Laurine Roux revient sur "L'autre moitié du monde" mais aussi "Sur l'épaule des géants", son dernier roman
Un étudiant paumé, désinvolte, qui fume, boit, vend des frites, se met un jour à suivre un vieil homme, qui tombe d’un arbre tous les matins pour aller s’installer à la terrasse d’un café et s’enfiler plusieurs verres de rosé, qui distribue des petits papiers aux habitants du quartier, qui a des crevettes dans ses poches. Il le suit et découvre alors un autre monde.
Et voilà, Thomas Vinau a encore frappé, j’ai été sous le charme tout du long.
Le roman commence ainsi :
« J’allais sans aller nulle part. Je venais de prendre une bonne raclée. Le matin même, je pensais, ça y est, c’est la bonne, et deux heures plus tard je me retrouvais à tester un cocktail à base de larmes et de 8.6 tiède en errant sur le trottoir. J’ai toujours été un connard sensible. »
J’aime le ton de Thomas Vinau, j’aime ses mots qui mêlent adroitement familiarité et poésie, j’aime ses phrases courtes qui tapent en plein cœur, j’aime sa magie, sa folie…
De la poésie à l’état brut, c’est déglingué et superbe, c’est plein de petites touches d’humour (j’ai eu souvent un sourire au coin des lèvres) et de petites notes de désespoir, mais pas du noir, non, du coloré, du désespoir qui se mue en espoir.
Regardons, regardons autour de nous, ne fermons pas les yeux sur l’essentiel, observons les petites traces du quotidien dans le collimateur de l’œil exercé du poète.
« Je vois une énorme patte d’araignée avancer toute seule sur le livre. Pas de corps, ni de tête, juste une patte arrachée qui avance. Je m’approche éberlué. Une minuscule fourmi la porte. »
Suivons Marcello et essaimons nos petits papiers qui ouvrent la voie de la beauté, d’un certain regard sur le monde.
Suivons Marcello pour accéder à cet espace préservé dissimulé en plein cœur de la ville et rêvons !
Un jeune couple emménage dans une maison abandonnée depuis des années et souhaite la rénover. C’est sa maison natale, à lui. Ils s’y construisent et créent leur espace au fil des saisons. Mais ce lieu suggère beaucoup de souvenirs, l’enfance, les jours heureux mais aussi sombres, la pêche, la mort d’un père, la rivière. Il faut désormais accepter l’absence de ceux qui ne sont plus, recommencer à zéro, ouvrir la brèche d’une vie nouvelle à deux.
Je n’ai pas envie de faire durer le suspense aujourd’hui. Ce livre a été un réel coup de cœur. Je me suis laissée bercer par l’écriture grave et sublime de Thomas Vinau, cette capacité à raconter la fragilité, les failles, mais aussi la nature et l’amour. Elle rappelle sans cesse la double casquette de l’auteur, à la fois romancier et poète. L’atmosphère de ce livre m’a régulièrement rappelé Dans ce jardin qu’on aimait de Pascal Quignard aux éditions Folio. Un monde dans lequel la mélancolie, l’absence et la reconstruction avancent à l’unisson dans un décor végétal digne des plus beaux contes.
Et que dire de ce jeune couple illustré tout au long du roman ? Il est beau. Beau par sa différence. Elle est audacieuse, forte et dynamique, il est introverti, fragile et émotif. Mais ils s’aiment d’un amour sincère et puisent mutuellement dans les ressources de l’autre pour créer une harmonie parfaite avec ce décor naturel. Ils font partie du tableau.
Enfin, Ici ça va est d’une grande douceur malgré les sujets qui sont parfois abordés. Il est contemplatif et semblable à la poésie japonaise. Tout est observation du temps qui passe, des saisons, de cette reconstruction interne et externe. Ce livre est une pause réelle dans l’existence, un moment suspendu dans une intimité nouvelle, un instant loin du monde.
Un jeune couple achète une vieille maison à la campagne et la restaure.
C'est la maison où lui vécut enfant.
Ils se réapprivoisent.
Ils réapprivoisent le temps et l'espace.
Ils découvrent la nature, les arbres, les oiseaux, les animaux.
Ils réapprennent à vivre.
Une reconstruction douce et tendre servie par une écriture poétique.
C'est beau et lumineux.
C'est grave et profond aussi.
Malgré une pointe de mélancolie, de nostalgie, c'est ampli d'espoir.
Un livre dont on sort imprégnés, dont on n'a pas spécialement envie de parler tant les sensations ressenties sont personnelles, mais dont on est sûr qu'on le relira plusieurs fois, juste pour la douceur de l'ambiance.
Noé, le fils de Joseph vient de partir une semaine chez sa mère.
Joseph contemple les nuages, regarde le temps passer, se réfugie souvent dans la cabane de Noé dans le cerisier.
Il faut bien le dire, il déprime Joseph sans son fils !
Il m'a beaucoup fait penser au héros de La fin des saisons.
L'un dans sa cave, l'autre dans sa cabane.
Deux hommes au mi-temps de leur vie.
Au temps de bilans sans compassion sur soi-même.
Deux hommes attachants.
Et toujours cette écriture fluide et poétique de Thomas Vinau.
On ne s'en lasse pas.
Les nuages, le ciel, la nature....
Son fils et les nuages sont les tuteurs de l'existence de Joseph.
Une semaine d'absence du fils où Joseph s'autorise des permissions, des interdits, des régressions.
Une semaine triste, c'est sûr, mais douce aussi.
Il se raccroche aux branches Joseph, il se raccroche aux nuages.
L'auteur a l'art de la mélancolie sans jamais être pesant.
On a tous envie de retrouver notre part de nuages.
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