"Jours de travail" Les journaux des Raisins de la colère 1938-1941 (Seghers). Trad Pierre Guglielmina
"Jours de travail" Les journaux des Raisins de la colère 1938-1941 (Seghers). Trad Pierre Guglielmina
Ce roman court et percutant est l’histoire d’une amitié entre Georges et Lenny, dans les années 30 en Californie. L’un est vif et futé, l’autre est simple d’esprit. Ils rêvent de gagner suffisamment d’argent pour s’installer sur une terre, être fermiers et libres. Mais Lenny est candide, gaffeur, et Georges peine à sauver les apparences. Sur la propriété où ils trouvent du travail, ils nous partagent leurs rêves et leur labeur. A travers des dialogues simples et ciselés, on ressent la tension qui monte progressivement tout au long du roman, jusqu’au dénouement final, implacable.
Comme dans les raisins de la colère Steinbeck dépeint la société de son époque, dénonçant le système économique et politique antisocial. En quelques pages il nous fait ressentir une telle empathie envers les personnages, avec un langage juste et touchant. Ce livre est un pamphlet contre ce capitalisme qui a mené à la Grande Dépression, contre le racisme, pour l’amitié et la différence. Un roman à lire d’une traite, comme un concentré génie pour saisir toute la subtilité de Steinbeck.
« Dans l'âme des gens, les raisins de la colère se gonflent et mûrissent, annonçant les vendanges prochaines. »
Dans l’expérience d’un lecteur, il est des oeuvres dont on ne sort pas indemne. Ce livre en fait partie. Ayant une portée historique, « Les raisins de la colère » traite avec réalisme des conséquences de la Grande Dépression américaine dans les années 1930.
La famille Joad cultivent les terres d’Oklahoma depuis plusieurs générations, et subissent de plein fouet une sècheresse historique. Vivant dans une grande misère, il se font expulser du jour au lendemain par leurs propriétaires. Commence alors un long périple vers la Californie, tous entassés sur un vieux camion. Avec la promesse d’une vie meilleure, l’espoir d’enfin manger à sa faim et de retrouver sa dignité. Une fois sur place vient la désillusion, amère et cruelle.
Le roman alterne avec habileté entre les chapitres évoquant l’histoire de cette famille forte et courageuse, et ceux plus généraux sur la migration des « Okies » le long de la fameuse route 66, victimes d’un phénomène migratoire inédit jusqu’alors. Ces chapitres sont pour Steinbeck un plaidoyer contre le capitalisme et ses effets délétères sur les êtres humains.
John Steinbeck écrit une histoire universelle et intemporelle. La simplicité apparente et la grande place des dialogues ne cachent pas la profondeur de ce récit que l’on sent enrichie de son expérience. Son envie de témoignage est prégnante. Les dialogues, truffés d’expressions argotiques et sans commentaire, entrainent l’empathie du lecteur qui assiste en direct à l’histoire, comme un spectateur.
Mais quand il décrit la nature, Steinbeck devient poète. Il nous fait ressentir dès les premières pages du roman le souffle brûlant du vent, la terre aride et dévastée, la couleur de feu du ciel. Ce roman juste et réaliste prend aux tripes, j’ai terminé la lecture totalement sidérée.
Je ne connaissais pas les éditions Tishini : belle découverte !
Cet ouvrage est une pure merveille : le texte de Steinbeck et les dessins de Dautremer !
Le texte et les illustrations correspondent plus à un roman graphique qu’à une bande dessinée classique. Les illustrations de Rébecca Dautremer alternent entre les grands dessins pleine page et les tout petits dessins qui se suivent sans qu’il n’y ait de cases. La lecture est cependant facile et suit, à mon avis, le roman de John Steinbeck. À noter qu’il y a beaucoup de phrases originales (en anglais), à côté des personnages, écrites en rouge.
Un très beau roman graphique (bravo à Rébecca Dautremer et aux éditions Tishina !) à lire absolument et, même mieux, si vous êtes fan de John Steinbeck, à avoir dans sur ses étagères et aussi à offrir !
https://pativore.wordpress.com/2023/09/26/des-souris-et-des-hommes-de-john-steinbeck-et-rebecca-dautremer/
« Je dois dire une chose - je n’ai jamais pris autant de plaisir à mon travail qu’avec ce livre. Je suis aussi excité que le jour où je l’ai commencé. Mon énergie n’a pas décru. Je continue de penser que c’est LE LIVRE, en ce qui me concerne. Auparavant, j’ai toujours gardé quelque chose en réserve pour plus tard. Ici, je ne retiens plus rien. Ce n’est pas un entraînement pour l’avenir. C’est ce pourquoi je me suis entraîné. »
Du 29 janvier au 1er novembre 1951, Steinbeck écrit quotidiennement à son ami et éditeur Pascal Covici alors qu’il entame la rédaction d’À l’est d’Eden. Sur les mêmes cahiers, il rédige d’un côté la lettre et de l’autre le roman. C’est comme un échauffement avant de se mettre au travail. Il fait part à son ami de ses intentions, de ses doutes, de ses difficultés, de son enthousiasme pour son roman mais partage aussi de nombreux détails de sa vie privé et de son quotidien.
Dès le départ, Steinbeck conçoit son futur livre comme son grand roman. Il en est totalement exalté ! Il désire que tout le livre soit en contrastes, en équilibre et souhaite « maintenir une tonalité très basse et laisser le lecteur apporter l’émotion ».
D’un côté tout semble extrêmement maîtrisé et réfléchi et de l’autre le livre semble imposer son propre rythme à l’auteur. Steinbeck se fait gouverner par ce livre qui grandit tout seul et par la nature mouvante de l’histoire.
On découvre que le titre de départ n’était pas celui que nous connaissons. D’abord « La vallée de Salinas » puis « Ma vallée » puis « Le signe de Caïn » avant d’arriver à celui qui s’imposera et restera à la postérité.
Si vous avez lu le roman, vous serez très intéressé par le long et profond questionnement de Steinbeck sur le sens du mot « timshel », sur sa traduction exacte.
On perçoit parfaitement toute la rigueur de l’écrivain. Rigueur qui va se nicher dans les moindres détails comme l’importance du crayon (sa taille, sa longueur) et de l’utilité du taille crayon. On découvre d’ailleurs la quantité astronomique de crayons qu’il use!
Et puis il y a le Steinbeck intime. Celui qui se fait du soucis pour ses deux garçons, celui qui semble parfaitement heureux de partager la vie d’Elaine.
On le découvre aussi bricoleur, constructeur, inventeur, se réjouissant par exemple d’avoir enfin un établi de menuisier.
Une lecture indispensable pour les fans de
Steinbeck qui donne furieusement envie de relire ce chef d’œuvre avec ce nouvel éclairage sur les intentions de l’auteur.
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