Astrid Houssin signe ce récit sur la douleur et la reconstruction
À partir de la photographie d'un meurtre, Virginie Thirion s'interroge sur ce que la photographie peut nous faire comprendre de la violence du monde. Elle interroge notre conscience («Sommes-nous voyeurs ou témoins», «Sommes-nous passifs ou prêts à exploser face à l'horreur ?»). Ce texte littéraire fait penser à la puissance de Susan Sontag qui se demandait que faire face à la souffrance du monde.
Lisons-la :
«Si j'avais assisté à cet événement en direct, ce n'est certainement pas ce petit espace entre l'épaule et le sol que mon oeil aurait gardé de la scène. La photographie permet de voir, de s'appesantir sur quelque chose que l'on n'aurait pas eu le temps de voir en direct. Et tout en sachant que cela est impossible, je ne peux m'empêcher d'attendre la fin de la chute. La fixité de ce déséquilibre manifeste a quelque chose d'insupportable. Suspension contre nature. Fascination morbide. Suspension dans l'espace, suspension entre la vie et la mort. Étrange prodige photographique : cet homme est à la fois vivant et mort. Je ne peux me défaire du désir de voir ce corps toucher enfin le sol, du désir de voir cet intervalle diminuer peu à peu, de voir ces quinze centimètres n'en être plus que 10, que 9, que 4, et que la fin du supplicié soit la fin du supplice».
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