Passionné(e) de lecture ? Inscrivez-vous gratuitement ou connectez-vous pour rejoindre la communauté et bénéficier de toutes les fonctionnalités du site !  

Caroline De Mulder

Caroline De Mulder
Née en 1976 à Gand (Belgique), Caroline de Mulder enseigne à l'université de Namur et à Paris-III. Elle vit actuellement à Paris. Ego tango est son premier roman. Elle publiera à l'automne 2010 un essai aux Editions du Seuil (Faust amoureux).

Avis sur cet auteur (12)

  • add_box
    Couverture du livre « La pouponnière d'Himmler » de Caroline De Mulder aux éditions Gallimard

    nathalie vanhauwaert sur La pouponnière d'Himmler de Caroline De Mulder

    Nous sommes en Bavière en 1944, la fin de la guerre approche peu à peu. La première maternité nazie, Heim Hochland, semble préservée de tout, un grand parc, un étang, il ne manque de rien pour les futures mères et les nourrissons. Un hâvre de paix en apparence. Détrompez-vous, nous sommes dans...
    Voir plus

    Nous sommes en Bavière en 1944, la fin de la guerre approche peu à peu. La première maternité nazie, Heim Hochland, semble préservée de tout, un grand parc, un étang, il ne manque de rien pour les futures mères et les nourrissons. Un hâvre de paix en apparence. Détrompez-vous, nous sommes dans un "camp de vie" à l'opposé des "camps de la mort", dans un Lebensborn, un programme imaginé par Himmler pour produire de futures recrues SS, pour créer une race aryenne pure.

    C'est un roman choral où trois personnes s'expriment tour à tour.

    - Renée, une toute jeune française qui a dû fuir sa Normandie natale, cette jolie rousse en a bavé, elle arrive tondue après avoir été exhibée, malmenée dans son pays pour être tombée amoureuse d'Artur Fuerbag, un soldat allemand dont elle est enceinte. Amoureuse, jeune, naïve, elle attend son enfant et pense à lui constamment, lui écrivant et attendant des lettres qui n'arrivent pas.

    - Schwester Helga, est une jeune infirmière modèle qui veille sur les futures mères et les nourrissons. Elle est l'assistante administrative du docteur Ebner qui dirige le centre. Elle est inconsciente de la finalité du projet, se donne corps et âme dans son travail. C'est la seule à avoir un peu d'humanité. Elle rédige son journal et se pose des questions suite au dossier de Jürgen, un bébé un peu différent et sa mère Frau Geertrui.

    - Marek Nowak est un prisonnier politique polonais. Il était à Dachau, il s'occupe à présent de l'entretien du parc et de la construction d'annexes au Heim. Il repense à sa femme et à son enfant qui aurait dû naître, cela hante ses pensées mais alimente aussi l'espoir.

    Un récit parfaitement maîtrisé qui nous donne un point de vue essentiellement féminin, une véritable immersion dans un Lebensborn. On comprend bien la notion d'endoctrinement, le manque d'humanité lorsqu'un enfant ne répondait pas aux critères fixés, le sens du devoir mais aussi peu à peu des doutes, des interrogations par rapport à la finalité et la réalité du projet.

    Un roman très visuel à la plume précise, sobre. Un récit bien documenté. On comprend que si on supprime une population, l'objectif est d'en recréer une autre, une race aryenne pure pour produire des recrues SS. L'inimaginable pourtant issu de la pensée d'Himmler. Des enfants enlevés, germanisés de force car racialement valables, des enfants sans identité, rejetés après la guerre car personne n'en voulait.

    Ce roman nous montre la cruauté de l'âme humaine mais nous parle aussi d'espoir. J'ai beaucoup aimé la résilience de Marek. Je ne vous en dis pas plus, c'est un livre à lire absolument.


    Ma note : ♥♥♥♥♥


    Les jolies phrases

    Plus de sirènes, mais les dents de Renée continuent à claquer. La guerre arrivera. Elle en est sûre. Elle le sent, même physiquement, que la guerre est en train d'avancer dans sa direction. Respiration haletante, comme si elle courait. Dans sa tête elle court si vite qu'elle ne dormira plus, ne se couchera plus, elle ne sera plus jamais chez elle nulle part. Elle le sent dans le picotement du bout de ses doigts. Elle le sent dans ses os.

