
Trois grands fauves est le troisième roman d’Hugo Boris. Très remarqués, ses précédents ouvrages, chacun d’un genre différent, ont à chaque fois été primés.
L’écriture de ce dernier ouvrage très visuel trouve indéniablement sa source dans son expérience de réalisateur.
Cet exercice biographique concis et percutant, fait partie de la sélection finale du Prix du Roman FNAC 2013.
Dressant le portrait des trois figures historiques que représentent Georges Danton, Victor Hugo et Winston Churchill, Hugo Boris élabore leur biographie sur un mode très personnel d’où émane leur dimension hors norme, véritable fil conducteur de ce roman.
Leurs épreuves, leur parcours, leur personnalité, leur besoin de défier la mort ont-ils façonné ces grands hommes ? Sont-ils les constituants pour générer des personnalités hors du commun ?
Partant à chaque fois de leur enfance, de leur environnement familial, de leur notoriété professionnelle, l’auteur élabore les portraits de ces monstres sacrés. Sont-ce les péripéties de la vie qui les ont rendus exceptionnels ? Est-ce leur personnalité qui les a menés si loin ?
Probablement les deux ; dotés de cet acharnement à rester en vie malgré les épreuves ou la maladie, malgré les blessures de l’enfance et les deuils, ils possédaient une capacité hors norme à entrer en résilience et à défier la mort.
Parlant de Churchill : « Il ignore l’instinct protecteur de la peur. A dix-huit ans, il a manqué plusieurs fois d’y rester. [….] Commotions cérébrales et coma n’ont pas eu raison de son énervement à vivre. Le danger exerce sur lui un attrait irrésistible. »
Avec originalité et subjectivité, l’auteur s’amuse à leur trouver une filiation.
Construit en trois chapitres chronologiques évoquant chacun un personnage, il est à chaque fois fait référence au précédent, créant ainsi un lien inédit mais cohérent. Ainsi pour aborder la biographie de Winston Churchill, il est mentionné en tête de chapitre : « Où l’on remercie Danton et Hugo de leurs efforts en concluant que mourir de son vivant est encore le meilleur moyen de vivre plus longtemps. »
Un triptyque passionnant où la dimension humaine et la petite histoire priment, instaurant une proximité spontanée avec ces monstres sacrés par l’évocation de leurs failles, de leurs erreurs tout en mettant en exergue leur opiniâtreté face aux évènements. Mais génies en leur genre, ils n’en demeurent pas moins des personnalités écrasantes pour leur entourage et notamment leurs enfants.
Hugo Boris possède un véritable talent de conteur, usant d’un vocabulaire foisonnant et d’un style alerte, pour nous offrir trois biographies hautes en relief, loin d’un académisme désincarné.
Ancré dans la réalité, c’est un réel profil psychologique qu’il dresse de ces personnalités, les fixant dans un quotidien historique et familial. Tout le paradoxe et l’habileté de l'écrivain est d’en extraire là toute leur dimension exceptionnelle.
Hassina MIMOUNE
Trois grands fauves, Hugo Boris, Belfond, (2013)
Photo : BorisHugo@PatriceNormand