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La blessure ; l'amour, la folie, une guerre

Couverture du livre « La blessure ; l'amour, la folie, une guerre » de Jean-Baptiste Naudet aux éditions L'iconoclaste
Résumé:

Le fiancé de Danielle est mort en Algérie. Hantée par ses lettres, elle sombre dans la folie. Son fils, reporter de guerre, se débat avec cet héritage.
Pour littéralement sauver sa propre peau, Jean-Baptiste exhume l'histoire de Robert, le chasseur alpin sacrifié. En Savoie, il retrouve sa... Voir plus

Le fiancé de Danielle est mort en Algérie. Hantée par ses lettres, elle sombre dans la folie. Son fils, reporter de guerre, se débat avec cet héritage.
Pour littéralement sauver sa propre peau, Jean-Baptiste exhume l'histoire de Robert, le chasseur alpin sacrifié. En Savoie, il retrouve sa tombe, rencontre son frère. Puis il se tourne vers son propre père, autrefois meilleur ami de Robert.
Celui-ci lui remet les lettres de Danielle et de son fiancé qui restituent un semestre d'amour, de vie au combat, d'attente à Paris et de rage politique.
De ces trois vies, il tresse une même blessure.

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Articles (1)

Avis (21)

  • La blessure de Jean-Baptiste Naudet
    Un visage à peine sorti de l’enfance, un chapeau de brousse, dont les rebords sont relevés, par une lanière plate, une chemisette col ouvert sur un médaillon, à son épaule en bandoulière la crosse d’une arme automatique, que j’identifie comme un pistolet...
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    La blessure de Jean-Baptiste Naudet
    Un visage à peine sorti de l’enfance, un chapeau de brousse, dont les rebords sont relevés, par une lanière plate, une chemisette col ouvert sur un médaillon, à son épaule en bandoulière la crosse d’une arme automatique, que j’identifie comme un pistolet mitrailleur MAT 49. C’est ainsi que je vois sur l’étagère de notre petite bibliothèque de Campagne ce livre en couleur gris et orange : La Blessure de Jean-Baptiste Naudet. Nous sommes en 1960 le 9 juin il est 9 heures. Le sergent Robert Sipière du 7e bataillon de chasseurs alpins, patrouille dans le djebel de Djurdjura en Grande Kabylie sur le sol Algérien. « Au détour d’un rocher, Sipière entend du bruit dans les broussailles. IL croit avoir vu bouger les branchages devant lui. Le poison de l’adrénaline lui serre brutalement le cœur. Son doigt se pose sur la détente du PM. Trop tard, Sipière se mange en plein bide un coup de fusil de chasse du fellagha embusqué au milieu des fourrés. La décharge de chevrotine lui déchire le ventre, il pousse un cri sec. Renversé comme un fétu de paille, il est au tapis. Ça pisse sérieux du rouge, dehors et dedans, aussi. Est-ce parce qu’il s’est blessé la veille à la main qu’il n’a pas tiré assez vite ? Sa MAT49 arme de point des voltigeurs a craché à coup secs à vitesse supersonique à près de six-cent coups la minutes, un chargeur entier de 32 balles de 9mm parabellum. Un massacre à cette distance. Le jeune fell, âgé de 15 ou 16 ans à peine est presque coupé en deux. Il tient ses tripes sanguinolentes dans ses mains. Son visage est tordu par la douleur, mais lui non plus ne crie pas. » A la radio le capitaine demande au QG un hélico pour une évacuation immédiate. Il est 12h25, le souffle des pales, le bourdon d’acier décolle ? Le Sergent Robert Sipière sourit comme un enfant malade, il frisonne. « Nature berce-le chaudement, il a froid. Il est 12h30 le chasseur Alpin expire dans les airs. Adieu Robert, Adieu Mon vieux Robert. » C’est quelques phrases, je les écrits alors que brusquement mes yeux se mouillent et me revient en tête le poème le dormeur du Val, appris il y a bien longtemps en classe primaire. A Paris, la fiancée de Robert est dévastée. Danièle gardera toute sa vie ces lettres, que vous lirez vous aussi, avant qu’elle ne sombre dans la folie. Dès années plus tard, son fils Jean-Baptiste devient un reporter de guerre. Pourquoi ? Alors qu’il voit jour après jour sa mère décliner, affronte-t-il l’horreur des conflits dit actuels. A tant fixer la mort dans sa pellicule, la folie le guette à son tour. L’on dit maintenant qu’il souffrirait d’un syndrome post-traumatique. C’est en découvrant la correspondance de sa mère Danièle et de ce jeune sergent Robert Sipière, son premier fiancé, mobilisé en Algérie, qu’il comprend, qu’il est prisonnier d’un destin qui n’est