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Revue poétique ; la pensée romanesque du langage

Couverture du livre « Revue poétique ; la pensée romanesque du langage » de Philippe Dufour aux éditions Seuil
  • Date de parution :
  • Editeur : Seuil
  • EAN : 9782020622578
  • Série : (-)
  • Support : Papier
Résumé:

L'objet de ce livre est la représentation de la parole dans le roman français du XIXe siècle, alors que le rapport à la langue a été bouleversé : depuis la Révolution française, plus moyen de croire comme l'homme classique
à une langue fixée, naturellement claire et spirituelle. Au sentiment... Voir plus

L'objet de ce livre est la représentation de la parole dans le roman français du XIXe siècle, alors que le rapport à la langue a été bouleversé : depuis la Révolution française, plus moyen de croire comme l'homme classique
à une langue fixée, naturellement claire et spirituelle. Au sentiment d'unité de la langue succède désormais l'évidence d'une fragmentation: des langages s'affrontent, se posant chacun en détenteur de la vérité. Le romancier représente cette mêlée des langages, repérant ceux qui dominent, ceux qui disparaissent, ceux qui émergent, ceux qui sont refoulés.
Il en résulte une nouvelle poétique du dialogue que la première partie de l'ouvrage s'attache à décrire. Le dialogue n'est plus utilisé seulement à des fins dramatiques : il devient un lieu privilégié d'observation du langage, de son fonctionnement ou de ses dysfonctionnements. Les répliques s'espacent au lieu de s'enchaîner comme dans le dialogue théâtral, pour laisser place à des commentaires du narrateur écoutant le non-dit des paroles. Les styles indirect et indirect libre sont des techniques désormais privilégiées pour mettre à distance la parole vive, pour la filtrer. Le narrateur décrit également la voix, les gestes, les regards, tous les signes non-verbaux qui interviennent dans les échanges : le dialogue donne ainsi à lire une conception élargie de la
communication. C'est un des enjeux de cette première partie que de montrer comment une forme esthétique (la facture du dialogue) est porteuse d'une pensée du langage (la communication ne se réduit pas aux paroles
prononcées).
Grâce à ces mises en situation des discours, les romanciers constituent en quelque sorte au fil de l'intrigue une anthologie des langages de leur époque. Ils sont les historiens de la parole. La deuxième partie du livre essaie
de cerner les grandes péripéties de cette histoire : le temps des rivalités (la langue éclatée), la recherche d'une langue du consensus, la naissance d'une communication de masse avec la presse et la voix de l'opinion,
mais aussi la perception d'une voix discordante, celle des laissés-pour-compte de la modernité, ce parler populaire qui à l'âge classique était seulement objet de comique et qui dans la seconde moitié du XIXe siècle surtout est pris au sérieux. Si l'exemple de Balzac est privilégié dans cette deuxième partie (La Comédie humaine , par son ampleur et le demi-siècle qu'elle raconte, suit les langages dans leur évolution), cette étude convoque aussi de nombreux autres romanciers qui complètent cette histoire ou la continuent (ainsi par
exemple Zola dans ses efforts, de L'Assommoir à Germinal , pour appréhender la parole populaire): le roman philologique se révèle pour ainsi dire une entreprise collective, un roman-feuilleton qui traverse le siècle, en
bâtissant une sociologie des langages.
La troisième partie considère sucessivement trois auteurs, Stendhal, Flaubert et Hugo, et même plus précisément trois oeuvres : La Chartreuse de Parme, Madame Bovary et Quatrevingt-Treize. Après l'approche synthétique des deux premières parties, c'est le moyen de restituer la singularité des imaginaires : celui de Stendhal traquant avec son ironie l'abus des mots ; celui de Flaubert, le tourmenté du langage qui n'arrive même plus à croire à la vérité du discours amoureux ; celui de Hugo, qui ressuscite dans son style même la
voix éloquente des grands tribuns de la Révolution française.
En quelques mots Au XIXe siècle naît un "roman philologique" qui cherche à penser le langage dans l'Histoire.
De façon générale, cet ouvrage privilégie les grands auteurs : Balzac, Stendhal, Hugo, Flaubert, Zola, et encore Proust comme ouverture sur le XXe siècle. Ce sont eux les maîtres du soupçon, habiles à manifester les
langages dans leurs mensonges ou leur relativité. En contrepoint, le livre examine aussi d'autres discours sur la langue : des philologues patentés, des rhétoriciens, des philosophes... Cette confrontation fait ressortir
l'originalité de la pensée dans la fiction, de cette science romanesque du langage qui, sans concept, à travers des situations narratives, nous apprend ce que parler veut dire.

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