"Je voulais écouter du rap opaque, dans des bras déraisonnables ».
L’auteur part du roman jamais terminé de BALZAC, finalement intitulé Les paysans, qui devait s’intituler Qui terre a, guerre a.
Il s’appuie également sur le film Jeremiah Johnson Sydney POLLACK.
Pourquoi un tel grand écart de temps (un film de 1972 et un roman de 1844) et de support ? Pour nous parler de la guerre, inévitable, toujours.
Ce livre se situe entre le roman et l’essai philosophique.
J’ai parfois eu un peu de mal à suivre l’auteur dans ses bonds historiques, mais j’ai surligné pleins de passages éclairants.
Un écrit qui raisonne tristement avec l’actualité, mais une lecture éclairante sur le besoin humain de faire la guerre.
Des citations :
Conclusion de Balzac : la fin de l’aristocratie, c’est la parcellisation des sols et l’appauvrissement assuré pour les nouveaux propriétaires.
A propos de l’agriculture moderne : Plutôt que de collectivisé au nom du peuple – cette entité humaine à qui ont promet tout et qui n’a droit à rien – on procède au regroupement des parcelles par rachat, spoliation ou concussion. Le regroupement n’est plus obtenu au nom de l’Etat mais par une entente entre possédants sous l’autorité d’une nouvelle aristocratie financière, portant haut l’étendard de grands groupes agro-industriels.
…mais il est possible aussi d’acheter les caméras – rachat en cours, sur le point d’être bouclé, car ce n’est pas avec l’espérance d’un bénéfice juteux que les hiérarques se partagent la presse te l’audiovisuel. Pour imposer la loi du silence rien de mieux que le tintamarre inepte des chaînes.
… l’agriculture n’est rien d’autre que la continuation de la guerre par d’autres moyens.
Car depuis sa victoire sur le règne animal, depuis qu’il s’est assuré la suprématie terrestre, l’homme n’a plus pour ennemi que son pareil, que son double. Plus d’incarnation supérieur devant qui se soumettre, s’incliner.
Voilà ce que c’est que d’avoir préféré le jour à la nuit. Avec la myriade d’étoiles on contentait tout le monde. Avec l’élection du soleil, c’est le dieu seul.
Je suis plus homme que toi, par quoi on s’octroie une parenté divine. Aton fils du Soleil et César descendant de Vénus.
L’image que je retiendrai :
Celle souvent répétée de la bande jaune du pantalon de Jeremiah Johnson, résidu de la vie d’en bas, celle des hommes qui se font la guerre et que Jeremiah a fuit.
https://alexmotamots.fr/qui-terre-a-guerre-a-jean-rouaud/
Constellation : groupe apparent d'étoiles qui présente un aspect reconnaissable.
En ayant simplement fait partie de leur vie à un moment ou à un autre, Arthur Rimbaud aura donné à nombre de ses contemporains une postérité littéraire.
C'est sur ces personnes plus ou moins anonymes, sur ces lieux traversés par "la comète Rimbaud", que Jean Rouaud jette un éclairage dans son essai La constellation Rimbaud.
Arthur Rimbaud, l'éternel adolescent poète, irrémédiablement associé à Verlaine, élevé au rang d'icone, qui aura pour toujours 17 ans.
Et pourtant, le poète n'a plus écrit de poésie après l'âge de vingt ans.
Et pourtant, sa liaison avec Paul Verlaine n'aura duré que quatre ans, mais quatre années de passion destructrice et une fin explosive, qui marquera les esprits, le fameux coup de feu qui envoya Verlaine en prison.
Jean Rouaud offre une vision élargie de la constellation Rimbaud, ses camarades d'enfance, son maître d'école, les artistes qu'il aura croisés à Paris, à Bruxelles, les négociants rencontrés en Afrique. Et bien sûr, sa famille, Vitalie, la mère vers qui il retournera à chaque problème de santé, Isabelle, la sœur qui prendra soin de lui durant les derniers mois de sa vie, mais aussi son père absent et Frédéric, le frère renié.
Il nous abreuve d'anecdotes diverses : le chanteur Hubert-Felix Thiefaine dénonçant une erreur sur la tombe de la mère de Rimbaud, les spéculations sur l'identité de Jef Rosman, un peintre ayant laissé une œuvre unique derrière lui...
Cette suite de noms, de lieux, peut parfois paraître indigeste à qui veut tout savoir, tout retenir, mais il n'en est pas moins fascinant de suivre "la comète" dans ses expéditions.
J'ai beaucoup apprécié cet essai complet et instructif, ainsi que le ton très personnel de l'auteur, dans lequel on peut parfois percevoir une certaine malice ou ironie.
