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Un petit joyau littéraire made in China

Yan Lianke "Un Chant céleste" traduction Sylvie Gentil (ed. Philippe Picquier)

Un petit joyau littéraire made in China

C’est décidé, on vous emmène en Chine, découvrir les enchantements de la langue de Yan Lianke, si merveilleusement traduits par Sylvie Gentil en français. Moins connu que Mo Yan, mais tout aussi promis au Nobel que son désormais célèbre prédécesseur, Yan Lianke n’attendra pas la postérité pour entrer dans le panthéon des très grands écrivains.

 

Dans Un chant céleste (ed Philippe Picquier), Yan Lianke raconte l’histoire de You Sipo, une paysanne gaie qui chante de l’opéra, jusqu’à ce qu’on lui annonce que ses quatre enfants sont des attardés mentaux. Son mari, dévasté et coupable, se suicide. Mais You Sipo n’accepte pas de porter seule le fardeau de ses enfants qu’elle appelle « les idiots », le blé à cultiver seule, sans son mari : elle en convoque sévèrement le spectre qui, bon gré mal gré, restera à ses côtés jusqu’à la fin du livre.

C’est ainsi que sous le burin des ans, cette femme gaie devient dure, déterminée, sacrifiée. A la cinquantaine, elle parvient à caser ses deux aînées, à un boiteux et un borgne. Mais la troisième veut un « gens-complet ». Elle part à la recherche d’un mari, mais trouvera mieux : une potion qui permet à ses enfants de guérir de leur maladie mentale. Il lui faudra pour cela s’acquitter d’un immense et ultime sacrifice.

 

Le devoir maternel plus fort que la vie, plus fort que la tradition et la fatalité d’une existence tracée : voici l’histoire d’une battante qui garde le front haut dans la différence, quel qu’en soit le prix, une rectitude faite femme dans un monde paysan dur, dans l’ingratitude des petites communautés. On rapproche souvent Lianke de Garcia Marquez et de Camus, pour le réalisme magique et le conte du premier, et la réflexion sur la condition humaine du second. Cette parabole du sacrifice des mères, mais aussi d’une société où l’individu n’existe nulle part ailleurs que dans le devoir est servie par un style superbe, voyez plutôt dès l’incipit :

« L’univers était parfum d’automne.

Un automne profond, dont le temps était venu. Dans les monts flottaient une odeur sucrée de maïs, si dense qu’elle prenait à la gorge ? Sur les auvents des maisons, aux pointes des herbes, et dans la chevelure de ceux qui travaillaient aux champ, partout elle accrochait son jaune, ruisselant à gouttes que veux-tu, chatoyant d’un éclat d’agate à illuminer un village ».

 

Si Yan Lianke n’est pas toujours publié dans son pays, en raison de ses textes satiriques et parfois très engagés contre le maoïsme, les scandales d’état, la bureaucratie, sa peinture du monde rural est inspirée de ses propres souvenirs. En 1978, il quitte en effet la campagne et les risques de famine qui l’habitent et entre ainsi dans l’armée. C’est bien sûr l’éditeur Philippe Picquier, spécialiste des littératures asiatiques qui publie celui qui se considère comme « le fils irrespectueux du réalisme ».

 

 

 

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