
Longtemps rare en France, le thriller politique est en passe de devenir une véritable mode saisonnière. Pour Netflix, qui vient de s’installer sur le marché français, c’est même une évidence. La première décision du site de vidéo à la demande par abonnement américain ?
Lancer la production de « Marseille », inspirée de sa série à succès « House of Cards », sur la corruption politique dans le Sud de la France. Et si le polar politique n’en est qu’à ses balbutiements dans la fiction audiovisuelle française, il gagne de l’ampleur dans l’édition hexagonale – quoique toujours moins ancré que dans la littérature anglo-saxonne.
Jusqu’à présent, il s’agissait surtout de s’emparer de thèmes politiques (la montée de l’islamisme dans « La Tentation de la défaite » d’Antoine Vitkine, les scandales politico-financiers dans « Lorraine connection » de Dominique Manotti) ou pour quelques acteurs de l’arène de s’échapper de leur réalité (Eva Joly dans « Les Yeux de Lira » ou Jean-Louis Debré, grand amateur de polars, dans « Jeux de haine »). À l’exception de l’excellent « Dans l’ombre », écrit en 2011 par deux anciens conseillers d’Alain Juppé, les auteurs ne se concentraient pas forcément sur l’essence même du pouvoir.
C’est justement le sujet au cœur de « L’Emprise », de Marc Dugain. Connu pour sa biographie mouvementée d’Egard Hoover (« La Malédiction d’Edgar), l’écrivain décrit l’impitoyable rivalité entre le leader de l’opposition, Philippe Launay, et son concurrent, Lubiak, utilisant la politique comme un moyen plutôt qu’une fin. Si les affaires ont toujours existé, elles semblent, pour Marc Dugain, prendre le pas sur la politique elle-même. Aussi jouissif que la lecture des pages intérieures du « Canard Enchaîné ».
Dans « L’Ange Gardien », Jérôme Leroy prend une perspective encore plus pessimiste, quasiment « ellroyenne », en décrivant manipulations d’Etats et barbouzeries en tout genre dans une France en pleine décadence. Heureusement, le récit évite de sombrer dans la paranoïa par une certaine distance ironique et poétique bienvenues. En attendant une éventuelle adaptation audiovisuelle, on se plonge dans ces pages qui dépeignent un état de psychose permanente à peine caricatural...