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Enfants perdus de Roumanie ; histoire des orphelinats de Ceausescu

Couverture du livre « Enfants perdus de Roumanie ; histoire des orphelinats de Ceausescu » de Jean-Philippe Legaut aux éditions Vendemiaire
Résumé:

Images d'enfants maltraités, mal nourris, privés d'accès aux soins : en 1989, l'opinion internationale découvrait avec effroi l'enfer des « orphelinats » roumains.
Des « pouponnières » aux « maisons d'enfants scolarisés » en passant par les « foyers » pour ceux que l'on considérait handicapés... Voir plus

Images d'enfants maltraités, mal nourris, privés d'accès aux soins : en 1989, l'opinion internationale découvrait avec effroi l'enfer des « orphelinats » roumains.
Des « pouponnières » aux « maisons d'enfants scolarisés » en passant par les « foyers » pour ceux que l'on considérait handicapés et « irrécupérables », ces structures mises en place sous Ceausescu dans l'ensemble du pays pour prendre en charge les enfants issus d'une politique nataliste sans précédent en accueillaient plus de 100 000... En s'appuyant sur des sources nationales et locales inexplorées, ainsi que sur de nombreux témoignages d'anciens mineurs placés, Jean-Philippe Légaut revient sur le fonctionnement de ce système dont le démantèlement devint un enjeu majeur de l'adhésion de la Roumanie à l'Union Européenne.

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Avis (1)

  • http://encreenpapier.canalblog.com/archives/2019/11/26/37817046.html


    En 1989 le couple Ceausescu tombe et le monde découvre ces bâtisses froides et dégradées où sont élevés des enfants de tout âge. Ceci a fait du bruit à l’époque, la communauté internationale est sous le choc comme le...
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    http://encreenpapier.canalblog.com/archives/2019/11/26/37817046.html


    En 1989 le couple Ceausescu tombe et le monde découvre ces bâtisses froides et dégradées où sont élevés des enfants de tout âge. Ceci a fait du bruit à l’époque, la communauté internationale est sous le choc comme le téléspectateur devant sa télévision. Il faut alors agir contre ce malheur !
    Le temps est passé, les cœurs se sont calmés, certaines mémoires ont peut-être oubliées, ceci est donc l’occasion pour Jean-Philippe Légaut qui travaille à Satu Mare avec des enfants depuis 2006 et qui a fait sa thèse dessus, de revenir à travers ce livre et sans emphase, sur le sujet tout en nous expliquant le pourquoi, et ce que cette affaire montre du régime du dictateur. Ce livre qui n’est pas qu’un portrait à charge contre Ceausescu, va nous montrer aussi que le problème venait aussi des institutions et à perdurer après la chute du politicien.

    Les raisons :

    Tout d’abord, pour comprendre la maltraitance infantile et ces structures inadaptées, il faut savoir que ceci a été rendu possible à cause du gouvernement du dictateur, qui a interdit dès le 1er octobre 1966 le droit à l’avortement, mettant ipso facto en avant l’intérêt de la nation avant celui des parents et des enfants. Ceci dans un but politique et surtout productif, puisque pour assurer la prospérité du pays et du régime il va falloir des bras. Évitons toutefois l’écueil, qui voudrait que l’on pense que ce régime cherche à monter une armée entièrement endoctrinée à sa botte, en effet l’auteur va démontrer que l’idéologie et le culte de la personnalité ne sont pas les objectifs de ces structures.
    Pour en revenir aux naissances, il ne faudrait pas croire pour autant que les naissances ont toujours été importantes depuis 1966, Jean-Philippe Légaut va en effet mettre en avant qu’après l’explosion des naissances il existe une nette diminution par la suite grâce aux avortements clandestins ou fausses déclarations.
    Néanmoins, cette explosion de naissance et quand bien même la diminution de ces dernières, ne va pas aller sans conséquence pour le pays ; car effectivement les familles ne peuvent pas forcément faire face à cette charge supplémentaire surtout dans des familles déjà nombreuses, immatures, violentes ou vivants dans un lieu étroit. Cette impossibilité d’élever un enfant, le gouvernement va quand même en prendre conscience, et dans un souci de modernité ce dernier va mettre en place un système de protection de l’enfance en se basant notamment sur le modèle occidental. Au moins dans le concept. Petite précision en passant, selon l'auteur l'abandon n'a jamais été un encouragement. L'Etat Roumain n'a jamais cherché l'abandon de ces enfants qui d'ailleurs peuvent par instant passer du temps en famille.
    Ces centres coupés en diverses structures : pouponnières, foyers-hôpitaux (mouroirs pour enfants jugés irrécupérables), orphelinats sans orphelins (tous ces enfants n’ont pas perdu leurs parents), doivent soigner, éduquer, préparer l’enfant à être productif. Ce qui implique pour notre temps un minimum de professionnalisme et un minimum d’intérêt pour les enfants. Mais en Roumanie à l’époque, l’auteur va vite nous dévoiler que ça ne va pas être le cas.

