Rendez-vous le mercredi 16 octobre à 19h sur le site « Un endroit où aller »
Ils sont une poignée, «Ceux qui partent», au coeur de la foule qui débarque du bateau sur Ellis Island, porte d'entrée de l'Amérique et du XXe siècle. Jeanne Benameur orchestre cette ronde nocturne où chacun tente de trouver la forme de son propre exil et d'inventer dans son corps les fondations de son pays intime. Où l'arrachement se fait libération - envol. Où l'auteur de «Profanes »et des «Demeurées »signe son premier grand roman américain.
En 1910, une nouveau bateau accoste sur Ellis Island, à son bord de migrants et le jeune photographe Andrew Jonsson qui capte les regards, les attitudes.
En une journée et une nuit, nous allons découvrir les histoires, les espoirs de quelques personnages : Emilia et son père, italiens, Esther, Arménienne, Gabor, gitan ... Autour de ces personnages qui tous pour des raisons différentes, nous comprenons les affres de l'exil, les questionnements, les choix, la langues, les espoirs ...
C'est comme toujours avec Jeanne Benameur très bien écrit, mais je reste sur ma fin avec des passages qui n'apportent pas grand chose à l'histoire tout en s'éloignant du sujet.
Ceux qui partent est sans nul doute un très beau roman où on suit l'arrivée de migrants sur Ellis Island. Les mots de Jeanne Benameur nous portent, nous transportent avec poésie, avec lyrisme. Et on suit les aventures d'Emilia, de son père, de Ghabor et des autres, leur rencontre, leur amour, leurs doutes et leurs espoirs.
Un jour, une nuit où on se souvient, où se dilue la vie pour ses migrants à la recherche de la terre promise. Ils gardent leurs trésors, leur passé, leurs douleurs, leur précieuse langue. Ils attendent trop souvent dans des conditions déplorables mais ils savent que cette Amérique reste leur nouvelle vie, ils veulent y croire.
L'utilisation du "on " du "nous" fait participer le lecteur, nous rapproche aussi de cette quête. Ce livre, est c'est peut-être, cela son intérêt nous rappelle notre condition fragile, d'être, en partance, en perpétuelle recherche de nous-même et formidablement vivant.
Peu d'auteurs parviennent à m'émouvoir comme le fait Jeanne Benameur. Son écriture me touche profondément car il y a de la beauté et de la poésie dans chaque phrase.
Dans ce roman qui se déroule en un jour et une nuit, il y a peu d'action, mais chaque personnage porte en lui une histoire si intense, la mémoire des proches disparus y est si vive, que cela en fait un livre très fort.
Sur Ellis Island, trait d'union entre l'ancien et le nouveau monde, le temps est suspendu, l'attente est interminable. L'auteur a su capter ce moment de flottement, où le cœur des émigrants oscille entre le déchirement d'avoir tout laissé derrière eux, et l'espoir de commencer une vie meilleure sur ce nouveau continent. Il faut du courage et de la force pour quitter sa vie d'avant, si dure soit elle, se lancer vers l'inconnu sans aucune certitude, et devenir quelqu'un d'autre. Car l'exil transforme les êtres et il leur faut laisser une part de soi sur leur terre natale pour mieux se réinventer. « Est-ce pour bien s'imprégner, une dernière fois, de ce qu'ils ont été et ne seront plus, qu'ils ne cèdent pas à l'excitation de l'arrivée ? ».
Ce fut pour moi une magnifique lecture.
Qu’est-ce que partir, émigrer ? Cette question d’une actualité brûlante est pour ainsi dire radiographiée, disséquée, dans le dernier roman de Jeanne Benameur, Ceux qui partent. Le cadre, c’est l’île d’Ellis Island, lieu bien connu des candidats à l’émigration sur le sol des Etats-Unis , qui servait de centre d’accueil et de transit jusqu’à sa fermeture .Nous sommes en 1910 : Donato Scarpa, comédien fin lettré, sa fille Emilia douée pour la peinture, Esther Agakian , jeune arménienne fuyant la persécution exercée sur son peuple par les Turcs ottomans .Andrew Jonsson, photographe de son état , et Gabor , jeune gitan qui rêve de gagner l’Amérique latine , plus conforme à ses attentes , sont les principaux protagonistes .
