La revue de presse d’Abeline Majorel
La revue de presse d’Abeline Majorel
Ce livre écrit à quatre mains, nous raconte l’histoire de James Foley, alias Jim que nous connaissons tous car il a été pris en otage par des jihadistes et exécuté de manière terrible, puisque la vidéo de sa décapitation, et le cliché (arrêt sur image) montre son corps décapité allongé dans le désert, la tête posée sur le torse.
Dans la première partie : on assiste au face à face avec Alexanda Kotey l’un des quatre geôliers de James Foley, tous les quatre Britanniques devenus djihadistes, que les otages avaient surnommés les Beatles (Beat…) et les « émotions » contradictoires, ambivalentes, que Diane ressent vis-à-vis de lui.
Ensuite, retour à 2014 avec le parcours de Jim, sa passion pour le journalisme, sa volonté de se rendre sur les lieux en guerre pour témoigner, les tractations au sujet des rançons les associations de soutien et pour finir le procès d’un deuxième geôlier.
On notera que Kotey avait décidé de plaider coupable, ce qui n’est pas le cas du second qui se dit innocent et se réfugie dans la religion, l’endoctrinement islamiste surtout, pour rejeter la faute sur l’Occident.
La gestion de la prise d’otages par l’administration Obama m’a vraiment étonnée, pour ne pas dire choquée. En effet, le Président n’a pas semblé éprouver beaucoup d’empathie pour Diane Foley ; la famille s’est retrouvée bien seule pour aller à la quête des informations tenter de faire libérer Jim, dans un combat perdu d’avance, puisque j’ai appris, au passage, que les USA ne payaient jamais de rançon car dans leur esprit cela revenait à cautionner les preneurs d’otage et les enrichir, contrairement à ce qui se passe en Europe.
Nous n’avions toujours pas reçu d’appel téléphonique d’un quelconque responsable officiel, et pourtant, à la télévision, notre président annonçait la nouvelle au monde entier.
Diane a appris la mort de son fils via les réseaux sociaux, le président Obama lui ayant téléphoné après… je trouve cette femme, admirable, par son courage, son obstination, son opiniâtreté même. Comment peut-on trouver la force d’accepter de rencontrer l’homme qui a exécuté votre fils ? Comment envisager de pardonner ? Je ne pense pas que j’en aurais eu le courage à sa place.
Diane Foley est très croyante, elle prie pour son fils, pour elle, pour les coupables pour les autres en général, ce qui a choqué certains lecteurs. Mais, quand on se retrouve dans une telle situation, on se raccroche à ce qu’on peut, et sa foi l’aide à avancer, c’est beaucoup plus dur quand on est athée ou agnostique.
Ce livre m’a beaucoup plu, je suis passée par toutes les émotions, la colère vis-à-vis de l’intégrisme religieux et des comportements, des propos des deux Beatles, l’incompréhension devant l’administration Obama, l’admiration pour Diane…
J’ai été émue aussi par l’attitude du pape François qui a appelé Diane, lui manifestant toute sa compassion alors qu’il était lui-même dans la souffrance (son frère a été victime d’un accident pendant la période de détention de Jim) et également quand la nouvelle de son assassinat est parvenue…
J’avais eu un coup de cœur pour le précédent livre de Colum McCann : « Apeirogon » et j’ai retrouvé la même émotion, pour « American Mother » mais à un degré moindre, probablement parce que l’omniprésence de la foi heurte mon esprit un peu trop cartésien.… ce qui explique la note.
Je pourrais parler encore longtemps de ce livre puissant, mais mon ressenti est au-delà des mots, alors je vous encourage à le découvrir…
Un grand merci à NetGalley et aux éditions Belfond qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur.
#AmericanMother #NetGalleyFrance !
https://leslivresdeve.wordpress.com/2024/03/01/american-mother-de-colum-mccann-et-diane-foley/
Ce que peut l’amour maternel.
Dieu du ciel disaient mes ancêtres, mais où cette femme a-t-elle puisé la force de rencontrer le bourreau de son fils ? Comment a-t-elle réussi à braver l’opinion des siens et de son entourage pour leur prouver que de discuter avec ce meurtrier allait faire revivre son fils ? Oui, on est bien en face de l’IMPENSABLE.
Pas étonnant que Colum McCann ait disparu si longtemps du monde littéraire. Pour lui aussi je me suis posé une question : comment a-t-il eu le courage de « déranger » cette mère, de lui demander de partager ses sentiments sans tomber dans le voyeurisme. Dans tous les cas, il y est arrivé, et pour les deux d’ailleurs ; elle a partagé en totalité ses émotions et lui n’a fait que sonder son âme.