    La vie dans les centres :

    Vous vous en doutez la vie dans ces centres est loin de ressembler au Club Med. La violence est omniprésente entre pensionnaires, ou entre le personnel et les pensionnaires. Les vols sont fréquents donnant parfois vie à des circuits parallèles, le froid en hiver est terrible, l’hygiène déplorable, le manquement de soin certain et l’humiliation certaine. Vivre là-dedans c’est une épreuve et faut s’accrocher pour survivre. Néanmoins la dureté n’est pas la même dans tous les centres, et certains sont plus dangereux que d’autres du fait des lois, de la mentalité des gens ou/et de leur manque de professionnalisme.
    En effet, dans les mouroirs où ils plaçaient les enfants extrêmement handicapés (parfois même pas handicapés car l’examen médical était primitif et arbitraire) les soins sont minimes, tout comme l’argent qui leur était attribué. Ces enfants étant jugés irrécupérables, inutiles et à l’espérance de vie plus basse qu’ailleurs, les besoins octroyés n’avaient de fait pas besoin d’être énormes. Cependant, il faut quand même dire que le handicape n’était pas toujours de naissance, le manquement de soin et la manière de soigner ont créé beaucoup d’enfants handicapés ou malades, et entraîné aussi beaucoup de décès. Et ceci parfois même dès la pouponnière où les enfants en difficultés étaient placés, le sida a été par exemple favorisé par l’utilisation d’aiguilles non stérilisées, les soins pas toujours adéquates étaient donnés de manière cruelles et dangereuses. Comme on le voit ici le régime et son personnel ont créé eux-mêmes des problèmes supplémentaires quand bien même les rapports qui pouvaient dénoncer les aberrations.
    Dans les autres centres, style orphelinat, les conditions de vie ne mettent pas aussi catastrophiquement la vie des enfants en danger, le danger est certes présent à cause des conditions mais le plus grand danger reste quand même psychologique. L’équilibre n’est effectivement pas là du fait de la violence et des humiliations régulières. Mais croire comme à la TV que tout était horrible dans ces centres, est une erreur. Un certain nombre d’enfants interrogés par l'auteur gardent un bon souvenir de ces centres, parfois ça vaut même mieux que le retour dans le giron familial.
    La vie dans ces centres, l’auteur l’a abordé aussi par le côté administratif, cette approche va permettre d’aborder les autres problèmes qui ne concernent pas l’éducation. Déjà les vols, il y a en effet beaucoup de vol de la part du personnel et même des pensionnaires, ce qui accentue le manque déjà criant de nourriture ou d’autres produits. Car en effet la Roumanie communiste de Ceausescu est en manque d’argent, de nourriture, de matière… Par exemple, pour les vêtements il y a une réutilisation de ces derniers d’enfant à un autre, le combustible pour le chauffage manque, etc. Ce qui montre d’une part l’échec du régime mais aussi les limites que le système a.
    En plus de ceci on peut reprocher à ces centres, le manque de professionnalisme et l’absence, ou la quasi absence, d’intérêt pour l’enfant et son épanouissement. Un manque de professionnalisme qui sera encore présent après la chute du couple Ceausescu et que les ONG tenteront avec plus ou moins de succès de résoudre. Mais autant dire que rééduquer des cerveaux habituer à la froideur communiste et contrer une administration guère différente, ce n’est pas gagné.

