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Il faut qu'on parle de Kevin par Lionel Shriver, traduit de l’anglais (É-U) par Françoise Cartano, Lu par Micky Sébastian, Lizzie, 2024 (1ère édition : Belfond, 2006).
À la veille de ses 16 ans, Kevin Khatchadourian exécute neuf personnes dans son lycée. Son acte était prémédité et minutieusement préparé.
A travers des lettres au père dont elle est séparée, sa mère retrace l’itinéraire meurtrier de leur fils.
Malgré l’intérêt du sujet, autour de la culpabilité et l’ambivalence de cette femme, je n’ai pas réussi à entrer dans ce roman.
J’ai trouvé l’effet de suspense malsain car, tout en comprenant que Kevin a fait quelque chose de très grave, les détails de son attaque ne sont donnés qu’à la presque fin du livre, comme pour ajouter à la violence et à la complexité sous-jacente, contenue tout au long des lettres.
Ce choix narratif est également dérangeant car il place la mère au cœur du récit sans pour autant la rendre attachante ou sympathique. J’avais vraiment l’impression qu’elle ramenait tout à elle. Sans minimiser l’horreur de sa situation, j’ai trouvé sa logorrhée malaisante.
« Un roman coup-de-poing, violent, complexe, qui s’attaque aux pires des tabous » ; c’est ce que promettait la 4ème de couverture.
Beaucoup trop long et pesant selon moi, plus de 19 heures d’écoute, presque 500 pages en version brochée…
En outre, j’ai eu du mal avec la voix de la narratrice de la version audio de ce livre. À la réflexion, je réalise que Micky Sébastian a parfaitement su rendre la personnalité de l’héroïne et ses états d’esprit.
#IlfautquonparledeKevin #NetGalleyFrance #lesglosesdelapiratedespal
Au début des années 90, Kay et Cyril ont 50 ans et viennent d’enterrer le père de Kay. Cela faisait 10 ans que cet homme était sénile et dépendant, 10 ans que Kay a vécu comme un enfer. Aussi, au retour de la cérémonie, les deux époux scellent un pacte : le jour des 810 ans de Kate ils se donneront la mort ensemble, pour éviter la déchéance. Le temps passe et le jour fatidique arrive, mais entre temps beaucoup de choses ont changé au Royaume Unis comme dans leur vie. Ce pacte, conclu en 1991, sont-ils prêts à l’honorer tous les deux ?
Le roman de Lionel Shriver est construit comme un arbre de décision. En effet, les premiers chapitres évoquent la promesse fais entre époux puis les années qui s’écoulent normalement. Le Brexit puis le COVID viennent percuter leur vie avant que n’arrive le jour J. Ensuite, 12 chapitres s’enchainent comme autant de dénouements possibles : ils le font tous les deux (ils réussissent ou ils échouent) l’un renonce, ils renoncent tous les deux, et chacune de ces branches branches se divisent à son tour pour donner au final 12 fins possibles. Cela rends la lecture savoureuse et assez ludique, malgré la lourdeur du sujet. Car Lionel Shriver imagine des fins cruelles, des fins terrifiantes, des fins ironiques, des fins presque heureuses, des fins morales, des fins parfaitement immorales. A chaque début de chapitres on repart au moment M ou bien on repart plus tôt, ou plus tard. Certains chapitres sont longs, d’autres bref. J’ai bien aimé, même si c’est douloureux, ce chapitre raconté du point de vue de Kay totalement partie dans le monde d’Alzheimer, regardant le monde comme une enfant émerveillée de tout. J’ai été terrifiée (et révoltée) par les chapitres dits « du docteur Mimi » qui en disent long, très long sur les établissements dits « de fin de vie » en Angleterre. Kay apparait comme plutôt sympathique d’emblée dans le roman, elle vient de prendre soin de son père pendant 10 ans, 10 ans d’enfer et on compatit, voire même on comprend son désir de ne pas finir comme lui. Cyril, en revanche, est un personnage plus difficile à cerner et à apprécier. Lui désire ce double suicide pour des raisons économiques. Cet ancien médecin du système de santé public du Royaume Unis a des réflexions (notamment dans les premiers chapitres) qui frise l’eugénisme. Cet homme, ouvertement travailliste, opposé farouchement au Brexit, a parfois des réflexions qui font froid dans le dos. Il prône des solutions très radicales pour sauver le système de santé, des solutions franchement limites. Du coup, il est beaucoup moins sympathique aux yeux du lecteur et le chapitres intitulé « Cyril change d’avis de façon inattendu » enfonce le clou. Attention, plus on avance, plus les fins proposées sont audacieuses et/ou bizarres : science-fiction, dystopie, Shriver ne s’interdit rien, pas même de s’auto critiquer dans un passage savoureux ou elle fait dire à Kay des horreurs sur un de ses romans ! « A prendre ou à laisser » est un roman original, épatant et ludique à lire, une expérience de lecture différente qui e manque pas d’audace et d’humour (noir). Sur le fond, Shriver dépeint comme elle sait le faire les faiblesses et les lâchetés ordinaires. Sa plume est sans concession, parfois même acide. Cet auteure que j’aime beaucoup depuis son inoubliable « Il faut qu’on parle de Kevin » sait où appuyer : pile là où ça fait mal.