pas le sien. Dans ce roman trois vies seront sacrifiées. Trois vies qui ne sont qu’une même blessure. Ce récit va beaucoup plus loin qu’une belle romance entre un sergent et sa fiancée. C’est aussi une mise à nu de la guerre d’Algérie, avec tout son cortège d’horreur commis de part et d’autre. Les descriptions que vous lirez sont insoutenables. C’est aussi une réflexion sur ces soldats français, envoyés dans leur jeunesse, sur un territoire qu’il ne connaissait pas quasiment la fleur au fusil. Qui vont devoir se battre, jour et nuit dans des conditions dantesques à la demande des autorités françaises, contre d’autres jeunes qui n’avaient qu’une volonté, celle de vivre dans leur pays. Au-delà de ce conflit, Jean-Baptiste Naudet, comme correspondant de guerre, nous fait vivre de l’intérieur les guerres des Balkans, de Yougoslavie, du Rwanda, du Cambodge, avec force détail, faisant osciller le bien et le mal. La guerre d’Algérie est toujours restée en mémoire de ceux qui ont été appelés à servir. Elle reste une plaie béante pour beaucoup d’anciens combattants, très souvent mutiques sur ce qui s’est passé là-bas. De par les lettres de Danièle et de Robert, bien que censurées par les autorités militaires, avant d’être délivrées à leur destinataire, le voile se déchire sur ces troupes de l'armée Française qui ont violé, tué, massacré torturé en toute impunité. Les faits dans les rapports étant toujours édulcorés. Robert lui parle à Danièle, de l’Algérie de sa culture, de ses paysages dignes du jardin d'Eden, noyés dans le carnage du sang. Du dualisme de l’homme qui en raison des circonstances devient criminel alors qu’avant de partir il n’aurait pas fait mal à une mouche. De la dignité et l'honneur de ses hommes fiers et courageux qu’il devait combattre. Du corps de ses femmes utilisés pour le repos du guerrier. De la jeunesse, de la vie de la liberté de ce peuple avant leur arrivée. « C’est la France qui, à ce moment-là, a tout sali, a sali aussi notre nom, qui est devenue hors-la-loi, et qui est à l'origine de l'abomination perpétrée. Nous sommes inéluctablement coupables, « écrit-il. En 2005 Jean-Baptiste Naudet, achète un cahier de brouillon « supérieur sur lequel dit-il j’écris Cahier de reportage sur moi-même. » Il part alors sur les traces de Robert Sipière, le premier fiancé de sa maman, ami de Gilles son père. Les parents de Robert Sipière sont morts, un demi-frère Jean-Paul Rond est retrouvé en Haute-Savoie. Dans cette quête, afin de chasser ses démons qui l’emmène vers la folie, chemin faisant, Jean-Benoit se souvient des paroles de feu Francis Deron, correspondant à Bangkok. « Tu sais quel est le seul bon reportage ? Le seul bon reportage c’est celui dont on revient vivant. » A partir de cet instant dit-il « j’arrête mes conneries, d’accord maman, d’accord Francis et je sens que la Mort desserre son étau. » Ce roman se clôt sur une prochaine rencontre de Jean-Baptiste et de son père Gilles avec la famille du jeune fellagha qui a tué Robert et que Robert a tué. « Puisque la France ne s’excusait pas de ce qu’elle avait fait en Algérie, moi, j’irai là-bas leur présenter nos excuses » dit Jean-Baptiste. Alors mon père m’a dit : « Fils tu as raison, ta mère voulait que l’on s’excuse. Ta mère disait Algérie mon amour. Alors je viens avec toi en Kabylie. En attendant, voici ce livre comme une offrande, comme une supplique, comme un chant à la mort, à l’amour. Une étoile dans la nuit, une étoile qui n’a pas de nom mais une étoile qui ne parle que d’amour et qui ne doit pas mourir. » Robert Sipière ce n’est pas un fantôme, c’était un homme, juste un homme, un bel homme. Le premier mai sur sa tombe Jean-Baptiste Naudet, dépose un bouquet de muguet et de bleuets et pleure, pleure. Adieu Robert. Adieu mon vieux Robert Sipière. « Ces temps ont connu et connaissent encore de si horribles, de si gigantesques massacres, qu’il est presque inconvenant de vouloir sauver de l’oubli la jeune vie perdue d’un ami allé en Algérie dans une injuste guerre », conclu Gilles Naudet, père de Jean-Baptiste. Voici ce livre pour que l’on nous comprenne, pour que l’on nous excuse, pour que l’on nous pardonne. Algérie, notre amour. » La blessure de Jean-Baptiste Naudet est un roman fait de lettres, de récits de combats, de questionnements, qui j’en suis persuadé, ne va pas vous laisser indifférent. Oh Barbara, quelle connerie la guerre ! Bien à vous.

