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Romance nerveuse de Camille Laurens

De la carpe et du lapin

Romance nerveuse de Camille Laurens

Dans son nouveau roman, Camille Laurens raconte avec courage une histoire d’amour peu flatteuse entre deux être totalement désassortis et interroge plus profondément le lien qui fait ou défait les relations entre les êtres.

 

 

 

 

 

 



Une écrivaine de 46 ans s’entiche d’un paparazzo de 35 ans qui, sur tous les points, semble son opposé : mal dégrossi, infidèle, sans vergogne, biberonné aux musiques de Christophe Maé ou Balavoine quand la narratrice n’écoute que du classique. Cet amant magnifique auprès duquel elle se sent malgré tout intensément femelle, est capable du meilleur comme du pire : lui dire je t’aime puis l’insulter, ou l’appeler pour lui montrer son caca comme un petit garçon à sa maman.

Il y a du reste beaucoup de psychanalyse dans ce texte dont le sujet fait immanquablement penser à un autre livre. Celui de Christine Angot, autre grande prêtresse de l’autofiction, qui racontait dans Le Marché des amants (Seuil, 2008) son histoire baroque et grotesque avec Doc Gynéco.

C’est le premier roman que Camille Laurens publie depuis 2007, date à laquelle son éditeur Paul Otchakovsky-Laurens l’a congédiée de sa maison d’édition POL après une polémique aussi violente qu’inattendue : à cette époque, Marie Darrieussecq publie Tom est mort chez ce même éditeur, un roman dans lequel la narratrice raconte la mort de son bébé.

Camille Laurens y reconnaît des pans entiers de son livre paru en 1995, intitulé Philippe, qui relatait la mort de son enfant quelques heures après sa naissance. Elle dénonce ce qu’elle appelle un plagiat psychique. Les médias littéraires se déchaînent, Darrieussecq riposte et l’affaire se conclut par l’éviction de la fauteuse de troubles de la maison d’édition qui la publie depuis 17 ans.

Plus de deux ans après les faits, les blessures sont encore vives : le vrai sujet de Romance nerveuse est en fait la réponse affective et argumentée de Camille Laurens. Romancière d’autofiction depuis plusieurs années, l’auteur ne pouvait que s’inspirer de sa propre vie pour son livre. Elle explique comment elle a vécu la « trahison » de son éditeur, cette période qui a fait refluer dans sa vie beaucoup de douleurs mêlées d’un affreux sentiment d’injustice. Le lecteur a-t-il envie de revenir sur cet épisode qui le concerne finalement si peu ? Chacun jugera.

Mais il semble que la deuxième manche de la lutte fratricide entre écrivains ait déjà commencé : Marie Darrieussecq publie également à cette rentrée un livre dont le titre, Rapport de police : Accusations de plagiat et autres modes de surveillance de la fiction, dispense de tout commentaire.

Karine Papillaud

Romance nerveuse, Camille Laurens (Gallimard), 2010
 

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