
Les récits biographiques, fantasmés ou non, marquent généralement les rentrées littéraires : en septembre dernier, contée sous la plume de Frédéric Beigbeder, la brève idylle entre Oona O’Neill et de Jerry Salinger avait largement contribué à diviser lecteurs et critiques. En ce début 2015, parmi les 353 auteurs français livrant au monde leur contribution littéraire, au moins quatre se sont réapproprié la vie d’un autre.
Dans « Tu seras un raté, mon fils », le grand spécialiste des portraits à thèse Frédéric Ferney se penche ainsi sur le parcours intellectuel et psychologique de Winston Churchill. Le critique littéraire, animateur de feu « Le Bateau Libre » sur France 5, y démontre comment celui qui deviendra l’un des grands héros de la Seconde Guerre mondiale a été façonné par le mépris cinglant de son père.
Autre icône croquée cette année ? James Dean, dans « Vivre Vite », de Philippe Besson. Soixante ans après la mort tragique de l’acteur, l’écrivain construit son récit en convoquant les actrices Pier Angeli et Elizabeth Taylor, ou encore Mildred Dean, la mère adorée de James Dean, disparue également trop tôt. Une multiplicité d’approches qui permettent d’appréhender la fugacité d’une existence et « la luminosité d'un regard »...
À la relecture des mythes, Jérôme Garcin préfère remettre dans la lumière un oublié de l’histoire, comme il le fit déjà en 1994 dans « Pour Jean Prévost ». Dans « Le Voyant », il rend ainsi un hommage saisissant à Jacques Lusseyran, écrivain-résistant et survivant de Buchenwald, auteur dans la clandestinité du formidable « Et la lumière fut », récemment exhumé des limbes de l’édition.
Enfin, c’est une autre figure méconnue de la guerre qui a inspiré le dessinateur Fabien Bedouel et le scénariste Patrice Perna dans « Kersten, le médecin d’Himmler ». Masseur thérapeutique d’origine finlandaise exerçant dans toute l’Europe, Felix Kersten soigna pendant la guerre les maux de dos du bras droit d’Hitler, jusqu’à devenir son confident : il usa alors de son influence pour faire libérer des milliers de prisonniers de guerre et de juifs déportés. Un vrai personnage de roman dont Fabien Bedouel et Patrice Perna tirent une épatante bande dessinée en ligne claire.
Timothée Barrière
La chronique : "Tu seras un raté, mon fils !"