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  • Quel choc !

    Robert et Danielle s’aiment, ils vont se marier quand Robert aura terminé les neuf mois qu’il doit faire en Algérie. En attendant, ils s’écrivent. Robert parle à Danielle de la guerre, des conditions de vie qui sont les leurs, des morts dans leurs rangs, chez les autres, des...
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    Quel choc !

    Robert et Danielle s’aiment, ils vont se marier quand Robert aura terminé les neuf mois qu’il doit faire en Algérie. En attendant, ils s’écrivent. Robert parle à Danielle de la guerre, des conditions de vie qui sont les leurs, des morts dans leurs rangs, chez les autres, des exactions, des tortures, des humiliations que certains font subir aux populations locales.
    Robert ne reviendra pas et Danielle épousera très vite son ami mais ne s’en remettra jamais.
    Son fils, grand reporter de guerre prend tous les risques et adopte une attitude suicidaire jusqu’à ce qu’il tombe sur les lettres de Robert et de sa mère.
    Ce premier roman / autobiographie met en avant une guerre dont on parle si peu. En même temps, il démontre que toujours, partout, des guerres continuent avec les mêmes violences.
    Certains livres sont oubliés à peine refermés, je pense que celui-ci hantera longtemps ses lecteurs.

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  • Difficile de ne pas être bouleversé par cette lecture. Par les images de guerre tout d'abord, terribles, choquantes, plongeant le lecteur dans une réalité dérangeante, que ce soit dans l'évocation de ce que vit Robert, jeune appelé de 20 ans, quelque part en Kabylie, envoyé là comme beaucoup...
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    Difficile de ne pas être bouleversé par cette lecture. Par les images de guerre tout d'abord, terribles, choquantes, plongeant le lecteur dans une réalité dérangeante, que ce soit dans l'évocation de ce que vit Robert, jeune appelé de 20 ans, quelque part en Kabylie, envoyé là comme beaucoup d'autres pour le « maintien de l'ordre » lors des « événements » d'Afrique française du Nord, ou à travers les souvenirs de Jean-Baptiste qui a couvert en tant que reporter les conflits les plus terribles de la planète.

    Mais également en découvrant les lettres que s'écrivent Robert et sa fiancée Danielle, des missives émouvantes, poétiques, voire lyriques, pleines d'espoir et d'amour, mais aussi de peur, de doutes, Robert ayant l'intuition qu'il ne sortira pas vivant de l'enfer de cette guerre qui ne dit pas son nom, qu'il ne comprend pas, persuadé d'être un intrus qui affronte ceux qui défendent la cause la plus juste.

    Les allers-retours sont fréquents dans l'espace et le temps, le récit débutant à Fontainebleau des années après la mort du jeune Robert. Danielle, qui a cru pouvoir oublier son premier amour et refaire sa vie avec Gilles, l'ami fidèle, l'épaule sur laquelle elle a pu s'appuyer pour fonder une famille dont fait partie Jean-Baptiste, est rattrapée par son passé et sombre dans une profonde dépression. Elément à l'origine - peut-être – du choix de son fils, apprenant l'existence de ce fiancé tragiquement disparu, de parcourir de façon addictive, presque maladive, les endroits les plus dangereux pour un journaliste, l'amenant lui-même aux limites psychologiques du supportable.

    Un texte d'une grande puissance émotionnelle, dans lequel on ressent la nécessité pour l'auteur de mettre sous forme de phrases cette histoire familiale, comme une sorte de thérapie, et son besoin de dénoncer en son nom, celui de sa mère, de son père, sans oublier Robert, l'absurdité de la guerre qui les a meurtris, de la guerre en général et de la folie des hommes qui la provoque, et de rendre hommage à Danielle en citant Prévert : « Quelle connerie la guerre ! »

    Difficile de ne pas être bouleversé par cette lecture, avec comme le sentiment troublant de s'immiscer dans l'intimité de personnes dont les mots étaient uniquement destinés à l'être aimé.

