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Du côté sauvage

Couverture du livre « Du côté sauvage » de Tiffany Mcdaniel aux éditions Gallmeister
Résumé:

Arc et Daffy sont jumelles, nées à une minute d'intervalle. Unies par leurs indomptables chevelures rousses, les récits de leur grand-mère et une imagination fertile, les deux soeurs sont inséparables. Ensemble, elles fuient un quotidien sordide en plongeant dans un monde imaginaire. Pourtant,... Voir plus

Arc et Daffy sont jumelles, nées à une minute d'intervalle. Unies par leurs indomptables chevelures rousses, les récits de leur grand-mère et une imagination fertile, les deux soeurs sont inséparables. Ensemble, elles fuient un quotidien sordide en plongeant dans un monde imaginaire. Pourtant, irrémédiablement engluées dans les ténèbres familiales, elles ne peuvent échapper aux fantômes qui les hantent. Devenue adulte, Arc lutte tou- jours avec ses souvenirs lorsqu'on découvre le corps d'une femme noyée dans la rivière.
Bientôt, les cadavres s'accumulent. Alors que ses amies disparaissent autour d'elle, Arc se rend peu à peu à l'évidence : tenir la promesse qu'elle a faite à Daffy de les protéger des puissants remous du "côté sauvage" de l'existence s'avère impossible.
Le nouveau chef-d'oeuvre élégiaque de Tiffany McDaniel est une ode à toutes celles qui ont disparu ou perdu un être cher, qui transcende par une plume virtuose et lumineuse.

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Avis (3)

  • À Chillicothe, personne ne tient ses promesses. Pas même la rivière. “Elle les avait regardées devenir des femmes dans cette ville d’hommes et d’usines.” Et puis elle les a regardées mourir. Elle a porté leurs corps gonflés de flotte, elle a rempli leurs bouches de sa boue, elle a accroché ses...
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    À Chillicothe, personne ne tient ses promesses. Pas même la rivière. “Elle les avait regardées devenir des femmes dans cette ville d’hommes et d’usines.” Et puis elle les a regardées mourir. Elle a porté leurs corps gonflés de flotte, elle a rempli leurs bouches de sa boue, elle a accroché ses brindilles dans leurs cheveux, elle a chahuté leurs os entre ses rochers. Mais ce n’est pas la rivière qui les a dénudées. Ce n’est pas l’eau qui a fracassé leurs mâchoires, qui a tranché leurs gorges.

    Elles avaient des rêves, avant ça. Elles étaient les “Reines de Chillicothe”, ces jeunes filles, parmi lesquelles Arc et Daffy. Des jumelles, chacune un œil vert, un œil bleu. “La moitié de la même pomme pourrie.” Elles avaient une grand-mère qui leur tricotait des histoires de sorcières et des couvertures avec un beau côté et un côté sauvage - celui des fils et des nœuds. Un père qui leur racontait que la poussière étouffante de l’usine venait des chevaux qui galopaient sous la terre. Une mère qui clouait les vêtements de son mari mort au-dessus des fenêtres pour habiller le vent - ou pour faire croire qu’il y avait encore un homme à la maison. Une tante qui rafistolait les fissures de son reflet en mettant du ruban adhésif transparent sur le miroir. Des amies qui voyageaient parmi les étoiles grâce à un rouleau de papier toilette devenu télescope. Grâce à la drogue aussi, cette fausse alliée qui troue les vêtements et vole les rêves.

    Elles se sont accrochées de toutes leurs forces à ces histoires, Arc et Daffy, malgré leurs matelas pleins de fourmis et leurs dessins à même le sol. Malgré la rivière qui ondule, menaçante, à chaque fin de chapitre, et malgré les araignées qui rampent dans les chambres des petites filles. Et lorsque leur réalité était trop moche, il leur suffisait de se raconter des histoires et de retourner la couverture du bon côté.

    Comme Arc et Daffy, le lecteur se laisse attraper lui aussi par la puissance d’évocation de ces récits, comme venus d’une langue oubliée. L’écriture de Tiffany McDaniel est à la fois jeune et ancienne. C’est une écriture qui se souvient et qui déterre, pleine d’une sagesse qui colle aux semelles comme de la boue.

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  • Sur les « granny squares » que crochète Mamie Milkweed, il y a un côté beau, régulier et chatoyant, et un côté sauvage avec des fils qui pendouillent, un peu en désordre. Et, quand le côté sauvage devient insupportable, il faut rentrer les fils avec une aiguille pour transformer le côté sauvage...
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    Sur les « granny squares » que crochète Mamie Milkweed, il y a un côté beau, régulier et chatoyant, et un côté sauvage avec des fils qui pendouillent, un peu en désordre. Et, quand le côté sauvage devient insupportable, il faut rentrer les fils avec une aiguille pour transformer le côté sauvage et côté beau.
    Une leçon que s’efforceront d’appliquer Arc et Daffy, ses petites filles, chaque fois que leur vie sera trop dure, trop violente ou trop insoutenable. Et pour ces deux gamines à la chevelure flamboyante et aux billes de sorcières, ce n’est rien de dire que leur vie coule du côté sauvage. Une vie où les pères meurent sans tenir leur promesse, où les mères ne sont plus que l’ombre d’elles mêmes, ou les araignées dévorent les petites filles, où les trèfles ne portent pas chance et où les seules couronnes qu’elles portent sont vénéneuses ou mortifères, où certains hommes collectionnent des larmes et d’autres congèlent des serpents, où la rivière charrie de la boue et des cadavres de femmes.
    Alors dans cette noirceur, dans cette désespérance, ces deux enfants inséparables, s’efforceront de mettre de la poésie et de l’imaginaire pour retrouver le côté beau.
    .

