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L'origine des larmes

Couverture du livre « L'origine des larmes » de Jean-Paul Dubois aux éditions Editions De L'olivier
Résumé:

Paul a commis l'irréparable : il a tué son père. Seulement voilà : quand il s'est décidé à passer à l'acte, Thomas Lanski était déjà mort... de mort naturelle. Il ne faudra rien de moins qu'une obligation de soins pendant un an pour démêler les circonstances qui ont conduit Paul à ce parricide... Voir plus

Paul a commis l'irréparable : il a tué son père. Seulement voilà : quand il s'est décidé à passer à l'acte, Thomas Lanski était déjà mort... de mort naturelle. Il ne faudra rien de moins qu'une obligation de soins pendant un an pour démêler les circonstances qui ont conduit Paul à ce parricide dont il n'est pas vraiment l'auteur.

L'Origine des larmes est le récit que Paul confie à son psychiatre : l'histoire d'un homme blessé, qui voue une haine obsessionnelle à son géniteur coupable à ses yeux d'avoir fait souffrir sa femme et son fils tout au long de leur vie. L'apprentissage de la vengeance, en quelque sorte.

Mélange d'humour et de mélancolie, ce roman peut se lire comme une comédie noire ou un drame burlesque. Ou les deux à la fois.

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Avis (4)

  • Quel prologue, époustouflant, qui place le lecteur dans l'intensité d'une tragédie antique ! Paul Sorensen, la cinquantaine, vient d'être arrêté pour avoir abattu son père post-mortem dans une morgue. Il présente son destin comme marqué par la mort, né d'une mère décédée en couches en même temps...
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    Quel prologue, époustouflant, qui place le lecteur dans l'intensité d'une tragédie antique ! Paul Sorensen, la cinquantaine, vient d'être arrêté pour avoir abattu son père post-mortem dans une morgue. Il présente son destin comme marqué par la mort, né d'une mère décédée en couches en même temps que son frère jumeau.

    « Chacun de mes anniversaires commémore la mort de Marta et de mon frère. L'origine des larmes se trouve là, au fond du ventre de ma mère. Ce ventre dont je n'aurais jamais dû sortir. Ce ventre qui aurait dû m'ensevelir au côté de mon frère. Ce ventre qui m'a expulsé au dernier moment vers la vie sans que je ne demande rien ni que je sache pourquoi. de l'air est entré dans mes poumons pour la première fois au moment même où leurs coeurs ont arrêté de battre. »

    Suite à son procès pour atteinte à l'intégrité d'un cadavre, il écope d'une année de prison avec sursis et d'une prise en charge médico-psychologique obligatoire pendant un an : une séance par mois, un sujet par mois.

    Au départ, l'intérêt est happé par le personnage du père. On attend avec impatience le réquisitoire de Paul pour comprendre son geste inouï. Jean-Paul Dubois évacue rapidement cette attente car on comprend vite que le père incarne toute la sauvagerie et la violence du monde. Ce personnage est tellement outré, monstrueux dans ses actes et paroles, totalement impardonnable, qu'il en devient presque irréel, mais sa présence hante tout le récit par l'impact qu'il a eu sur la vie Paul.

    La construction narrative est faussement simple. Douze chapitres, un par mois, un par séance, un sujet par séance, pour savoir si Paul va réussir à se décharger du fardeau de son existence et sortir du trou noir de la haine que lui inspire son père. Ce qui a aimanté ma lecture, c'est le portrait désespéré de Paul, un homme profondément seul, raconté par moultes digressions brillantes qui dessinent la réalité d'une vie fracassée et inconsolée ( « cet homme est entré dans ma tête, il y vit en ne laissant que désordre derrière lui. Il entre, sort, fait ce qu'il veut, n'importe quand, n'importe où. Même quand il n'était pas là, on l'avait en nous, comme une amibe, un parasite mental. »

    La maitrise narrative de cette introspection labyrinthique est admirable, des détails inattendus venant faire écho à d'autres, de façon encore plus inattendue, autant de contre-poisons au venin paternel : le peintre coréen Kim Tschang-yeul, l'ancien secrétaire général de Nations Unies Dag Hammarskjöld, le moine néerlandais Thomas a Kempis entre autres. En filigrane, une réflexion bouleversante sur la mémoire se déploie, sur les mécanismes des souvenirs et de la perte. On n'échappe pas à sa mémoire.

    C'est sans doute le roman le plus sombre de Jean-Paul Dubois, baigné dans une pluie perpétuelle quasi dystopique ( nous sommes en 2031 ) et pourtant, il y a bien une juste dose d'humanité qui vient, malgré tout, éclairer le noir de l'ensemble, accompagnée d'une tendresse parfois teintée de burlesque : le logiciel d'I.A. avec lequel discute Paul, si civilisé et courtois ; l'amour d'une mère adoptive ( inoubliable scène des jouets pris en photo ) ; la relation avec le génial psychiatre ( il souffre d'une maladie de l'oeil provocant un larmoiement continu qui l'oblige à sortir de son cabinet pour se mettre du collyre, de peur que ses patients pensent qu'il pleure à cause de ce qu'ils lui racontent ) et ses compagnons chiens.