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  • Pas facile d'aborder un tel sujet pour un premier roman, de plus, l'auteur nous parle de membres de sa famille. Les événements en Algérie, car on ne parlait pas de guerre à l'époque, font partie de l'histoire de certaines familles. de jeunes appelés allaient dans ce pays pour défendre la France...
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    Pas facile d'aborder un tel sujet pour un premier roman, de plus, l'auteur nous parle de membres de sa famille. Les événements en Algérie, car on ne parlait pas de guerre à l'époque, font partie de l'histoire de certaines familles. de jeunes appelés allaient dans ce pays pour défendre la France et souvent, pendant et au retour, ces hommes ne parlaient de cette drôle de guerre. Depuis, certains textes abordent ce sujet douloureux. le narrateur est le fils d'une femme qui a perdu son fiancé lors de cette période. Vieillissante, elle commence à perdre la tête et a divagué, et tente de raconter sa jeunesse et surtout cette histoire d'amour qui a été stoppée par la mort de son fiancé, appelé en Algérie ; le narrateur, devenu correspondant de guerre, a aussi des histoires de guerre à raconter. Peut-on aimer ces moments, quand on est correspondant ou même militaire ? Est-ce que la guerre et les combats peuvent être une belle chose ?? A plusieurs voix, le narrateur et ses questionnements face à la guerre et à ses parents, à travers les lettres de sa mère et de son fiancé, appelé pendant les événements. Ce texte est aussi un texte sur la mémoire, sur le souvenir. Malgré ce sujet si difficile, ce premier roman est beau et on s'attache aux destins de ces personnes et cela nous interpelle aussi de façon personnelle. Mon père a été l'un de ces appelés mais le sujet était tabou à la maison. Des pages terribles de guerre mais aussi des champs d'amour et d'amitié entre les êtres. Un texte fort, bouleversant.

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  • Un roman bouleversant sur fond de guerre d'Algérie et de guerre en général. Robert, jeune appelé de vingt ans, doit laisser sa fiancée Danielle pour faire son service militaire en Algérie, et ce qui se présentait comme quelques mois de dépaysement deviendra une plongée dans l'horreur d'une...
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    Un roman bouleversant sur fond de guerre d'Algérie et de guerre en général. Robert, jeune appelé de vingt ans, doit laisser sa fiancée Danielle pour faire son service militaire en Algérie, et ce qui se présentait comme quelques mois de dépaysement deviendra une plongée dans l'horreur d'une guerre sanglante et cruelle. Vingt ans plus tard, Jean Baptiste, le fils de Danielle, reporter de guerre, est à son tour plongé dans l'horreur entre le Kosovo, la Tchétchénie et les pays d'où il ne reviendra pas indemne. La mère et le fils frôleront la démence, et seul un retour aux sources pourra délivrer Jean Baptiste de ses obsessions morbides. Belle écriture, ce roman épistolaire se lit d'une seule traite, et cette plongée dans l'horreur ne laissera pas le lecteur indifférent.

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  • Alors qu'ils sont fiancés depuis peu, prêts à se marier, Robert et Danielle sont séparés par la guerre d'Algérie. Âge d'à peine vingt ans, malgré l'optimisme et la naïveté de la jeunesse, Robert a peu d'espoir de revenir... Les deux amoureux s'échangent des lettres passionnées, des missives...
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    Alors qu'ils sont fiancés depuis peu, prêts à se marier, Robert et Danielle sont séparés par la guerre d'Algérie. Âge d'à peine vingt ans, malgré l'optimisme et la naïveté de la jeunesse, Robert a peu d'espoir de revenir... Les deux amoureux s'échangent des lettres passionnées, des missives remplies de tendresse et de douceur... Et elles dont l'oxygène De Robert, au milieu de la violence des montagnes de Kabylie. Plusieurs années après, Danielle souffre toujours de la mort De Robert et son fils Jean Baptiste vit dans l'ombre de cet amour perdu... Pour leur plus grande folie !

