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Le purgatoire, c'est-à-dire cet intervalle de temps qui court de la mort d'un écrivain à son retour sur la scène littéraire, apparaît souvent comme un passage obligé, comme le cruel prix à payer avant que l'un d'eux se rappelle à la mémoire des hommes.
D'ailleurs, quelle que soit la durée dudit purgatoire, la postérité prend quelquefois des détours inattendus. Ronsard ainsi a été remis au goût du jour par Sainte-Beuve qui passa lui-même à côté d'un contemporain capital : Baudelaire. « Je serai compris en 1935 » indiquait Stendhal, montrant par là qu'au fil des décennies, loin des engouements passagers, une œuvre littéraire peu à peu finit par livrer au public son vrai visage.
« Le cas d'antonin Artaud m'a retenu plus longtemps, écrit de façon péremptoire Georges Pompidou. On se sent coupable de lui refuser « cette existence même avortée » qu'il demandait à Jacques Rivière pour une œuvre si tragiquement restée en-dessous de son auteur. » A travers ces quelques lignes, dans son « Anthologie de la poésie française », celui-ci, d'un trait de plume, le congédie avec une certaine brutalité. Aucun de ses textes ne sera jugé digne d'y figurer. Avait-il raison ?
Non, car depuis bien des lustres, Artaud n'a cessé d'être lu et relu.
Le purgatoire de Georges Perec a-t-il jamais existé ? Romain Gary, alias Emile Ajar, a-t-il tant soit peu été oublié ? Même l'espace de quelques années, Victor Hugo, le grand Victor Hugo, a-t-il connu un semblant de désaffection ? Je ne le crois guère. On peut de la sorte s'interroger sur le bien-fondé de ce concept pour le moins élastique. Quand une formule en effet souffre de trop d'exceptions, ne conviendrait-il pas, en dernier examen, d'en abandonner l'utilisation ?
En outre, il n'est point rare que sous d'autres latitudes, le renom d'un écrivain contredise les « vérités » de sa patrie d'origine. « Vérité en deça des Pyrénées, erreur au-delà » se plairait à affirmer Pascal..
Jean-Edern Hallier, que suivait un parfum de scandale et dont la mégalomanie était quasi proverbiale, semble quant à lui, depuis sa disparition, être recouvert d'une ombre épaisse. S'agit-il, là encore, d'une forme de purgatoire ou, terrible destin littéraire, des prémices d'un oubli définitif ?
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