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La République avait son philosophe et nous ne le savions pas. Elle ne l'a guère reconnu, il est vrai, et l'oubli n'a pas eu de peine à faire son oeuvre. Il n'en reste pas moins qu'il a existé, dans la France de la seconde moitié du XIX? siècle, un effort spéculatif de vaste envergure pour élucider les fondements théoriques et les conditions pratiques d'une politique républicaine. En tirant de l'ombre la pensée politique de Charles Renouvier (1815-1903), Marie-Claude Blais renouvelle l'histoire intellectuelle de la III? République et lui confère une autre dimension. Elle met en lumière un destin exemplaire. Celui d'un jeune bourgeois en rupture de ban, épris de socialisme utopique, quarante-huitard fervent (il est l'auteur du fameux Manuel républicain) que l'échec de la II? République, scellé par le coup d'État du 2 décembre 1851, conduit à une révision radicale de ses premiers engagements et à une véritable conversion philosophique. Contre Hegel et toutes les philosophies déterministes de l'histoire, Renouvier opère un retour politique à Kant. Il s'agit de demander à la philosophie critique les bases repensées d'un régime de liberté. Cette entreprise de fondation est déployée dans la Science de la morale, de 1869, qui donne à la philosophie de la liberté républicaine sa théorie du droit et de la justice. En 1872, il crée La Critique philosophique, revue hebdomadaire de combat d'idées. Ce sont les articulations de cette philosophie de la République que l'ouvrage s'attache à restituer.
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