    C'est dans le cadre de la sélection des 68 premières fois que j'ai lu ce premier roman. Jean Baptiste Naudet nous livre ici une autobiographie crue et violente sur ce qu'il a vécu au sein de sa famille.
    Ce n'est pas une mais trois vies qui ont été brisées ce 9 juin 1960 en Algérie. Avec le sergent Robert Sipière, c'est sa fiancée qui est atteinte en plein coeur... Puis Jean Baptiste Naudet lui-même... Prisonnier de ce passé, il va revivre les folies des guerres... Et se perdre dans la violence des combats, ceux des pays dans lesquels il couvre les batailles en tant que grand reporter mais aussi dans celui qui lui demande le plus de courage : la folie de sa mère...

    Un roman qui mêle des lettres, des récits de combats, dès questionnements personnels... Un roman qui évoque les atrocités de la guerre d'Algérie et de la culpabilité de certains face à leur place au sein du conflit... Un roman fort et nécessaire..

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  • VLa blessure c’est le témoignage éprouvant de l’auteur sur sa quête de l’origine de son mal-être et de la dépression de sa mère, c’est la correspondance pleine de poésie (agrémenté de Rimbaud, Barbara, Prévert…), d’amour et d’émotions entre Danièle et Robert et c’est le récit d’une guerre pleine...
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    VLa blessure c’est le témoignage éprouvant de l’auteur sur sa quête de l’origine de son mal-être et de la dépression de sa mère, c’est la correspondance pleine de poésie (agrémenté de Rimbaud, Barbara, Prévert…), d’amour et d’émotions entre Danièle et Robert et c’est le récit d’une guerre pleine d’atrocités. Humain, cruel, dur, La blessure entremêle les époques et les styles (épistolaire, autobiographique, « roman » pour témoigner de manière moins formelle qu’aurait pu donner le style journalistique...). C’est riche, très bien construit (la narration permet au lecteur de souffler entre deux scènes terribles sans en tronquer toute l’horreur d’une guerre honteuse) et d’une grande puissance romanesque............................

    https://libre-r-et-associes-stephanieplaisirdelire.blog4ever.com/jean-baptiste-naudet-la-blessure

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  • L'amour, la folie, une guerre. Un tel sous-titre ne pouvait que laisser présager un livre écrit dans le sang et dans les larmes, d'une authenticité bouleversante, une aventure humaine extraordinaire, à laquelle je n'étais absolument pas préparée. Ce sont justement ces dernières qui sont les plus...
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    L'amour, la folie, une guerre. Un tel sous-titre ne pouvait que laisser présager un livre écrit dans le sang et dans les larmes, d'une authenticité bouleversante, une aventure humaine extraordinaire, à laquelle je n'étais absolument pas préparée. Ce sont justement ces dernières qui sont les plus belles, les plus vraies. Ce sont celles aussi qui vous transpercent le plus le cœur de par leur vérité et la force de leur voix.

    Au cœur meurtri, déboussolé mais aussi battant extrêmement fort et juste de ce livre, deux récits de guerres plurielles, deux destins séparés dans le temps et dans l'espace, et pourtant profondément liés par les sentiments et relations humaines, notamment par une étoile qui se prénomme Amour. La confrontation avec la Guerre est aussi le fil rouge de ce récit, qui va tisser ce dit lien d'apparence totalement inexistant mais qui est en réalité tout ce qu'il y a de plus évident et authentique, qui ne peut être nié ou brisé.

    Ces deux destins, ce sont ceux, d'un côté, de Robert Sipière, tout juste vingt ans en 1960 alors que la guerre d'Algérie bat son plein ; de l'autre, celui de Jean-Baptiste, que l'on va suivre de l'adolescence à l'âge adulte. L'un va être envoyé au djebel pour combattre les "bougnoules" (rien que d'employer ce surnom qui est devenu beaucoup trop usité à mon goût, j'ai envie de pleurer et d'enfouir ma tête dans le sable comme une autruche à tout jamais) sans avoir vraiment rien demandé, l'autre va vivre, au contraire de l'existence fulgurante du premier, une vie de tourments à regarder constamment la guerre en face, tout en étant dégoûté de lui-même d'être ainsi obnubilé par l'Horreur. Une sensation de dégoût mêlé de fascination, celle de comprendre et de saisir un sens qui n'a pas lieu d'être, à laquelle je m'identifie fortement et dans laquelle je me retrouve, indubitablement.

