Une plume vive, des héros imparfaits et une jolie critique de notre société
Solal Israel aborde la photographie avec un mélange d'exigence, de rigueur, et de liberté inventive déconcertant. Plusieurs séries, entamées pour la plupart dès ses études, ont pris forme au fil du temps au point de pouvoir s'entrecroiser à présent: récit autobiographique d'une rupture, chronique émouvante de la disparition de sa grand-mère, détournement de photos trouvées qui se transforme en appropriation fantasmatique de l'identité d'une personne ayant quitté son lieu de vie... mais aussi bien un sens aigu, à la fois classique et ludique, du paysage, en tant que genre extrêmement codé, ou du portrait, plein de gravité.
Des personnages réapparaissent, des lieux se transforment, des histoires se relisent, des images se contredisent ou se répondent: le va-et-vient est permanent, le questionnement constant, et les manipulations de Solal Israel ne tiennent jamais le réel, et moins encore la vérité, et pas même les mots qui tentent de les cerner, pour acquis et immuables. La photographie elle-même est la matière qui sans cesse l'accompagne, et que sans cesse il triture.
[Never] Let Me Go cherche à présent à nouer les différents fils de ces recherches, de ces rencontres, de ces expériences, de ces voyages, en une seule trame. L'ensemble tente de poser sur l'existence un regard plus serein. Et si la tristesse, l'angoisse demeurent présentes, elles sont acceptées et viennent sublimer la profondeur et la poésie du visible, dans ce jeune mais déjà sidérant parcours du regard, entre fraîcheur et maturité.
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