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Serge Portelli

Serge Portelli
Président de chambre près la cour d'appel de Versailles, ancien conseiller auprès du président de l'Assemblée nationale et doyen des juges d'instruction au tribunal de Créteil.

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    Couverture du livre « Qui suis-je pour juger l'autre ? » de Serge Portelli aux éditions Editions Du Sonneur

    Serial Lecteur Nyctalope sur Qui suis-je pour juger l'autre ? de Serge Portelli

    25 juillet 2022


    Valérie Millet, la fondatrice des éditons du Sonneur me connait apparemment bien quand elle m'a mis dans les mains « ce petit livre qui te plaira ». Dans la collection « Ce que la vie signifie pour moi » dirigée par Martine Laval, c'est Serge Portelli, magistrat, qui donne...
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    25 juillet 2022


    Valérie Millet, la fondatrice des éditons du Sonneur me connait apparemment bien quand elle m'a mis dans les mains « ce petit livre qui te plaira ». Dans la collection « Ce que la vie signifie pour moi » dirigée par Martine Laval, c'est Serge Portelli, magistrat, qui donne du sens à la justice par le biais de cet ouvrage. Durant toutes mes études juridiques, j'ai parcouru bon nombre de témoignages d'auxiliaires de justice, parfois pompeux, parfois égocentriques, celui-ci ouvre une nouvelle brèche tant elle lie la justice à l'humain. « Qui suis-je pour juger l'autre ? ». Si à notre échelle de citoyen la question se pose, elle n'est rien quant à la vie d'autrui en devient altérée par une peine de prison. C'est en cela que Serge Portelli convoque son expérience de magistrat au travers des enquêtes qu'il a menées en tant que juge d'instruction. On voit ainsi, sous sa plume, le destin cabossé de toutes ces âmes délinquantes se fracasser contre le mur aveugle d'une justice qui oublie tant ce qu'est un être humain. En une centaine de pages, il est arrivé à faire de ce plaidoyer, un texte nécessaire qui ose mettre l'humanité au coeur d'un système judiciaire désincarné.
    Vous y croiserez Henri, passé vingt quatre fois devant le juge, récidiviste pour des vols sans que personne ne comprenne que sa logique n'était que virtuelle et que son irresponsabilité était évidente. Mais aussi ces trois gamins de 8 à 11 ans qui ont tué un clochard tout en lui enfonçant un morceau de bâton dans l'anus. « Cet âge est sans pitié ». Ou encore Ginette tuée et défigurée par une jeune étudiante pour un mauvais mot sur ma mère, à laquelle « il fallait rendre un visage à cette femme ».
    « Chaque homme porte la forme entière de l'humaine condition », affirmait Montaigne.
    Serge Portelli s'interroge sur le « paquetage invisible » de sa robe de magistrat, différencie le droit et la justice, comprend au fil de son exercice qu'il n'y a pas qu'une seule vérité. Avec une certaine finesse et une grande pédagogie qui me fait penser que cet ouvrage serait idéal pour mes étudiants, il réussit à lier la ligne que l'on trace dans nos vies à cette morale dictée par nos lois. Dura lex, sed lex. Oui, mais « la justice peut-elle se satisfaire de solutions automatiques ou doit-elle être toujours individualisée ? ». La justice voit-elle encore quelle personne juge t-elle ? le bandeau de cette dernière n'est-il pas déjà tombé de ses yeux ? Avec force, Serge Portelli dénonce les dérives d'une justice qui ne voit plus et qui juge à tour de bras sans jamais croire à la rédemption.
    « La pente naturelle de l'esprit est de croire que tout se répète, que la vie est à sens unique. »
    Si certains sont morts dans une grande indifférence notamment dans leur cellule, qui sommes-nous pour juger d'un parcours de vie ? Seriez-vous surs avec leur passif, de prendre une direction différente ?
    Quant aux méandres du pouvoir politique, toutes années confondues, l'auteur ne mâche pas ses mots lorsqu'il décline la légion d'honneur, me rassurant quant à certains passages légèrement égotistes que je pardonne volontiers étant donné qu'on lui demande de parler de lui. Il parait difficile de lui en vouloir lorsqu'il a de surcroit eu raison trop tôt sur de nombreux sujets.
    Au-delà des thématiques qui en deviennent essentielles dans une société si fragilisée et excluante, Serge Portelli lance un cri d'alerte contre les centres de rétention qui fleurissent, du climat de délation qui s'installe, du côté factice de l'administration judiciaire ou encore de l'inhumanité ambiante.
    « Il est si facile de se convaincre que nous ressemblons à nos actes, qu'ils nous définissent une bonne fois pour toutes et que notre identité tient à leur répétition ».

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