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Le jeune Gilles Mauvoisin était comme un étranger qui avait débarqué un jour d'un cargo qui sentait la morue et que, sa valise en main, un bonnet de loutre sur la tête, il avait erré sur les quais de La Rochelle.
Un orphelin, une longue silhouette de deuil, de retour à La Rochelle et légataire universel de son oncle Octave, l'homme le plus puissant et les plus craint de la ville.
L'irruption inattendue de ce jeune homme va bouleverser les équilibres de la bourgeoisie établie. Un "Syndicat" qui dirige la ville depuis la mort d'Octave Mauvoisin.
Alors, il faut impérativement contrer les volontés de cet héritier au risque de tout perdre. Car Octave "tenait" ces bourgeois par des dossiers très compromettants.
Ma première incursion chez Simenon et j'avoue avoir été séduit pas la qualité littéraire de ce roman .
Au delà de l'intrigue policière, Simenon prouve qu'il est un écrivain majuscule avec style et critique sociale de grande qualité.
Une oeuvre puissante qui dépeint un société bourgeoise corsetée et aux agissements malsains.
La bibliographie de l'auteur est impressionnante mais je vais y revenir sans aucun doute.
De la grande littérature .
Pietr-le-Letton est le premier Maigret d’une longue série. Ici, on est loin de l’ambiance des romans policiers de nos jours : pas d’ADN, pas de fichiers informatisés, pas d’équipe de choc telle qu’on peut s’y attendre. Dans ce roman, on est dans les années 1930 au 36 quai des orfèvres, dans un monde d’homme, dans un monde où l’enquêteur arrive sur la scène du crime et regarde le corps de la victime sans prendre de gants, et dans lequel, pendant le service l’enquêteur boit une « mousse », histoire de s’hydrater et tente de garder le poêle de chauffage bien allumé pour se réchauffer. Bienvenue dans le monde de Maigret.
Ce contexte-là doit être prise en compte dès le départ. On n’est pas dans la dentelle ici. Maigret est un personnage très charismatique, très sûr de lui, un peu égocentré mais touchant à la fois. Dans cet opus, Maigret va être touché personnellement dans son enquête et il va alors avoir à cœur de résoudre rapidement son enquête. Simenon parle très peu de la femme de Maigret dans ce premier roman, mais il laisse deviner que sa femme est complètement tournée vers le bien-être de son mari et est en admiration de son mari.
L’enquête en elle-même est particulière. Maigret reçoit un télégramme dans lequel est retranscrit la description d’un homme recherché : Pietr-le-Letton. Il doit arriver par l’Etoile du Nord, le train reliant Amsterdam à Paris, en passant par Bruxelles. Les connaisseurs reconnaîtront notre Thalys actuel. Maigret fonce à la gare pour le cueillir. Il pense le reconnaître parmi les passagers qui descendent du train mais il s’aperçoit qu’un groupe se forme devant un wagon. Un meurtre a été commis. Est-ce l’homme qu’il recherche ? Maigret en doute, va voir le corps et fait rapidement demi-tour pour poursuivre la personne qu’il a croisé plus tôt. S’en suit alors une filature.
Je n’ai lu qu’un autre tome en plus de celui-là mais j’ai l’impression que le schéma se répète : le lecteur suit Maigret, au sens premier du terme. L’auteur nous donne très peu d’informations, si bien qu’on ne comprend son cheminement qu’à la fin, lors de l’affrontement entre notre inspecteur Maigret et le criminel. Et là, tout est plus clair.
Le roman est court : c’est d’autant plus appréciable car le nombre d’informations qui sont distillés tout au long du roman pourrait perdre le lecteur. Le dénouement final nous rappelle parfois des détails qu’on aurait pu oublier. J’ai été surprise par cette fin, même si j’ai été davantage surprise par d’autres fins. Avec Maigret, j’apprécie le langage du début XXème siècle, le monde d’avant (heureusement révolu). J’apprécie aussi de redécouvrir Paris d’antan. Et j’adore aussi me laisser surprendre par cet enquêteur un peu lourdaud mais terriblement attachant à la fois !
A suivre !
Le docteur Alavoine écrit depuis sa cellule de prison à « son » juge, le juge d’instruction Cormeliau qui a considéré que son crime n’était pas prémédité, et qu’il a eu lieu dans un moment de responsabilité atténué. Le docteur Alavoine veut lui prouver, au contraire, que ce crime était prémédité et a été fait en pleine connaissance de cause. Et pour le lui prouver, il lui raconte ce qui l’a amené à passer à l’acte.