Magnifique !
Une écriture délicieuse et enveloppante dès les premières pages pour cette fresque familiale qui véhicule la vie de l’ensemble des provinciaux français de classe moyenne d’après-guerre, inscrite en Loire Atlantique (ex Loire inférieure), une population rurale aux valeurs perturbées par la modernisation et la société de consommation qui, dès les années 1970, déferle comme un raz de marée dans les foyers, ici symbolisé avec humour par la 2CV du grand-père devenue archaïque et supplantée par la fameuse déesse, élégante, rapide et confortable.
Le texte est bâti sur des souvenirs et file à la vitesse des associations d’idées en réunissant des personnages séparés par la mort et le temps.
Des objets et des écrits trouvés dans les affaires d’un grand-père décédé va alimenter un passé familial non-dit, non su, dont l’histoire de la mort de son frère Joseph, grand oncle de l’auteur, dans l’horreur des combats de la Meuse en 14-18 à Commercy et dont le corps sera retrouvé dans la boue des tranchées mais emmêlé sans pouvoir le différencier d’un autre squelette, des os qui seront ramenés pêle-mêle à la sœur, en partie dans des boîtes de madeleines en fer…
Un frère qui aura eu les poumons brûlés par les gaz chimiques dans une guerre absolument inutile.
Cette sœur, Marie, dévote devenue une grenouille de bénitier de village qui ne s’est jamais remise de la mort de Joseph alors que son autre frère Émile mourrait à son tour,en 1917.
Jean Rouaud a un talent sans pareil pour décrire et dénoncer cette cruauté gratuite qui a eu lieu mais surtout il témoigne des conséquences au sein des familles et fait résonner en chacun de nous ces souvenirs fragmentés légués à nos imaginations.
On est tous rattachés à une longue lignée familiale mais aussi historique.
Les champs d’honneur, c’est ça aussi, nos constructions individuelles avec une mémoire portée génération après génération.
Nous livrant une histoire partielle de sa famille, l’auteur organise son livre sur trois décès successifs : Le père, le grand-père et la tante Marie, convoquant ainsi la famille, les traumatismes et la mémoire intime dont un passage tendre et drôle sur les vacances dans le Var avec le grand-père.
Il commence son livre par : « C’était la loi des séries… »
Jean Rouaud était alors âgé de onze ans.
C’est un texte chargé de poésie.
Le style est virtuose pour décrire le paysage provincial, celui de la Loire dite « inférieure » qui va connaitre l’urbanisation, la fermeture des petits commerces et artisans dans les bourgs tels les tailleurs, profession du grand-père ou les horlogers, profession du père, et même les femmes au foyer deviendront de plus en plus rares… On déménagera de fermes en appartements en se rapprochant des villes, en désertant la campagne.
Parmi les quelques digressions talentueuses de l’auteur, je ne m’attendais pas à absolument savourer, délecter, de nombreuses pages sur la pluie. La virtuosité du détail est abasourdissante.
C’est un livre réaliste et magnifique fait d’une écriture ample, limpide, élaborée sans en ressentir le travail magistral, avec des mots justes, des phrases percutantes tout en douceur et tendresse.
Un livre rare, méritant d’avoir été honoré et reconnu par ses pairs qui lui ont décerné en 1990, un prix Goncourt largement mérité.
Un plaisir de lecture absolu.
Petit clin d’œil personnel sur la PAL (Pile à Lire) que j’appelle chez moi la MAL (Montagne à Lire) et qui est un sujet souvent traité sur notre site Lecteurs.com : Ce livre à l’écriture fabuleuse attend sur une étagère que je le lise, ce, depuis 30 ans !
Un roman choisi sur les rayons de la médiathèque car il allait me permettre de progresser sur plusieurs des challenges de lecteurs de Babelio auxquels je me suis inscrite cette année.
Mais cette fois quelle belle surprise que ce beau texte qui retrace l’histoire d’une famille, évoquant tour à tour des voyages cocasses des grands parents en deux chevaux asthmatique, ou plus tragiquement la mort de deux oncles pendant la première guerre mondiale.
Un roman attachant, avec des personnages plus vrais que nature, qui chacun, à leur façon, ont dû surmonter es décès qui ont profondément modifié le cours de leur vie …
Un roman qui nous entraîne de la Loire Inférieure (devenue Atlantique depuis) jusqu’au Var (pour une escapade croustillante du grand-père) jusqu’aux champs de bataille de la première guerre mondiale à la recherche du corps d’un frère, que le même grand-père, plus jeune, ramena jusqu’au caveau familial.
Un roman plein de tendresse et de douceur !
Un prix Goncourt bien mérité !
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