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Le pessimisme de l'oeuvre de Cioran n'apparaît qu'a ceux qui n'en ont pas pénétré le sens ultime.
Cet acharnement contre soi n'est rien d'autre qu'une manière d'aller au bout de soi, dans laquelle nous percevons toutes les étapes d'un authentique cheminement spirituel qui, de ruine en ruine, révèle finalement l'homme ultime rongé par la lucidité. Plutôt qu'un homme sans foi, c'est un homme déçu qui, à l'instar des bouddhistes, voit dans ce désenchantement la voie royale vers la conscience suprême du néant.
Toutefois, Cioran se sent une parenté plus profonde avec les gnostiques chrétiens. Il professe comme eux, que le seul savoir auquel l'homme puisse prétendre est que ce monde est le produit d'une chute. L'homme plongé dans le temps n'aspire plus qu'à s'en évader et à réintégrer l'état édénique originaire. Ce mal, il s'agit non pas de l'ignorer, mais de s'en délivrer, de l'exorciser, de le mettre à distance dans les mots.
Ainsi le désespéré pour son salut devient esthète. Le beau style le guérit de son mal d'être. Mais, ainsi purgé de ce mal, il se trouve également guéri de lui-même. Le dernier homme est un homme vide. C'est le sage des temps modernes.
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