La forme du roman, c’est un choral auquel participent tous ce personnages .Ils décrivent leurs attentes, leur état d’esprit, leurs antécédents psychologiques, affectifs, sociologiques face à l’accomplissement de ce départ .Les phrases de Jeanne Benameur sont courtes, concises , mais elles ne tombent pas dans une distanciation excessive vis-à-vis du sort des personnages .Elles font mouche et illustrent le caractère ambivalent du départ, de l’arrachement à ses origines, à sa langue : « Il y a ceux qui restent et ceux qui partent.(…) Elle pressent, oui, dans cet instant suspendu, que ce qu’on nomme le départ passe et repassera par son corps à elle. »
Emigrer, nous dit Jeanne Benameur, c’est intrusif, c’est un envahissement de notre intimité, une remise en cause de notre autonomie d’individu. C’est ce qu’éprouve Donato, pour qui les Américains « ont nourri aussi nos femmes et nos enfants (…) Jusqu’où l’étranger doit-il entrer dans notre chair ? »
Les descriptions des relations qu’entretiennent les personnages entre eux sont fines, subtiles : elles touchent par exemple à l’effet de la déclamation d’un livre lu par Donato sur le jeune gitan Gabor, qui espère séduire Emilia : « Pourtant, cette voix a failli le retenir parce qu’il a compris ce et qu’il aime ce que fait cet homme. »
Bien plus qu’un reportage journalistique ou qu’une étude d’une organisation internationale ne pourraient le faire, Ceux qui partent illustre la nature de la démarche du départ, ses conséquences à longue échéance, sa genèse : « Les émigrants ne cherchent pas à conquérir des territoires ; ils cherchent à conquérir le plus profond d’eux -mêmes parce qu’il n’y a pas d’autres façons de continuer à vivre lorsqu’on quitte tout. »
Ce roman contribuera sans doute à la connaissance des mécanismes intimes du départ : l’espoir, la douleur, la renaissance escomptée en sont les éléments majeurs dont Jeanne Benameur illustre magnifiquement la puissance sur les destinées personnelles.
Une belle histoire sur l'immigration, les immigrants, leurs espoirs.
Tout se déroule à Ellis Island à l'arrivée d'un bateau. Les destins se croisent.
parfois les descriptions sont un peu longues, mais l'immigration est un sujet tellement d'actualité qu'on ne peut qu'être sensible à l'écriture de Jeanne Benameur.
1910....2020...
J'adore l'écriture de Jeanne Benameur.
1910. Portes de New York : Ellis Island, zone de transit.
Un père et sa fille, tout est dans la gestuelle de cette photo, à cet endroit-là. Lui, Donato, l’homme vieillissant passe son bras protecteur autour des épaules de celle qui est la plus chère à son cœur : Emilia, sa fille ; elle a le corps tendu vers cet ailleurs plein de promesses, oiseau prêt à s’envoler.
« L’Histoire ne fait que répéter les mêmes mouvements. Toujours. Les hommes cherchent leur vie ailleurs quand leur territoire ne peut plus rien pour eux, c’est comme ça. Il faut savoir préparer les bateaux et partir quand le vent souffle et que les présages sont bons. Tarder, c’est renoncer. »
Andrew Jónsson est le photographe, que cherche-t-il en immortalisant sur la pellicule ces arrivées massives ?
C’est un roman polyphonique, où chaque vie est différente, des cœurs qui battent à l’unisson de l’espoir qui les anime.
Esther Agakian rescapée du génocide arménien, Hazel la prostituée. Un groupe de bohémien, musiciens qui veulent gagner l’Argentine.
Le temps c’est celui qui est suspendu entre l’aube de l’arrivée à l’aube du lendemain. Ce lendemain qui dira si oui ou non l’Amérique les attend.
Période d’espoirs, de doutes et de tout ce qui constitue chacun d’eux, et plus encore.
Dans ce lieu et ce temps intermédiaire le lecteur découvre ce que « oser partir » implique. Changement de lieu mais surtout devoir s’approprier une autre langue que celle de ses origines.
Tout en est affecté, la gestuelle, le mode de pensée, les relations que l’on noue avec des personnes que l’on n’aurait pas côtoyé sans ces circonstances-là.
De multiples questions se présentes : Donato et Emilia, eux ont choisi d’émigrer, c’est presque un luxe ; d’autres ont fui un pays qui les rejette et les extermine, ils sont contraints…
Et Andrew qui est né à New York parce que ses grands-parents sont partis avec la vague d’émigration islandaise, la grand-mère se souvient, la mère, elle fait comme si…Donc le petit fils cherche sa propre histoire.