Et moi, pourquoi avait-je ressenti le besoin de me plonger dans cet impensable ? Parce que cela complétait et faisait un tout avec deux inoubliables lectures : « V13 » d’Emmanuel Carrère et « Le droit d’emmerder Dieu » de Richard Malka. Je me suis dit qu’avec le témoignage de cette mère hors-norme je m’approcherais un peu plus de l’explication du mot barbarie. Il n’en a bien sûr rien été. Je ne comprendrais jamais cette psyché humaine qui vogue entre schizophrénie et paranoïa ; ce qui n’est au fond pas si important. Ce qui l’a été, c’est que j’ouvre un peu plus les yeux, que je prenne la mesure de ce que certaines personnes endurent et ceci même si je ne peux pas leur prendre leurs blessures, leurs douleurs. Détourner le regard serait non seulement une faute, mais ce serait bien plus, ce serait un affront.
L’écriture de Colum McCann est structurée de telle manière à ce que le lecteur soit plongé dans ce face à face avec l’impression d’être présent dans cette salle d’audience, d’avoir le sentiment qu’il se sera approché du bourreau, de sa victime ainsi que des personnes impactées par cet horrible crime. Je pourrais relever de très nombreuses citations mais en transcrivant l’efficace incipit, la note sera donnée.
« Octobre 2021, Alexandria, Virginie
Elle se réveille dans l’obscurité de l’hôtel. Des lampadaires ici et là, à travers les rideaux fins. Là-bas, au loin, WashingtonD.C.-ville des vérités, des demis-vérités, des doubles vérités, des mensonges. Une vérité certaine : son fils n’est plus depuis sept ans, et ce matin elle va s’assoir avec l’un de ses assassins.
Cette perspective lui noue les nerfs à la base de la nuque. Ce n’est pas seulement qu’elle ignore ce qu’elle attend de lui : c’est aussi qu’elle ne sait pas bien ce qu’elle attend d’elle-même. Une symphonie confuse. Compassion. Vengeance. Ressentiment. Pitié. Deuil. Grâce.
Toute la nuit elle a prié, encore plus que d’habitude. Elle a imploré les plus hautes instances. Sondé les ténèbres autant que la lumière. Issa des heures à se demander comment appeler cet homme. Alexandra, Alexe, Alex. Kotey, monsieur Kotey. Non. Pas monsieur. Pas ça. »
L’histoire
James Foley que sa mère appelle Jim, a été décapité en Syrie. Journaliste pur et dur, passant sa vie à essayer de montrer l’endroit et l’envers des décors, il sera un moment otage parmi d’autres otages. Il fera partie de ceux que Daech a kidnappé afin de prouver au monde entier que rien ne les arrêtera plus. Humanitaires, journalistes et autres innocents vont payer de leur vie pour assouvir leur haine. Il meurt
Diane, la mère créé une association, se démène comme un petit diable pour qu’on n’oublie ni son fils, ni ces horreurs commises au nom d’Allah.
En face d’elle, Alexanda Kotey, fin trentaine, ex-britanique, fils d’une mère psychothérapeute, trois filles en Syrie, une en Grande-Bretagne, enrôlé par Daech. Il plaide coupable dans 8 accusations de meurtres. Par ce biais il n’aura pas besoin de passer par la case procès.
Le ministère propose à Diane de discuter deux jours avec Kotey, en quasi tête à tête, avec juste 6 avocats autour d’eux. Diane accepte. Elle va lui poser des questions profondes et tellement évidentes « comment Allah voici le mettre de non-combattants ? Pourquoi les journalistes ? Les humanitaires ? ». Elle aimerait aussi savoir où son fils est enterré. Oui mais au début de l’entretien « cet homme était une mer gelée ».
Colum Mccann nous fera également revivre l’été 2014 avec tout ce que cela peut comporter mais aussi juin 2022 lorsque Diane recevra deux lettres du bourreau de son fils.
Le livre deux est un peu longuet ce qui explique mes trois étoiles seulement.
Citations :
« Il y a une immoralité du monde contre laquelle elle doit se dresser avec ses moyens, aussi limités soient-ils. Même si ça ne marche pas. Elle est prête à s’y risquer. Risquer la gêne. Risquer le ridicule. Parfois on sait où est le bien. Parfois on suit son instinct. Si on ne fait rien, rien ne se fait. »
« Le plus intelligent est celui qui sait qu’il ne l’est jamais : là est la contradiction ».
A l'idée de lire ce livre je dois bien avouer que j'avais peur. Peur d'être submergée par les émotions car ce récit est celui d'une atrocité.
Diane Foley est en effet la mère de James Foley, un journaliste américain qui fut torturé pendant 2 ans avant d'être décapité devant les caméras.
Colum McCann nous raconte cette femme, cette mère qui quelques années plus tard, lors du procès de l'assassin de son fils a décidé de lui faire face.
Ce récit débute sur ce moment, très éprouvant, puis revient sur l'histoire de ce fils, des moments d'angoisse après son enlèvement mais aussi et surtout sur la gestion (déplorable) du gouvernement américain de ses otages à travers le monde...
C'est un récit qui m'a émue comme je m'y attendais mais qui m'a également mise en colère. Ce qu'a vécu cette famille, comme tant d'autres n'est pas acceptable.
On pourra penser que cette femme a fait preuve d'une grande force, mais peut-on vraiment l'être quand on a perdu un enfant? Je l'ai pour ma part trouvée digne et extrêmement courageuse. La plume de Colum McCAnn nous transmet merveilleusement bien les émotions de Diane et il est très difficile d'y rester indifférent.