    Son dos coule ; pendant la nuit, les feuilles glissent les unes après les autres, il est un arbre nu, dont la vie s'enfuit en même temps qu'une sève malade, une sève grouillante de bactéries qui le dévorent et le digèrent.

    La vie a cette sale propension à broyer la beauté. Rien ne survit mieux, pense-t-il, que les lâches et les crapules. Elle était enceinte, aussi. Et en ces temps de guerre, la vie fragile d'un enfant n'est faite que pour s'éteindre comme une bougie entre le gras du pouce et l'index.

    Et elle ne peut rester ici qu'à cause de l'enfant. L'envahisseur est dehors et dedans : elle est envahie de l'intérieur.

    Elle est devenue un creux rempli de ventre. Une terre qui sèche à mesure qu'un arbrisseau y pousse, et elle se meurt à mesure que sous sa peau son enfant naît. Une urne funéraire dans laquelle trempent des fleurs vives aux racines terrifiantes.

    Elle se lève tous les jours, et son corps chancelle, treillis trop fin colonisé par une plante grimpante qui devient trop lourde. Des os comme des brindilles creuses et nues étouffées par une verdure étrangère, et ses pas sont tout petits, et ses yeux manquent de lumière.


    C’est une des phrases qu’il répétait, avant : « On a toujours le choix ». À tous ceux qui disaient, « Je n’ai pas eu le choix ». On l’a toujours. C’est juste qu’il n’est quelquefois pas facile à faire. Que dans certains cas il coûte très cher. Ceux qui disent « Je n’ai pas eu le choix » sont ceux qui ont choisi la facilité. Et soudain, il pense que si Wanda et lui avaient eux aussi fait ce choix-là, ils seraient en ce moment ensemble et heureux et rassasiés.


    https://nathavh49.blogspot.com/2024/04/la-pouponniere-dhimmler-caroline-de.html

  • add_box
    Couverture du livre « Manger Bambi » de Caroline De Mulder aux éditions Gallimard

    Mimosa sur Manger Bambi de Caroline De Mulder

    Désarçonnée par le langage "d'jeuns"du début ,me suis pourtant attachée à cette jeune fille,Hilda dite Bambi 16ans;sa journée d'anniversaire est un passage mémorable de ce court roman noir.La prostitution de ces jeunes est au coeur du livre submergé par la violence.Que de souffrances!
    Il faut...
    Voir plus

    Désarçonnée par le langage "d'jeuns"du début ,me suis pourtant attachée à cette jeune fille,Hilda dite Bambi 16ans;sa journée d'anniversaire est un passage mémorable de ce court roman noir.La prostitution de ces jeunes est au coeur du livre submergé par la violence.Que de souffrances!
    Il faut s'accrocher pour tourner les pages...Réalité,mensonges...à chaque lecteur de se faire son opinion sur Bambi;un "documentaire"sociétal où l'argent est bien le nerf de la guerre.

  • add_box
    Couverture du livre « Manger Bambi » de Caroline De Mulder aux éditions Gallimard

    Ju lit les Mots sur Manger Bambi de Caroline De Mulder

    Vous pourriez imaginer mille choses à travers le titre, pourtant aucune ne sera celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer une intrigue sur la cause animale, pourtant, même s’il est question d’animalité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer que...
    Voir plus

    Vous pourriez imaginer mille choses à travers le titre, pourtant aucune ne sera celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer une intrigue sur la cause animale, pourtant, même s’il est question d’animalité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez. Vous pourriez imaginer que l’auteure souhaite parler de ces animaux en voie d’extinction, pourtant même s’il est question de bestialité, ce n’est pas celle à laquelle vous penserez…

    Manger Bambi, quel drôle de titre que cette référence à l’enfance avec le dessin animé éponyme, pourtant ici point de contes à la clé, sauf un conte des temps modernes où l’horreur côtoie l’enfance, l’adolescence. Un parallèle avec la perte de l’innocence et de ces illusions enfantines.

