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Germaine Greer

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    Couverture du livre « Les Garcons, Figures De L'Ephebe » de Germaine Greer aux éditions Hazan

    Claude Stas sur Les Garcons, Figures De L'Ephebe de Germaine Greer

    L’histoire de l’art nous le démontre : depuis des siècles, le corps féminin est principalement appréhendé comme un objet fortement érotisé, tandis que le corps bascule est chargé d’un héroïsme naturellement ( !) viril. Bizarrement, les nus masculins sont très, très nombreux au fil des siècles....
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    L’histoire de l’art nous le démontre : depuis des siècles, le corps féminin est principalement appréhendé comme un objet fortement érotisé, tandis que le corps bascule est chargé d’un héroïsme naturellement ( !) viril. Bizarrement, les nus masculins sont très, très nombreux au fil des siècles. Le corps du mâle est par excellence le modèle académique, le sexe montré sans aucune fausse pudeur, tandis que celui des femmes est souvent soit dissimulé, soit imberbe. Germaine Greer, une célèbre féministe australienne, s’est penchée dans cet ouvrage sur les représentations de l’adolescent, du corps masculin à une période cruciale de son évolution. Mais si, vous le savez bien, ces quelques années où le corps est teinté d’une androgynie qui en ennuie plus d’un, si bien qu’il devient le foyer idéal pour le trouble sensuel. Alors le corps devient le prétexte d’une idéalisation qui trouve ses premiers aboutissements dans le corps d’Eros ou de Ganymède. « On a supposé que les sculpteurs grecs créaient des images idéales d'adolescent parce que les Grecs affectionnaient la pédérastie. Cette idée est aussi absurde que d'affirmer que les artistes peignent des natures mortes parce qu'ils ont envie de copuler avec des coquillages ou parce qu'ils ont faim. »
    Germaine Greer met très rapidement à plat les clichés véhiculés par ce type de figure : la représentation de la beauté n’est pas nécessairement l’expression du désir sexuel (ainsi, non, Balthus n’était pas pédophile). Le sujet est donc bien plus complexe qu’il n’y paraît. Le but sera donc de mettre en évidence cette beauté masculine qui occupe une place prépondérante dans l’art occidental depuis l’Antiquité (les sculptures préhistoriques sont des femmes stéatopyges) jusque dans l’art contemporain, en passant par toutes les périodes de l’histoire de l’art, dans les œuvres de Praxitèle, Donatello, Michel-Ange, Carrache, Titien, Rubens, Canova, Flandrin, Eakins ou Bazille. La figure de l’adolescent, beauté éphémère et ambiguë, a longtemps été réprimée car considéré comme tabou, si bien que les grâces féminines ont été plus étudiées que les charmes masculins. Germaine Greer se fait un plaisir de souligner la contradiction suivante : dans la peinture classique, le nu féminin est très codifié par des critères d’idéal esthétique ; il est très rarement peint d’après un modèle vivant, d’après une femme de chair et de sang ; la référence pour la représentation du corps féminin est très souvent le corps masculin. Jusqu’au début du XIX° siècle, la société patriarcale met en évidence dans ses arts le corps masculin en avant. Par la suite, la tendance s’inverse. Et la femme devient le sujet favori des peintres, des sculpteurs, des photographes et le climax est atteint quand apparaît le sordide statut d’«objet sexuel». Donc, de tous les temps, les artistes ont créé des figures d’adolescents sans que cela ne choque quiconque, même dans la nudité la plus offerte. Il est habituel que des hommes nus évoluent parmi des femmes habillées tandis qu’une femme nu assise parmi des hommes entièrement vêtus crée le scandale. Bien sûr que Germaine Greer pense au « Déjeuner sur l’Herbe » d’Edouard Manet. Pour l’auteure, l’attirance pour le thème de l’adolescence est fortement teintée de nostalgie pour la propre jeunesse de l’artiste, et non pas de désir pour le corps souple et ferme. Quand il tourne « Kids » ou « Ken Park », Larry Clark nous montre tous ces corps nus pour exprimer leur forte sexualité, tellement désabusée, et non pas pour conforter le spectateur dans un voyeurisme morbide. Pourtant, il existe des exemples où cette opinion est bancale, si ce n’est pas caduque. Prenons le Faune Barberini, une statue grecque antique de l'époque hellénistique, représentant un satyre endormi, le sexe offert au regard. Mais peut-être est-il nécessaire, comme le fait Germaine Greer, de connaître la réception de ces œuvres par leur époque et par la nôtre, parfois dénaturées par des interprétations excessives. « l’Amour victorieux » du Caravage est un des meilleurs exemples de cette situation. Une abondante iconographie (200 images) démontre à quel point le corps adolescent a été mis en scène, un vrai thème, peut-être un peu trop dans l’air du temps. Ne nous leurrons pas : le corps masculin a envahi les magazines féminins et gays dans les kiosques, les spots publicitaires, les clips vidéos, les calendriers sportifs, créant ainsi des « sex symbols » bien inoffensifs.