    Alors que ces deux hommes que rien ne prédestinait à avoir ne serait-ce qu'un point commun se retrouvent embrigadés et empêtrés dans le bourbier innommable qu'est la Guerre, alors que cette immondice les répugne au plus au point, en tout, impossible pourtant de s'en défaire. On dirait comme une seconde peau qui leur colle au corps. Ou plutôt comme une prison inviolable qui les enferment dans leurs pensées contradictoires, entre devoir de servir son pays et devoir de savoir, devoir de combattre pour que cessent tous les conflits. La guerre pour mettre fin à toutes les guerres est une idée stupide, n'est-ce pas ? Et pourtant, cette dernière se répète inlassablement, tel un disque rayé... « Comment échapper à un tel cercle vicieux ? », semble nous demander ce livre qui met toujours le doigt sur ce qui fait mal, et qui appuie bien fort sur la plaie.

    Comme le chante si bien Nino Ferrer, ils ne savent pas quoi faire. Le message véhiculé par Jean-Baptiste Naudet semble en effet en parfaite adéquation et harmonie avec la chanson bouleversante du célèbre chanteur au destin si tragique, lui aussi tué par ses démons d'une autre manière et dans d'autres circonstances (Vraiment ? La guerre gronde partout, même dans notre tête. Surtout dans notre tête à vrai dire), de Robert Sipière : "Un jour ou l'autre il faudra qu'il y ait la guerre/On le sait bien/On n'aime pas ça, mais on ne sait pas quoi faire/On dit c'est le destin". Dans le roman La Blessure, le Sud de Nino Ferrer devient la Kabylie des Algériens, ces montagnes à la géographie si particulière, si atypique de ce pays, si caractéristique de toute une nation, que les Français vont transformer en bains de sang de ceux qu'ils osent affliger du surnom insultant de "crouilles" et de bien d'autres noms d'oiseau qui ne méritent guère d'être prononcés.

    Ce récit, qui nous laisse à bout de souffle à la dernière page tournée et à l'ouvrage refermé, se construit de la façon suivante : linéarité avec l'histoire de la vie de Jean-Baptiste, en prenant pour point de départ l'année de la Révélation du secret, qui jusqu'alors représente l'Épée de Damoclès qui plane au-dessus la vie familiale, du cœur de Danielle, 1980, jusqu'au point d'arrivée qu'est 2004, l'année de l'Aveu, à soi-même et aux autres. L'année de la Tentative ultime de compréhension, d'appréhension de la Folie, avant l'Abandon et la Délivrance : l'Acceptation du Pardon.

    Le tout est éclairé par la propre expérience de guerre de Robert, reconstituée par Jean-Baptiste grâce au matériau précieux que lui a confié son père si généreux et si plein d'abnégation, Gilles, cet ami dévoué, résolument fidèle, et qui pense toujours aux autres, à leur protection, avant de penser à celle de son cœur, de ses sentiments, et de ses propres envies, que représente la correspondance que sa mère entretenait avec son ravissant fiancé à cette époque de leur prime jeunesse. Jean-Baptiste nous offre même le privilège de nous divulguer le contenu de cette correspondance qui vaut tous les trésors du monde, petit bout par petit bout.

    L'assemblage de ces trois récits en un (enfin, ceux de Robert et Danielle ne font qu'un tous les deux), loin de dérouter le lecteur de son intérêt croissant pour cette histoire familiale et qui traite avant tout d'Humanité au fil des pages, fait toute la force et la richesse de cette gigantesque Blessure béante, à cœur ouvert, qui s'épanche de larmes de sang intarissables. Elle est tel un trou abyssal, un gouffre de souffrance et de peine inconsolée sans fond qui nous emporte instantanément, qui nous fait sombrer et remonter à la surface, à court d'air et revigorés. En plus de cela, Jean-Baptiste Naudet accomplit l'exploit de canaliser ce chagrin face à la perte de la lucidité puis de la vie qui nous dévore tous, tel un David incapable de vaincre Goliath. Il réussit à condenser ces démons de mort, de cruauté et de culpabilité qui nous rongent et qui nous gangrènent l'âme, jusqu'à en laisser à peine des trous dans un gruyère périmé. De maigres trous de bon sens et d'espoir qui tentent avec leur peu de forces de s'élargir, de résister. Et ils y parviennent, tel le rayon de soleil qui perce l'épaisse obscurité. On est bien peu de choses, in fine. Cependant, Jean-Baptiste Naudet arrive à résumer la nature humaine, ses interrogations entêtantes, mais aussi sa capacité délirante à croire au Bien ou à perpétrer le Mal, avec le nombre de mots et de pages suffisant. C'est déjà bien assez de torture comme ça.