Il s’adresse donc à lui, qu’il considère comme quelqu’un de proche, vu que ce juge a passé beaucoup de temps avec lui, pendant 6 semaines. Il en vient même à faire un parallèle entre sa propre vie et celle qu’il imagine du juge.
Le docteur Alavoine s’intéressait très peu à son procès car selon lui, ce qui a été rapporté et discuté ne représentait pas la réalité, telle que lui la voit. Même la lecture du rapport d’accusation a été pour lui difficile à entendre dans le sens où ce n’étaient que des mensonges.
Son avocat lui a reproché son attitude au cours du procès, puisqu’il était tellement détaché qu’il réagissait parfois à outrance.
Je trouve qu’il s’agit d’une analyse intéressante sur ce que vivent les accusés lors d’un procès criminel. Le ressenti de ce qu’a vécu l’accusé et sur ce que la justice tente de mettre à jour est toujours différent, avec des nuances plus ou moins importantes. La justice retient des éléments pour tenter de reconstituer une histoire, une version nécessairement subjective mais ne rendant pas nécessairement la réalité des choses, telles que l’ont vécu les personnes directement concernées.
Il s’agit d’une belle histoire d’amour à la base que je nuancerais tout de même de certains passages (très) problématiques. La période à laquelle le roman a été écrit et publié n’est pas une excuse en soi. J’ai été freinée par des faits relatés de manière complètement innocente, complètement banalisés, mais qui ne le devraient pas.
Malgré tout, j’ai bien aimé l’écriture de cet auteur. J’avais entendu parler de ce livre par une lecture du début du roman par Guillaume Gallienne, sur un podcast, sur une radio (je ne sais plus laquelle à vrai dire, il me semble que c’était France Inter). J’avais été complètement hypnotisée par la voie de l’acteur et par ce début de roman qui promettait beaucoup. Depuis, j’ai découvert les Maigret. Je compte lire l’intégralité des Maigret avec grand plaisir.
Vers une année 2024 colorée de l’univers de Maigret avec ces textes et ambiances si typiques de Simenon ? En tout cas, remettre sur le haut de la pile (PAL) des premiers exemplaires de la collection « Le monde de Maigret » un peu oublié sur les étagères polars est un vrai plaisir pour le lecteur.
« Maigret à l’école » permet à Simenon de brosser des portraits, des relations interpersonnelles diverses et des ambiances d’un village rural qui flirtent avec ses « romans durs », montrant une certaine porosité dans l’œuvre de Simenon.
L’instituteur d’un village charentais est venu à Paris pour demander de l’aide à Maigret qui bénéficie désormais d’une solide réputation. L’instituteur est convaincu, à juste titre, qu’on va l’arrêter pour un meurtre dont il est innocent. Son histoire va suffisamment intéresser Maigret pour que (avec l’envie d’aller manger des huitres et boire du vin blanc) il décide de prendre quelques jours de congés pour aller enquêter même s’il n’est pas sur son territoire, mais sa réputation lui laisse ouvertes les portes de la gendarmerie … mais pas forcément des habitants du village.
La morte était receveuse des postes et une méchante, médisante et perfide femme dont tout le village se méfiait et la provoquait aussi. Elle est morte d’un tir d’une carabine d’enfant 22 long rifle à plombs avec une pénétration dans l’œil d’un plomb qui a atteint le cerveau : angle particulièrement improbable … mais néanmoins mortifère.
Nombreux sont les enfants qui ont une carabine dans le village, dont le fils de l’instituteur … qui est arrêté suite au témoignage d’un jeune garçon qui, lors d’une deuxième audition, a affirmé avoir vu l’instituteur sortir de sa remise alors qu’il avait déclaré ne pas s’y être rendu.
Maigret va devoir décrypter les mensonges et silences des uns et des autres et mieux cerner les témoignages et relations des enfants (on ne divulgachera pas plus dans cette chronique).
Maigret n’aura pas pu manger ses huitres (pour cause de « morte-eau ») mais aura démêlé le nœud des multiples mensonges et silences dans ce village où laisser accuser un « étranger » (l’instituteur n’était pas du village) est considéré comme moins pire que de rompre une certaine solidarité du territoire.
Du bon Simenon et du grand Maigret.
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