« Alors elle se met à lui parler en islandais. C’est quelque chose qu’elle fait parfois, depuis qu’il est tout petit. Elle a toujours pensé que c’était la seule vraie façon d’apprendre une langue. Il se laisse porter, ne comprend pas tout mais cela n’a pas d’importance. Il entend. Ce qu’elle dit dans cette nuit, dans la voiture qui roule dans New York, ce sont des paroles pour la mémoire qui habite les corps et coule dans les veines. »
Cela présente les multiples facettes d’un acte et remet en question le concept d’identité.
Un très beau portrait de femme se dessine, une femme faite pour la modernité et la liberté. Emilia porte cela en elle.
Dans ce roman il y a tout ce que j’aime chez Jeanne Benameur, l’art de travailler les mots, de les façonner pour donner à voir, sans jamais faire la leçon, juste déciller le regard, le prolonger de poésie, ouvrit les fenêtres sur le monde. 1910 et aujourd’hui c’est la même chose, car le monde va ainsi.
Les mots ainsi font images et articulent les pensées.
Cet art qu’elle maîtrise parfaitement fait que le lecteur s’immerge comme les protagonistes dans ce temps de vacance pour s’interroger en profondeur et laisser transpirer sa propre essence. Voir au-delà.
Une autre particularité de Jeanne Benameur, c’est ce regard toujours bienveillant, cette attention au monde qui le rend poétique.
Poésie dont nous avons tous besoin.
En conclusion, tant que nous garderons « Le sentiment si apaisant de la vie qui continue, fluide, et qui va sa route d’un corps à un autre corps, que rien ne se perd en chemin parce que tout s’invente et continuera à s’inventer avec des forces nouvelles, singulières. »
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 16 janvier 2020.
«Ils prennent la pose, père et fille, sur le pont du grand paquebot qui vient d’accoster. Tout autour d’eux, une agitation fébrile. On rassemble sacs, ballots, valises. Toutes les vies empaquetées dans si peu.» En retraçant le parcours de quelques émigrés partis pour New York en 1910, Jeanne Benameur réussit un formidable roman. Par sa force d’évocation, il nous confronte à «nos» migrants. Salutaire!
Un paquebot arrive en vue de New York. À son bord des centaines de personnes qui ont fait le choix de laisser derrière eux leur terre natale pour se construire un avenir meilleur dans ce Nouveau Monde. Parmi eux un père et sa fille venue de Vicence en Italie. Dans ses bagages Emilia a pensé à emporter ses pinceaux tandis que Donato, le comédien, a sauvé quelques costumes de scène, dérisoires témoignages de leur art. Durant la traversée, il a lu et relu L’Eneide dont les vers résonnent très fort au moment d’aborder l’ultime étape de leur périple, au moment de débarquer à Ellis Island, ce «centre de tri» pour tous les émigrés.
À leurs côtés, Esther, rescapée du génocide arménien et Gabor, Marucca et Mazio, un groupe de bohémiens pour qui New York ne devrait être qu’une escale vers l’Argentine. Les femmes vont d’un côté, les hommes de l’autre et l’attente, la longue attente commence avec son lot de tracasseries, d’incertitudes, de rumeurs.
Andrew Jónsson assiste à cet étrange ballet. Il a pris l’habitude de venir photographier ces personnes dont le regard est si riche, riche de leur passé et de leurs rêves.
Et alors que la nuit tombe, la tragédie va se nouer. Le voile noir de la mort s’étend
En retraçant cette page d’histoire, Jeanne Benameur nous confronte à l’actualité la plus brûlante, à cette question lancinante des migrants. Emilia, Donato, Esther et les autres étant autant de miroirs pointés sur ces autres candidats à l’exil qui tentent de gagner jour après jour les côtes européennes. Comment éprouver de l’empathie pour les uns et vouloir rejeter les autres? Comment juger les pratiques américaines de l’époque très dures et juger celles de l’Union européenne comme trop laxistes? Tous Ceux qui partent ne doivent-ils pas être logés à la même enseigne?
Quand Jeanne Benameur raconte les rêves et l’angoisse de toutes ces femmes et de tous ces hommes retenus sur Ellis Island, elle inscrit aussi son histoire à la suite de l’excellent Mur Méditerranée de Louis-Philippe Dalembert et du non moins bon La Mer à l’envers de Marie Darrieussecq. Ce faisant, elle prouve une fois encore la force de la littérature qui, par la fiction, éclaire l’actualité avec la distance nécessaire à la compréhension de ces déplacements de population. En laissant parler les faits et en prenant soin de laisser au lecteur le soin d’imaginer la suite.
https://urlz.fr/bsYa
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