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Ilaria a huit ans quand son père l'embarque en cavale dans l'Italie du début des années quatre-vingt. Fulvio ressemble à « un guépard nerveux » pense l'enfant tout en chantant des tubes avec lui dans la voiture. Ilaria découvre Trieste, la mer en Toscane, l'internat à Rome. Elle apprend à conduire et à mentir. Observe et ressent tout tandis que son père boit de plus en plus de whisky dans un nuage de fumée. De petits hôtels en aires d'autoroute, l'enfant perd peu à peu l'odeur et la douceur de sa mère. La campagne sicilienne et la vie de ses paysans la sauvent. Ça ressemble à une aventure, mais c'est un enlèvement. Les mots de ce texte sont à hauteur d'enfant, ce que comprend Ilaria, c'est à travers des sensations physiques, au-delà de tout jugement.
Roman d’apprentissage délicat et percutant, d’une grande beauté.
« Tu sais, ta mère et moi… on s’aime. Mais on ne se comprend pas, elle dit que je l’empêche de vivre. Je ne sais plus comment faire. La vie avec elle est devenue impossible. Tu te souviens comment elle change d’humeur ? Comment elle change tout le temps d’avis ? Le soir c’est oui, et le lendemain matin, c’est non. »
Ilaria est un texte court qui se lit d’une traite.
C’est un texte bouleversant, fort.
C’est un texte d’une beauté inattendue étant donné le sujet. Quel est-il justement ? Les parents d’Ilaria sont séparés. Lui habite en Italie à Turin, sa mère, elle et sa sœur Ana vivent à Genève. Les relations étant tendues entre adultes, les « retrouvailles » se déroulent au restaurant chez Léon.
Mais ce jour-là, tout ne se déroule pas ainsi. La mère a changé d’avis, et le père embarque Ilaria avec lui pour le week-end… qui durera deux ans.
« Je veux rentrer. Puis l’idée de quitter Papa me glace. Je ne peux pas le laisser seul. »
Le père embarque Ilaria dans un road trip sur les routes italiennes. Bars, hôtels, stations-service, l’alcool coule à flot, le nuage de fumée obstrue habitacle ou chambre. Et à chaque fois la recherche d’une cabine téléphonique par le père. Sauf qu’Ilaria ne peut jamais parler à sa mère, son père trouve toujours une explication, un mensonge…
Il y a l’internat, puis la maison de grand-mère et enfin celle d’Isabella, l’amie de cette dernière.
« Je dois me débrouiller seule. Papa dit que je suis grande, que je n’ai plus besoin de lui. C’est comme ça. Moi, avec mes neufs ans presque et demi, je me sens vieille. »
Ilaria apprend seule, Ilaria se construit à chaque rencontre, à chaque discussion, à chaque abandon de son père.
Les paragraphes sont courts, certaines pages majoritairement recouvertes de blanc. Cette construction traduit le vide, les silences auxquels est confrontée Ilaria, son incompréhension, ses doutes mais aussi sa naïveté de jeune fille de 8 ans. Elle pointe également la sobriété, la concision. Le choix de la narration est également magistral : c’est l’enfant qui vit, qui voit, qui ressent et qui s’exprime. Humain, déchirant, émouvant, bouleversant.
Des télégrammes s’insèrent, s’intercalent entre les différentes aventures, augmentant tension et questions.
Ilaria ou la conquête de la désobéissance est un roman d’apprentissage qui marque durablement.
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