    Sous sa plume naissent ainsi des personnalités complexes, néanmoins tout ce qu'il y a de plus réel, et scindées en deux : l'Ombre et la Lumière.

    C'est ce qui émane de la plume à fois si puissante et qui va droit au vrai de Jean-Baptiste Naudet. Là où tout ne paraît être que confusion, c'est en réalité limpide comme de l'eau de roche. C'est ce qu'il m'a semblé en tout cas, c'est comme ça que je le ressens après lecture. Chaque être est tiraillé, déchiré même, entre son Docteur Jekyll, sa façade lisse, douce, simple, et son Mr Hyde, l'être en proie à ses pires démons et à sa rage la plus destructrice. La figure de la Mère, qui est censée jouer le rôle de Doctoresse, va devenir le véritable antidote du poison de la Guerre dont est contaminé son fils avant même sa naissance. Ça tombe bien, elle est pharmacienne, tout un symbole. Cette mère est sûrement la figure la plus magistrale de tout le roman. On fait la connaissance d'abord d'une Danielle léthargique, aux prises d'une lassitude extrême face à ce monde qui ne tourne plus rond depuis belle lurette, et qui ne trouve même plus les mots pour exprimer la colère qui la consume au plus profond de son être meurtri. Elle qui s'est tant battue pour élever ses enfants dans un amour qu'elle croyait avoir résolument perdu, elle baisse les bras.

    Cette femme autrefois si forte, si admirable, lorsqu'elle en était à l'aube radieuse, grandiose, de ses vingt printemps, ne trouve plus que le mot "Bêtise" (pour ne pas utiliser le vilain mot) à susurrer d'une voix éteinte, d'outre-tombe, qui revient d'aussi loin que là où se trouvent les Kabyles tués par Robert et ses hommes, là où repose Robert lui-même, ainsi que le fidèle, vaillant gaillard, bon vivant, toujours présent pour ses camarades, Roux. C'est avec beaucoup d'émotion et avec une grande fébrilité que l'on lit les lettres débordantes de vie et de tendresse qui redonnent à Danielle son unique voix, la seule qu'elle ait jamais eue.

    La voix affirmée d'une jeune femme magnifique et chérie par son bien-aimé ; elle lui rend cet amour transcendant au centuple. Elle le réconforte, elle lui fait part de tous les efforts qu'elle fournit, de son travail acharné pour leur assurer un nid douillet, elle lui rappelle qu'il est vivement attendu à la maison, là où se trouvent leurs deux cœurs esseulés. Tous les deux savent que rien n'est certain, que l'issue est fatidique. Ils n'ont véritablement été qu'un une seule fois, à leur grand désarroi, et cela nous brise le cœur de comprendre que ce qui aurait dû être la promesse d'une vie à deux, féconde, longue et sereine, a vu son éclat se tenir et être finalement anéanti dans le firmament de la nuit d'apparence sans étoiles, sans lueur, de la Guerre d'Algérie.

    Et malgré tout, malgré la fin qui menaçait à chaque instant de s'ouvrir sous leurs pieds pour engloutir tout ce qui était important et vital à leurs yeux, Danielle et Robert, ces deux amants, amoureux superbes, sont devenus les étoiles l'un de l'autre. Ils se sont transformés en une seule et même étoile, comme s'ils n'avaient jamais été séparés, comme s'ils n'avaient toujours été que de l'Amour à l'état pur, pour toujours et à jamais, de façon irrémédiable. Cette étoile n'a au fond jamais cessé de briller, toujours plus fort, tel un héritage impérissable d'un amour qui a réussi à vaincre la mort. Cette étincelle, c'était celle de leurs retrouvailles dans un pays étranger, qui n'était pas le leur et où les troupes de l'armée française ont commis les pires atrocités : violer un pays, sa culture, ses paysages dignes du jardin d'Eden, noyés dans le carnage du sang de l'Enfer, la dignité et l'honneur de ses hommes fiers et courageux, le corps de ses femmes, la jeunesse et la vie, la liberté de ce peuple... C'est la France qui, à ce moment-là, a tout sali, a sali aussi notre nom, qui est devenue HLL (Hors-la-loi), et qui est à l'origine de l'abomination perpétrée. Nous sommes inéluctablement coupables.

