Des ouvrages pour les adultes et les plus jeunes, qui aident à découvrir et comprendre la culture sourde
Elle, la narratrice, a 23 ans, est d'origine vietnamienne et vit à Paris, assistante d'un photographe. Très libre, elle vit en suivant son instinct, ses pulsions, ses désirs, en même temps que les hommes dans la rue.
Elle s'adresse à "toi", son frère dix ans plus âgé, qu'elle voudrait tirer de sa déprime, un mal-être qui ne l'a jamais vraiment quitté depuis qu'avec leurs parents ils ont fui le Laos, 20 ans plus tôt.
Elle ne se souvient pas de son pays natal, "toi" ne s'en souvient que trop bien et n'a jamais réussi (voulu?) s'adapter à la France, terre étrangère où il n'arrive pas à être lui-même.
Elle parle aussi d'eux, leurs parents, pas davantage intégrés, recroquevillés sur leurs traditions et leurs habitudes rigides, repliés dans une zone de confort forgée pour supporter l'exil et survivre dans ce pays d'accueil où ils ne resteront jamais que des étrangers.
Elle, fille de la deuxième génération, est vue en France comme une étrangère, quoi qu'elle fasse, rien à faire, sa peau la trahit. Elle l'est au Laos également, où elle retourne avec sa mère et son frère pour les funérailles de sa grand-mère. Là-bas non plus on ne lui donne pas sa place, avec sa dégaine de touriste, la langue qu'elle ne maîtrise pas, le modèle traditionnel de la jeune fille attendant sagement un mari, qu'elle refuse (le mari et le modèle).
En manque de racines, en panne d'identité, les retrouvailles avec son grand-père vont lui apprendre à s'ancrer, littéralement à être bien dans sa peau : "le seul endroit sur terre dont je peux revendiquer l'appartenance est le périmètre de ma peau. C'est là le seul, le vrai lieu qui est le mien".
Avec son écriture poétique et sensuelle, parfois très crue, ses phrases courtes et hachées, "L'imprudence" parle d'identité, d'exil, de la façon dont on vit un déracinement selon les souvenirs que l'on a de son pays d'origine, de la façon dont les autres vous perçoivent, ici ou là-bas, de cet entre-deux souvent inconfortable entre ici et là-bas quand on ne s'identifie pas/plus à l'un ou à l'autre. Et quand bien même la narratrice se sent française et tourne le dos aux traditions familiales, elle se voit étrangère dans le regard des Français, et incomprise des siens. C'est là son "imprudence" : échapper aux normes, chercher qui elle est, la voie vers la liberté.
L'imprudence est un livre sensuel.
Il parle de l'émotion, lorsque les corps s'attirent, se touchent et se prennent au détour d'un ascenseur, d'un couloir ou d'un lit mais également de l'émotion de celui qui a été déraciné. Très tôt et n'en garde la trace que par son apparence physique et la souffrance des proches toujours emprunt de cet ailleurs.
Nous sommes comme les personnages ballotés entre la France et le Laos. Le conflit de culture est vécu si différemment par chacun des personnages.
La grand mère décède alors il faut faire le voyage, certains s'y refuseront, s'y perdront, y passeront, accueilleront enfin du grand père, à la voisine, du frère, à la mère, de l'ancien camarade de classe à l'étranger américain, tous les sentiments, toutes les émotions, toutes les variations sont présentés, actives, frémissantes.
Un parcours de la renaissance sous forme d'un parcours initiatique. Je me suis fait cueillir. Tout y est parfait, délicat, délicatement parfait. Rien n'est en trop, rien ne manque.
C'est un petit livre de 140 pages, un condensé d'émotions. Ne passez pas à côté.
Contrairement à son frère d’une dizaine d’années son aîné, la narratrice n’a gardé aucun souvenir du Laos, qu’avec leurs parents ils ont fui lorsqu’elle était encore en bas âge, dans les années 1980. A désormais vingt-trois ans, elle est l’assistante d’un photographe à Paris, où elle mène une existence très libre et collectionne les aventures d’un soir. Son frère, lui, ne s’est jamais remis de son exil et sombre dans la déprime. Au décès de leur grand-mère restée au Laos, les deux jeunes gens et leur mère retournent pour quelques semaines dans leur pays d’origine.
Mise à part l’aïeule Wàipó dont l’ombre omniprésente cimente tout le récit, personne n’a de prénom dans cette histoire construite en ricochet entre le « je » de la narratrice, le « tu » du frère et le « il » du grand-père, comme si, pour ces trois là, départis de leur identité par l’exil et la séparation, un seul repère pouvait subsister : le souvenir aimant de celle qui fut le pilier de la famille.
Le leitmotiv du texte est le déracinement et la perte d’identité des exilés. Tandis que ses parents vivent retranchés dans une bulle protectrice reproduisant en France leur cadre laotien, pendant que son frère refuse obstinément sa vie de transplanté qui ne remplacera jamais celle qu’on lui a volé, la narratrice constate que sa double appartenance ne fait que la rendre étrangère partout. Les premiers s’isolent dans le contrôle obsessionnel d’un quotidien rigide et replié sur lui-même, le second cherche l’oubli dans une dérive dépressive ouverte à toutes les addictions, la dernière s’enivre d’une liberté sexuelle qui serait restée inconcevable au Laos, trouvant refuge dans le seul territoire qui lui appartienne en propre : son corps.
Parfois dérangeant par sa sensualité crue, d’une lecture fluide et agréable, ce roman du déracinement et de la quête d’identité impressionne par la profondeur des souffrances évoquées et par l’intelligence de l’écriture. L’on ne peut qu’être touché par ce texte, dont on imagine aisément quelques possibles proximités avec le parcours personnel de l’auteur.
Roman court, très court, d'à peine 160 pages d'une écriture fluide et poétique, décrivant l'exil et le besoin de comprendre ses racines.
La narratrice, une jeune femme photographe d'origine vietnamienne apprend le décès de sa grand-mère et rejoint son frère et sa mère à Savannakhet au Laos
Partie à cinq ans avec ses parents, sur la barque d'un passeur, elle était revenu à trois reprises (re) découvrir ses grands-parents et nouer des liens avec sa grand-mère.
Son frère ne s'est jamais vraiment remis de cet exil survenu à ses 11 ans, et, à 33 ans, c'est la première fois qu'i l revient. Sa séparation d'avec sa grand-mère fut pour lui un déchirement qu'il ne peut réparer.
Au cours des trois semaines de ce séjour, chacun d'eux devra retrouver des repères, faire la paix avec le passé et leur présent et recréer les liens nécessaires avec leurs origines.
La tendresse qui unit la narratrice à son grand-père ; la découverte de leurs similitudes, toute en pudeur et en non-dits est un fort moment de ce roman
Une auteur que je découvre et dont je vais rechercher les autres productions
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