Kay et Cyril mènent une vie heureuse dans leur grande maison de Lambeth.
Lui est médecin généraliste et travaille pour le service de santé de l’état.
Elle est infirmière.
Elle est épuisée après avoir passé des années à s’occuper de son père vieillissant, devenu gâteux. Tant et si bien que le décès de ce dernier est plus une libération qu’un immense chagrin.
Les décès des parents dans des conditions pénibles tant pour eux que pour les familles poussent Cyril à prendre une résolution irrévocable. Il leur est impossible d’attendre la déchéance, la maladie, de perturber la vie de leurs enfants qui ont bien d’autres soucis, et de peser sur le budget du gouvernement déjà bien trop sollicité.
S’ils ont aujourd’hui cinquante ans, la résolution de se suicider le jour de leur quatre-vingts ans est semble-t-il la plus logique. Enfin, le jour des quatre-vingt ans de Kay, puisqu’elle a un an de moins que son époux.
À partir de cette prise de conscience, ils vont évoluer chacun de son côté en sachant que le flacon du jour J est bien rangé sur une des étagères de leur frigo.
Mais que se passerait-il si l’un ou l’autre décidait de ne pas respecter le pacte ? Quelles pourraient être les multiples autres possibilités qui s’offriraient à eux ?
A partir de nombreuses hypothèses, toutes plus farfelues les unes que les autres, mais cependant souvent plausibles, Lionel Shriver examine les fins de vies qui s’offriraient à eux, ensemble ou séparés selon qu’ils auraient ou pas accepté le pacte.
N’hésitant pas à aborder les grands sujets d’actualité, le Brexit, pour ou contre, les confinements successifs et la façon dont le monde, et la Grande Bretagne en particulier, les ont appréhendés, les difficultés rencontrées dans toute famille lorsque les parents et les enfants ont du mal à se comprendre, la vieillesse et les maladies, la façon dont les couples évoluent, ensemble ou au contraire de façon contradictoire malgré les longues années passés ensemble, etc.
N’hésitant pas non plus à se mettre en scène de façon tout à fait ironique et brillante.
https://domiclire.wordpress.com/2024/06/19/a-prendre-ou-a-laisser-lionel-shriver/
Un beau jour, Kevin, presque 16 ans, abat neuf personnes dans son lycée.
Depuis lors, Eva, sa mère, s’interroge : aurait-elle pu empêcher ce massacre si elle avait (mieux) aimé son fils ?
A travers les lettres qu’elle écrit à Franklin, le père de Kevin dont elle est séparée, elle décortique leur histoire, leurs personnalités à tous les trois, pour tenter d’identifier les grains de sable, les erreurs, les malentendus, les occasions manquées, qui se sont accumulés au fil du temps pour aboutir à une tragédie.
D’abord il y avait Eva, bourlingueuse invétérée, directrice d’une florissante maison d’édition de guides de voyage. Eva était indépendante, libre, et ne voulait pas d’enfant.
Mais il y avait Franklin, l’homme de sa vie, qui, lui, se projetait en papa modèle. Eva était tellement amoureuse et craignait tellement de perdre Franklin, qu’un soir de panique, elle a pris un risque.
Et neuf mois plus tard, il y eut Kevin, et le début d’une histoire de non-amour et de rejet mutuel entre une mère et son enfant. Si pendant 15 ans Eva fera semblant d’aimer son fils et tentera de se comporter comme une mère digne de ce nom, Kevin, lui, ne se donnera pas la peine de cacher son aversion pour elle.
Apathique, sournois, froid, cruel, manipulateur et exceptionnellement intelligent, Kevin semble faire payer à sa mère le fait qu’au tréfonds d’elle-même elle ne l’a pas désiré. Par contre, il joue parfaitement son rôle de fils modèle avec son père, archétype du papa cool, qui ne soupçonne rien de la personnalité toxique de Kevin, contrairement à Eva. Et chaque fois que celle-ci tente d’aborder le sujet avec son imbécile heureux de mari, un dialogue de sourds s’installe.
Je crois que je n’ai jamais rencontré de narrateur/trice aussi sarcastique.
Sans la moindre complaisance, Eva scrute rétrospectivement son comportement et ceux de Franklin, Kevin et Celia (la petite soeur), tout au long de ces années.
Ce qu’elle a cerné de son fils dès sa naissance, ce qu’elle a loupé, ce qu’elle n’a pas empêché, ce qu’elle n’a pas vu venir, ce qu’elle n’aurait jamais imaginé.
Son analyse est froide, implacable, extraordinaire de lucidité. Page après page, elle fait tomber tous les masques, pour finalement répondre à LA question : Eva aime-t-elle son fils ?
C’est bien cette question-là qui traverse tout le roman, celle de l’amour maternel inné et inconditionnel. Une question encore choquante, taboue, et Lionel Shriver ne prend pas de gants pour la poser. Pas de mièvreries, d’auto-apitoiement ou de bons sentiments, mais une déconstruction méthodique des mythes de l’enfant innocent et de l’instinct maternel, et un dézingage en règle des principes d’éducation laxistes accoucheurs d’enfants-rois.
On se perd parfois dans des longueurs un brin trop cérébrales, mais ce roman est remarquable par l’intelligence de sa construction et la complexité des sentiments. Malgré les atrocités et le malaise, ce livre puissant est passionnant.
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