    Bambi à l’aube de ses quinze ans a déjà tout du monstre… Bambi mord avant de l’être, elle s’est construit dans un rôle lui permettant de prendre sa revanche. Ce qu’elle veut c’est du pognon pour s’en sortir. A la tête d’un trio d’ado toutes aussi perdues qu’elle, elle se sert d’un site de sugardating, sur lequel ces messieurs, bien plus âgés, cherchent de la chair fraîche… Elle monte des traquenards, dignes des plus grands bandits, elle emprunte les codes des mecs pour se faire sa place.

    On pense à tort que la violence est réservée aux garçons, or, lorsqu’elle est utilisée par les filles, elle est aussi virulente, si ce n’est plus. Comme si elles devaient prouver qu’elles sont capables d’être violentes. Ce qui est horrible dans ce livre ce n’est pas tant la violence, mais c’est le détachement avec lequel Bambi en use. Même ses copines ont du mal à la comprendre, ne comprennent pas dans quoi elle les entraîne. Sauf que Bambi, ne lutte pas seulement contre la société qui l’enferme dans sa misère, alors que d’autres ont tout, mais lutte surtout contre elle-même est ses démons.

    Ce qu’elle n’a pas, elle le prend de force et prendre par la force lui donne un sentiment de puissance qui l’exalte. Pourtant, elle va se brûler les ailes et toute cette violence qui l’exalte et la broie de l’intérieur, va la consumer.

    Ce n’est pas une simple histoire, c’est une histoire qui prend aux tripes, ce n’est pas une simple intrigue, c’est un roman sociétal qui pointe les dysfonctionnements de notre société moderne. C’est un roman sur la lutte des classes, sur la pauvreté et ce qu’elle peut engendrer. C’est l’histoire de la violence sous toutes ses formes et dans ce qu’elle a de plus abject. C’est l’histoire de toutes les Bambi dont la violence est le reflet d’un mal-être d’une grande profondeur. C’est l’enfance bafouée, l’absence de parents, c’est la violence comme héritage familial.

    https://julitlesmots.com/2021/05/20/manger-bambi-de-caroline-de-mulder/

  • add_box
    Couverture du livre « Manger Bambi » de Caroline De Mulder aux éditions Gallimard

    Musemania sur Manger Bambi de Caroline De Mulder

    Voilà un roman très noir, dénonçant les violences féminines, très souvent tues, au travers des sites Internet des sugar-babies. En utilisant ce nom gentillet, ce n’est finalement pas moins qu’une forme de prostitution, souvent pour de très jeunes filles en mal d’argent mais aussi de...
    Voir plus

    Voilà un roman très noir, dénonçant les violences féminines, très souvent tues, au travers des sites Internet des sugar-babies. En utilisant ce nom gentillet, ce n’est finalement pas moins qu’une forme de prostitution, souvent pour de très jeunes filles en mal d’argent mais aussi de reconnaissance.

    « Manger Bambi » n’est pas un conte de fée, bien loin de là. C’est un livre à la fois vif et percutant, exprimant le désoeuvrement d’une jeunesse où la paupérisation et la violence contraignent à des voies détournées pour celles qui veulent tout, tout de suite.

    Il n’est pas évident de rentrer dans l’histoire dès les premières pages vu l’emploi de ce nouveau parler « jeune » des cités (pourtant, je n’ai que 35 ans; ) avec le verlan et le langage SMS que l’auteure, Caroline de Mulder pousse très loin. Mais une fois cette difficulté passée (qui risque pourtant de déplaire à plus d’un lecteur), c’est un roman très actuel qui sonne juste et que j’ai dévoré.

    Il s’agissait de ma première découverte de cette auteure belge de 45 ans qui compte déjà 5 livres à son actif. Elle est lauréate du Prix Victor-Rossel 2010 pour Ego Tango et du Prix Auguste-Michot 2018 pour Calcaire.