Une plume vive, des héros imparfaits et une jolie critique de notre société
Perchée sur un tabouret, la narratrice se laisse porter par le brouhaha du bar de Melbourne où elle a trouvé refuge. Elle est seule, plongée dans sa lecture, et visiblement étrangère. Dans les bribes de conversation qui l'atteignent, il est question d'une jeune fille violée et assassinée. Comme pour couper court à l'inquiétude ambiante, ou la conjurer, sa voisine, une animatrice de radio nommée Bernice, interrompt la lectrice et, sans plus de préliminaires, évoque son désir d'enfant. La scène donne le ton de ce roman du bout du monde, où la spontanéité des êtres et la chaleur des rencontres réparent les blessures.
Autour de la narratrice, aide-jardinier chez une paysagiste taciturne, va graviter un quatuor de femmes : sa collègue Mitali, qui se bat contre un deuil aveugle ; Sarah, la propriétaire du bar, sculptrice à ses heures ; sa fille Mary, dont on finira par comprendre ce qu'elle dissimule obstinément sous sa burqa bleue ; la lumineuse Bernice, que la vie va combler.
L'écriture dense, libre et inventive de Catherine de Saint Phalle fait merveille pour donner corps au mystère de ces existences, dans une nature majestueuse. On pense, en la lisant, aux images et aux personnages étranges et si attachants de Jane Campion.
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