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En avril 1958, Yves Klein, connu pour ses monochromes et son attachement au bleu, présentait une exposition dans laquelle nul tableau, nulle sculpture, nul objet n'étaient visibles. Cette manifestation, bientôt nommée «exposition du vide», a fait date. Or ce titre qui n'était pas dû à l'artiste, rend son projet à peu près incompréhensible. Klein expliqua pourtant à de nombreuses reprises ses intentions. Grâce à cette «immatérialisation du tableau», il espérait «créer une ambiance, un climat pictural invisible mais présent» capable de manifester, par son rayonnement, l'essence même de la peinture : la «sensibilité picturale immatérielle». Depuis sa première tentative d'une présentation de la «sensibilité picturale invisible», en 1957, jusqu'à sa mort, survenue en 1962, à l'âge de trente-quatre ans, Yves Klein n'a jamais cessé d'approfondir et d'affiner son propos. Parallèlement, il imagina d'utiliser le corps de jeunes femmes comme «pinceaux vivants». Apposant l'empreinte de leur chair sur des supports disposés à cet effet, elles réalisèrent des peintures parfaitement visibles : des «Anthropométries». Loin de relever d'une aspiration contradictoire, ces deux modalités d'existence de son oeuvre s'appuient sur une articulation qui est au coeur du Mystère chrétien fondamental, l'Incarnation. Telle est du moins l'intuition développée dans cet essai.
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