    « Wats avait la particularité, quand il était sec, d'avoir un pelage qui gonflait et magnifiait une stature. En revanche, une fois mouillée, sa toison s'effilochait misérablement, lui donnant l'apparence d'un gros rat. Il avait aussi de tout petits os, des pattes effilées comme des talons hauts et un museau aussi pointu qu'un pic à glace. J'avais donc deux chiens. L'un, sec, une vraie merveille. L'autre, mouillé, une totale affliction. Wats avait aussi cet étrange besoin, en voiture, de mettre son museau à la portière et de demeurer dans cette position, sans broncher, même au-delà des cent trente kilomètres-heures réglementaires. le vent plaquant les poils sur son museau déformait ses babines, lui donnant un visage effrayant, à tel point que j'avais honte de doubler un véhicule. »

    Dubois est un des rares auteurs français à savoir manier avec autant d'élégance et d'intelligence tragédie et comédie. Il compose ici un roman d'une noirceur drolatique qui émeut autant qu'il désole.

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  • Un roman déroutant. L'eau est partout, la pluie incessante en 2030 à Toulouse, les inondations, les intempéries sous un ciel chargé et gris .
    Une volonté de tuer le père soi même pour tout effacer, cette violence, ces humiliations, tuer le père pour tout oublier et ne plus avoir trace de sa...
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    Un roman déroutant. L'eau est partout, la pluie incessante en 2030 à Toulouse, les inondations, les intempéries sous un ciel chargé et gris .
    Une volonté de tuer le père soi même pour tout effacer, cette violence, ces humiliations, tuer le père pour tout oublier et ne plus avoir trace de sa vie si indigne.
    Un roman très intéressant entre noirceur, larmes, pluie, . Une histoire tragique, mais drôle, de la folie d'un père destructeur. Comment se reconstruire après cela?Est ce que le fait de le tuer alors qu'il est déjà mort va apaiser Paul? Un roman aussi absurde que sordide où la mort et le désespoir sont présents mais l'humour n'est jamais loin dans ce personnage décalé, seul qui a pour seul ami un chien et sa compagne est l'I.A .

