, la paternité, la fidélité aux liens qui nous unissent, leur fragilité aussi. Le tout dans une nature qui parait plus belle que jamais alors qu’elle n’a jamais été aussi nocive. Une réflexion forte et troublante, captivante et un peu effrayante aussi. Une réussite, encore une, de cet auteur que j’affectionne.
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