    Ce roman est absolument déchirant. Certains me l'ont demandé, bien plus dur que Betty, car ici nulle clarté. C'est crade, c'est glauque, c'est violent et certaines scènes sont même difficilement soutenables. Elle est terrible la vie de ces gamines, mais on s'attache à elles, et on souffre avec elles.  Tiffany Mac Daniel s’est inspirée d’un fait divers réel puisque qu’à Chilicotte, il y’a une dizaine d’années, six femmes furent tuees et leurs crimes jamais élucidés. Elle a écrit pour leur rendre la part d’humanité que les terribles conditions de leur décès les ont dépouillées. Et nous dire que ces femmes étaient des filles, des sœurs, des amies et des mères, dans une chaîne de sororité qui nous lient à elles. Constat terrible d'une société hyper machiste, où les femmes sont broyées, où les plus fragiles sont délaissés, où le déterminisme social ne laisse place à aucun espoir.

    C'est un roman dur, et terriblement noir, mais pourtant il est beau. Tragiquement beau et presque envoutant, tant la plume de l'auteur, chargée de poésie et d'inventivité dépose une aura lumineuse sur ces terribles destinées. On le lit le coeur serré, et pourtant on est ébloui par la force de ces gamines. Elles resteront longtemps dans ma mémoire, pas loin de Betty, j’en suis sûre, au bord de cette rivière, personnage à part entière, aussi apaisante qu’effrayante, source de renouveau et de menace à la fois.

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  • Pour moi, une parution de Tiffany McDaniel est désormais un rendez-vous à ne pas manquer. Une fois encore, son récit est fort, percutant, singulier. Du côté sauvage est le genre de livre que vous n’oubliez pas et ce, même longtemps après l’avoir lu.

    Ce roman est en quelque sorte un hommage...
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    Pour moi, une parution de Tiffany McDaniel est désormais un rendez-vous à ne pas manquer. Une fois encore, son récit est fort, percutant, singulier. Du côté sauvage est le genre de livre que vous n’oubliez pas et ce, même longtemps après l’avoir lu.

    Ce roman est en quelque sorte un hommage aux six disparues de Chillicothe, Ohio. C’est en tout cas une poésie noire à destination de toutes les « laissées-pour-compte », ces femmes qui ne sont plus qu’une ombre aux yeux de tous, celles dont on ne se souvient pas du nom, celles dont on ne se soucie guère, les laissant dériver à la merci des hommes-araignées qui les encerclent, les emprisonnent et les malmènent à l’aide de leurs huit pattes noires comme la mort.

    Ces hommes, Arc, la narratrice, les connaît depuis son enfance – tout comme Daffy sa sœur jumelle -, lorsqu’ils laissaient leurs traces sur les corps de leur mère et de leur tante. Désormais, elle les côtoie de bien trop près elle aussi, tout comme l’enfer qui coule dans leurs veines à toutes. Un avenir tout tracé, dirait-on.

    Pour survivre à la noirceur de leurs jours et de leurs nuits, Arc, Daffy et leurs amies se créent un monde où les cailloux sont des pierres précieuses, où la carcasse d’une voiture se révèle être une machine à remonter le temps, où les fumées s’échappant de la papeterie sont issues du galop de chevaux hennissant de toute leur puissance ; un univers dans lequel elles sont les reines de Chillicothe et portent des couronnes qui leur font oublier, pour un temps, leur quotidien.

    Mais lorsqu’un premier corps est repêché dans la rivière, puis un deuxième, puis un troisième, et un quatrième, la réalité se rappelle à elles. Ces morts sont systématiquement des femmes, des amies, parfois des mères, et pourtant elles tombent dans l’oubli aussi rapidement qu’une pierre coulant au fond de l’eau.

    De temps à autre surgit l’espoir de fuir cette vie qu’elles savent foireuse mais est-il si facile d’abandonner ce qui vous berce d’illusions et qui vous tiraille les chairs lorsque vous vous en éloignez ne serait-ce qu’un peu ?

    Ce livre est un cri sourd qui ne cesse de bourdonner à vos oreilles pour que vous ne vous désintéressiez pas, vous aussi, de ces âmes en perdition qui ne l’ont pas toujours été. C’est un récit dont l’incroyable narration est truffée d’imaginaire et de poésie. Il est empli du clair de la lune et de la profondeur des ténèbres.
    Il aurait pu être légèrement plus court, de mon propre avis, (il contient plus de 700 pages) mais jamais il ne laisse indifférent.

    Tout comme son précédent roman, L’été où tout a fondu, je vous le conseille pour sa singularité, son ardeur, sa profondeur et l’impact qu’il laisse derrière lui.
    Il me reste encore Betty à découvrir, et je m’en délecte d’avance.

    Sur mon blog : https://ducalmelucette.wordpress.com/2024/03/28/lecture-du-cote-sauvage-tiffany-mcdaniel/

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