    Scandale, post-communiste, Union-Européenne (UE), fermeture, ONG :

    Une fois la situation dans ces centres et les causes de se désastres étudiées, l’auteur va enfin aborder la vie post-communiste. Qui commence déjà avec des actions caritatives, comme je l’ai déjà dit les ONG ont tenté de faire bouger les choses avec des dons, des actions, de l’information, etc. Problème c’est que ces actions caritatives vont peut-être encourager un certain immobilisme dans le gouvernement roumain qui va trop se reposer dessus. Accessoirement ces associations n’ont pas vraiment une vision à long terme, tout est fait pour améliorer rapidement la vie de ces enfants en passant par exemple par l’adoption internationale, qui favorisera le trafic d’enfant mais à terme une législation plus sévère sur ce fait. Outre ceci, l’effet nocif de ces associations et dons c’est qu’ils favorisent le relâchement dans la gestion.
    Enfin on va aussi découvrir que l’UE est mise en cause par son acharnement sur la Roumanie - pays en crise et qui cherche à rentrer dans l’UE - pour régler rapidement le problème des enfants sans distinction de race, de mentalité, etc. (Je précise ceci car il y avait des discriminations selon l’origine et les problèmes.) Ceci a donc fait que la Roumanie, qui curieusement voit les placements d’enfants progresser après la période post-communiste, ferme le plus rapidement possible ces structures impossibles à moderniser. Sauf que cela se fait sans suivi des enfants, et les retours dans les familles se passent plus ou moins bien.

    « La crise de 1999 fut un catalyseur de l’orientation de la Commission. Elle accepta d’allouer une partie des fonds destinée aux réformes de structures du programme PHARE à l’aide d’urgence mais posa ses conditions pour la poursuite du processus d’adhésion : le gouvernement était le premier responsable de la protection des enfants en difficulté en Roumanie. Cette responsabilité n’était pas seulement budgétaire : elle couvrait également la conception et la mise en œuvre de réformes organisationnelles et éducatives. En ce sens, le gouvernement devait créer « une autorité unique qui élabore les politiques en faveur des enfants dans le besoin et fixe les normes appropriées à appliquer dans toutes les institutions hébergeant des enfants, y compris les foyers d’accueil pour enfants mentalement et physiquement handicapés. Cette autorité devrait être chargée de la supervision et du contrôle de la qualité des prestations fournis dans toutes les institutions, dans le respect des normes établies ». Nette et sans appel, la conclusion du rapport affirmait que la protection de l’enfance, y compris pour ses réformes, ne pouvait plus être « structurellement dépendante de l’assistance internationale ». Page 243.

    Une vision élargie :

    Ce livre va donc aborder pendant de longues pages la vie des enfants dans les centres, leur traitement et le personnel qui y travaille. Mais, il ne s’arrête pas là. En abordant ces sujets, c’est l’occasion pour l’auteur d’aborder la politique de Ceausescu ; c’est-à-dire les limites de sa visée nataliste on l’aura bien compris, mais aussi ses échecs comme l’impossibilité de contrôler une population notamment les marges. Chose étonnante pour une dictature, qui voit une résistance à sa pensée par une population qui refuse de laisser de côté ses pratiques ou encore ses addictions, et qui va même pratiquer l’avortement clandestin.

    En conclusion :

    C’est un livre intéressant à lire et qui se lit facilement en plus. Deux légers défauts à noter néanmoins, l’auteur se répète un peu et je regrette qu’il n’ait pas abordé les problèmes des enfants adoptés. Au moins un peu. D’après ma mère (moi j’étais trop jeune pour m’en souvenir), ces enfants adoptés ont été des enfants à problème et j’aurai bien aimé une petite ouverture dessus voir si c’est une légende ou pas.

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