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  • La comédie était en noir
    Paul, ce personnage de l’auteur n’est jamais ni tout à fait le même ni tout à fait un autre, et pour nous lecteurs c’est un rendez-vous plein de charme.
    La pluie diluvienne, têtue et robuste est à l’image des larmes invisibles de Paul, celles qui coulent dans son être...
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    La comédie était en noir
    Paul, ce personnage de l’auteur n’est jamais ni tout à fait le même ni tout à fait un autre, et pour nous lecteurs c’est un rendez-vous plein de charme.
    La pluie diluvienne, têtue et robuste est à l’image des larmes invisibles de Paul, celles qui coulent dans son être depuis sa naissance.
    Paul nait, son jumeau est mort-né et leur mère meurt.
    Le père indifférent part en villégiature.
    « Dans son genre mon père est une galerie d’art conceptuel, à mi-chemin du MoMa et d’Alcatraz. »
    Paul Sorensen est donc né de l’eau et de la mort et seul à jamais.
    Rebecca l’a élevé comme une mère dès l’âge de trois mois, il apprendra dans un accès de colère de son père qu’elle n’est pas sa mère.
    Jean-Paul Dubois brosse un portrait de mère et de femme magnifique.
    Tuer le père par cet acte insensé de tirer sur un cadavre va conduire Paul à une condamnation judiciaire « d’obligation de soins » pendant un an.
    C’est dons par session mensuelle que le lecteur découvre la vie de Paul lors de ses entretiens avec le docteur Guzman.
    Paul est un homme seul, qui tous les soirs converse avec l’IA.
    Pourtant l’histoire nous montre qu’il est attentif aux autres particulièrement dans ses relations professionnelles et par ses liens avec Rebecca sa mère adoptive ; mais il n’a pas pu franchir le cap de se construire une vie.
    Il converse aussi avec le chien, mort ou vif, un joli portrait qui se dessine mais met en valeur l’intelligence animale.
    La pluie en cette année 2032, est omniprésente, métaphore du rideau qui cache mais aussi des certitudes qui se diluent autant que les apparences volent en éclat, secouées par les bourrasques de la mémoire.
    Guzman est un psy qui se heurte à un cas inédit, une énigme, il procède de façon classique en essayant de découper la vie de son patient en dossiers parfaitement étiquetés, mais ce puzzle restera inachevé.
    « Je trouve ces journées parfois totalement ridicules. Que de temps perdu à récurer le passé et la vie collée, carbonisée depuis des années au cul d’une poêle. Et pendant ce temps ma vie avance, file, et j’en suis réduit à marcher sous la pluie pour récupérer un peu d’autonomie, un brin de dignité. Je n’ai pas le loisir de tout envoyer promener. Le risque est trop grand et le bénéfice trop mince ; Au point où j’en suis, je ne dois toucher à rien, filer droit jusqu’au bout. Je ne peux pas me permettre de m’aliéner Guzman. »
    Le portrait de Guzman est souvent hilarant et son : « ici on peut tout dire mais on ne peut pas tout faire » résonne comme un acte d’autorité d’un père qui ne veut pas perdre la face.
    Ce qui nous est révélé par ces séances nous entraîne dans un histoire qui nous donne un vertige aussi tenace que nauséeux.
    Paul nomme son géniteur par son patronyme :Lanski.
    Lui qui dit qu’un homme se construit par le regard de l’enfant et son observation des gestes des parents ce qu’il nomme « l’amour par capillarité » comment aurait-il pu se construire ?
    « La solitude me pousse à reconsidérer mon comportement en permanence. C’est inévitable. Tenir simplement debout, droit, se sentir stable. En ce moment, c’est mon ambition première. Je crois n’avoir jamais durablement ressenti cette sensation. Toute mon histoire repose sur un déséquilibre permanent. »
    La tension est extrême jusqu’au final, avec l’acuité de ce regard particulier qui est la marque de Jean-Paul Dubois et cette ironie mordante pour dire un monde en déliquescence qui n’a pas attendu les changements climatiques ni l’IA ni les virus pour faire voler en éclats ses valeurs.
    Cette autopsie de l’âme de l’enfant Paul, dont la naissance a été célébrée par un cortège funèbre, ne serait-elle pas l’autopsie de notre monde actuel ?
    Lanski, le géniteur toxique, dégénéré et pervers ne serait-il pas le Monde moderne avec son cynisme en étendard ?
    Et si Paul était la parabole d’un enseignement ? Celle de l’action.
    Un livre maîtrisé de bout en bout où le burlesque donne la main au tragique.
    Jean-Paul Dubois est un écrivain que j’aime lire, j’attends ses parutions avec impatience.
    L’origine des larmes m’a époustouflée, la construction sans faille, le style et le ton qui lui sied à merveille.
    J’ai adoré cette lecture et en la terminant, j’ai eu cette sensation si bien décrite par Verlaine : « Il pleure dans mon cœur. Comme il pleut sur la ville. »
    ©Chantal Lafon
    https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2024/04/17/lorigine-des-larmes/

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  • Tuer un père mort. Il n’y a que Jean-Paul Dubois pour envisager pareille intrigue. Son dernier roman commence avec ce parricide défectueux : Paul Sorensen, la cinquantaine, tire deux balles de revolver dans le corps de son géniteur décédé depuis deux semaines.

    Sous une pluie “robuste et...
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    Tuer un père mort. Il n’y a que Jean-Paul Dubois pour envisager pareille intrigue. Son dernier roman commence avec ce parricide défectueux : Paul Sorensen, la cinquantaine, tire deux balles de revolver dans le corps de son géniteur décédé depuis deux semaines.

    Sous une pluie “robuste et têtue” qui s’abat sur une France légèrement dystopique, Paul se livre à la police, déjà comme las à l’idée de la confession qui l’attend. “J’aimerais tant pouvoir établir une chronologie claire et limpide de cette histoire. Recenser méthodiquement les malveillances paternelles.” À tous, l’inspecteur, l’avocat, le procureur, le psychiatre, il essaie d’expliquer ce geste post mortem envers “cet homme qui m’a fabriqué comme on crache un noyau.”

    Mais il faut du temps et de la nuance pour “rouvrir les plaies de toute une vie, gratter la tristesse, les souffrances, se confronter à nouveau à ces effarements d’enfant, cette stupeur éprouvée face au visage d’un père capable de tordre les os comme les âmes.”

    Alors Paul plonge dans ses souvenirs détrempés, il brasse la honte et la haine, il remonte au désastre originel. Le décès de sa mère et de son frère jumeau à sa naissance. “Deux morts contre la vie. Je suis le fruit de cette rançon. Je sais ce que je dis. Je connais le royaume des larmes.”

    Chaque page offre de longs monologues au malheur résigné et grinçant, interrompu çà et là par quelques remarques vaines de personnages secondaires, figurants pathétiques tournés en dérision. L’un est comparé à “un jeune cocker rentrant de promenade, tout fier d’avoir pris l’averse”, l’autre souffre d’une anomalie lacrymale…

    Que retenir d’une existence née dans la mort, fracassée par un père désaxé, noyée dans la pluie et les larmes, vécue qui plus est à la tête d’une entreprise qui fabrique des housses mortuaires ? Cernée par les eaux et par la mort, la vie est-elle encore valable ?

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