    Cependant, au-delà de cette honte cuisante qui nous brûle tel un fer rouge sur la peau, au-delà de l'indignation et de la colère grondante face à tant de sang innocent versé, ce que je retiendrai avant tout, c'est la touchante et sincère humanité de Danielle et Robert, leur immense sensibilité, leur humilité désarmante, et leur demande de pardon. Pardonnez-nous, tel un cri du cœur, du plus profond de l'âme.

    Et c'est Jean-Baptiste qui va répondre à ce cri déchirant enfermé dans des lettres qui irradient l'amour sans limites, sans frontières, dissimulé dans des phrases qui expriment l'irrépressible besoin de l'être aimé, de se raccrocher à ce qui donne du sens à notre vie et à toute cette galère, où la haine, la vengeance et ce désir sorti d'on-ne-sait-où de tuer du "fellouze" (une autre appellation tout à fait abjecte) finit par tirer inlassablement sur le fil de notre existence et par tout réduire à néant. Jean-Baptiste nous prouve in fine le contraire, que ce néant est en réalité rempli d'un cri immense, qui nous dépasse totalement. Son cri à lui, c'est d'abord celui de l'adolescent en colère, qui en veut terriblement à sa mère de n'avoir pas su maintenir la quiétude du foyer, et qui a pour souhait de mener la guerre à l'idée même de la faire. Chose selon lui de prime abord tout à fait impossible, impensable, et peu enviable. La Guerre gronde en chaque homme et le fascine. On veut même lui faire la guerre (lui faire elle-même en somme), tiens ! Après avoir lu (dévoré plutôt) tant de livres sur le sujet, des grands classiques de tout temps, la soif de Jean-Bapt est intarissable. Il franchit ainsi la limite entre l'encre et le papier et la chaire à canon et le sang, et ainsi commence sa carrière de reporter de guerre.

    A travers les yeux écarquillés tout grands par l'horreur (pires que ceux d'Alex dans Orange Mécanique) de Jean-Baptiste, le souffle toujours aussi court (je me demande comment j'ai fait pour respirer en lisant ce roman), nous allons ainsi voir défiler les paysages dévastés par les bombardements d'obus, les terrains minés, par le son des kalachnikovs, les tanks militaires des ex-pays communistes ; le sang d'hommes, de femmes et d'enfants par milliers déversé par les haches et les machettes sur et dans le sol du Rwanda ; dans les entrailles de ces terres souillées par la peur et la menace à tous les coins de rue, à peine sorti de chez-soi, comment reconstruire un monde viable ? Le cri qui voyageait au-delà de la mer devient un maigre filet de voix atterré, susurrant, incrédule, un "pardon" quasi inaudible.

    Et pourtant, je l'ai entendu, au plus profond de mon être, comme s'il avait été prononcé par une voix de titan et adressé au soleil. Ce soleil de Kabylie dont Robert avait fini par apprécier la clarté et la chaleur, ce soleil dans le cœur des gens, dans le cœur et la façon d'être de ces montagnards comme lui, qui lui ressemblaient beaucoup en fin de compte. Et cette bonté, et cette clarté qui se dégageaient de Robert, elles brillaient également dans les étoiles du ciel de Tchétchénie, de Crimée, de Croatie, du Rwanda, de Paris, de Fontainebleau, j'en suis persuadée. Simplement, à force de se crever les yeux mutuellement, on ne pouvait plus y voir clair, forcément. Ce livre nous force à regarder et à écouter les cœurs et les âmes qui saignent. Et c'est une bonne chose. Alors, faisons-le.

    Au nom de la patrie française, je vous demande pardon,
    Au nom de tous les amoureux qui voulaient juste s'aimer et être ensemble en paix, je vous demande pardon,
    Au nom de la stupidité humaine, je vous demande pardon,
    Au nom de la cruauté inexplicable de certains êtres, je vous demande pardon,
    Au nom de cette banalité qui ne devrait être tolérée, je vous demande pardon,
    A ce peuple farouche et fier de ce qu'il est, qui voulait juste être libre et respecté, je vous demande pardon,
    A tous les Algériens, et à tous ceux qui souffrent aujourd'hui encore des affres de la guerre, je vous demande pardon,
    Sincèrement pardon.

    Signé une jeune fille qui a foi en l'humanité, en la bienveillance envers autrui, et qui ne cessera jamais de chercher des réponses.

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