
Il y a des familles qui se transmettent le talent de génération en génération. Dans la lignée des Sardou, le fils Romain est l’une des plumes les plus curieuses et originales du roman français. Quitte Rome ou meurs est une séduisante adaptation des Lettres à Lucilius, l’œuvre du philosophe romain Sénèque.
Marcus, un jeune patricien turbulent qui n’a pas sa langue dans sa poche, est banni de Rome par Néron qui veut sa peau. S’échappant dans les provinces romaines, il garde un lien secret et épistolaire avec le vieux philosophe Sénèque tout au long de son périple. C’est ainsi que commence une correspondance initiatique pleine de sagesse, que Sénèque publiera sous le nom des Lettres à Lucilius.
C’est en tout cas la version proposée par Romain Sardou pour répondre au mystère de la création de ces fameuses lettres et de cet énigmatique Lucilius qui ne figure dans aucun livre d’histoire. Prolongeant le texte de Sénèque, dont il a reproduit fidèlement une bonne part du contenu épistolaire, il imagine ensuite la vie d’un Lucilius, alias Marcus, assagi qui finit par revenir à Rome.
Capable de transformer en thriller passionnant n’importe quelle histoire, qu’elle provienne de la physique quantique ou des guerres du Moyen Age, l’auteur parvient à créer le suspense avec une matière réservée habituellement aux sages étudiants de faculté : pourquoi Marcus est-il réellement parti ? Pourquoi Sénèque a-t-il accepté de se suicider ? Qui était véritablement Néron ?
La fiction, doublée d’un esprit d’analyse et d’une perspicacité réjouissante comblent avec une véracité troublante les lacunes de la transmission historique.
Karine Papillaud
Quitte Rome ou meurs, Romain Sardou (XO Editions), 2009