Colum McCann, avec Diane Foley, revient sur l’événement qui bouleversa le monde entier, la décapitation du journaliste, free lance américain, Jim Foley. La vidéo circula sur YouTube, postée par l’Etat Islamique en août 2014, puis rapidement supprimée.
À cette époque, personne n’avait imaginé que ce groupe terroriste, né en Irak, profiterait des troubles de la guerre civile syrienne pour s’y implanter. La même année, le groupe se déclare califat, englobant l’Irak et la Syrie. La décapitation filmée, au retentissement mondial, marque le début de l’utilisation de la terreur pour établir un État islamique régi par la loi islamique.
Derrière cette vidéo de propagande, d’une violence insoutenable, American Mother force à regarder le visage des bourreaux. Surnommés Beat-le (de battre, en anglais), les trois criminels ont été identifiés. Deux d’entre eux encore vivants, Alexanda Kotey et El Shafee El-Sheikh, ont été ramenés aux USA pour y être jugés.
Colum McCann se rapproche de Diane Foley lorsqu’il constate que, sur une photographie, John Foley lisait un de ses romans. La volonté de Diane, de faire quelque chose de la mort de son fils, a rencontré celle de l’écrivain, qui voulait construire un ouvrage non fictionnel, rédigé à partir d’échanges. American Mother est parue en premier en France. Les autres parutions suivront dans le monde.
Le combat d’une mère
American Mother est construit en trois parties. Dans la première, Colum McCann raconte la rencontre entre un des tueurs et la mère du journaliste.
Alexanda Kotey : Alexanda signifie protecteur du peuple et Kotey, vient du Ghana, une bonne âme. Ex-citoyen britannique, mais ex-soldat de Daesh. Voilà sept ans que Jim Foley a été tué.
La mère de Jim, déjà âgée, décide de répondre favorablement en rencontrant l’un des responsables de la mort de son fils, un aspect juridique que la loi propose.
Alexanda Kotey reconnaît avoir rédigé les dernières paroles que Jim Foley fut obligé de lire avant d’être décapité. Il plaide coupable de huit chefs d’accusation. Cette démarche pouvant réduire sa peine, il se propose de parler aux familles des victimes, avant le verdict. Diane Foley a été la première à accepter de le rencontrer en octobre 2021.
La deuxième partie permet à Diane Foley de partager l’histoire de son fils et de la lutte de sa famille à travers son quotidien bouleversant. On découvre ses recherches pour trouver sa voie, les conceptions de son métier de journaliste et sa soif de rendre compte de l’aspect humain en temps de guerres. Mais, on suit aussi Dianne Foley dans ses démarches pendant l’emprisonnement puis après la mort de son fils.
Pour la troisième, Colum McCann reprend la description des années des procès et le quotidien de Diane. Le combat de cette femme, active jusqu’à essayer de se frayer un espoir dans les méandres des autres libérations puis dans la création de la James W. Foley, la fondation, est terriblement touchant.
Un femme lumineuse
À l’inverse des gouvernements européens, le gouvernement américain ne négocie pas la libération des otages civils. Les États-Unis ont la politique de chercher à assurer la libération des otages par d’autres moyens, notamment par des opérations militaires ou des actions diplomatiques. Jim Foley n’a pu bénéficier, comme d’autres prisonniers avec lui, d’une libération.
On comprend le titre, American Mother : À la fois, mère courage, mère colère mais surtout mère amour, Diane Foley, tel que nous la présente Colum McCann, est un portrait de femme inoubliable. Cette femme a tenu tête au président Obama et continue son combat pour la sécurité des journalistes et la défense des otages.
La religion est une notion constante dans American Mother. Véritable soutien pour Diane Foley, la notion du pardon y est largement questionnée. Mais, c’est aussi celle de la manipulation, du repentir et celle de la foi que Colum McCann interroge sans jamais oublier de rappeler, par les faits, la profonde humanité de cette femme.
Le récit d’Américain Mother nécessite du temps, tellement la description du quotidien de cette femme émeut, bouleverse par la justesse du propos, par la simplicité avec laquelle elle livre son ressenti, ses craintes mais aussi ses colères.
En conclusion,
Le travail du romancier est particulier. L’écriture de Colum McCann est uniquement au service de cette femme, devenue son amie. Il estompe sa présence pour décrire, donner la parole, rendre compte sans jamais livrer une impression ou un ressenti personnels. Il y a du respect et de l’affection dans cette mise au service de ce combat.
American Mother de Colum McCann avec Diane Foley est un ouvrage à découvrir autant au niveau sociologique, politique qu’humain. Il rend compte d’un travail au plus profond de soi pour dépasser la vengeance et accéder, non pas au pardon, mais la reconnaissance de l’autre, comme un humain à part entière, dans sa vérité, y compris avec ses facettes les plus noires.
Chroniques illustrées ici
https://vagabondageautourdesoi.com/20
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