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Que s’est-il passé dans la vie littéraire au mois de mars ?

La revue de Presse littéraire du mois de mars

Que s’est-il passé dans la vie littéraire au mois de mars ?

Le salon du livre parisien, Livre Paris, qui ouvrait son édition 2017 sur le Maroc en qualité d’invité d’honneur, et accompagnait la semaine de la langue française et de la francophonie dont Bernard Pivot était le parrain. Il n’y a peut-être jamais eu autant de caméras et de journalistes au salon du livre que cette année, et ce n’est pas le passage des différents présidentiables qui a électrisé le plus les foules, mais le passage de Nabila, venue dédicacer son livre de « mémoires » intitulé Trop vite (Robert Laffont).

 

Il en faut donc pour tous les goûts et pour toutes les lectrices, puisque les femmes sont encore et toujours les plus grandes acheteuses et dévoreuses de livres. Selon la dernière étude publiée par le Centre National du Livre, les femmes sont en effet, celles qui à 30% considèrent lire beaucoup et dans les 90% de français lecteurs, les femmes se déclarant lectrices sont 93% soit 4% de plus que les hommes. Elles utilisent aussi de plus en plus sur tablettes, passant de 14% à 22% à lire sur ce format. Alors, pour rendre hommage aux lectrices nombreuses, et parce que mars est le mois de la Journée Internationale des droits de la Femme, notre revue de presse sera consacrée aux auteures féminines, c’est dit !

 

Il en est une qui a incarné la voix des femmes, c’est Colette, à qui Le Figaro littéraire consacre un dossier, pour la sortie de Colette et les siennes de Dominique Bona (Grasset). Sous la plume de Françoise Dargent, l’académicienne évoque un épisode peu connu de la vie de celle qui écrivait dans son lit avec ses chats : le moment où «  Marguerite Moreno, la comédienne classique, Musidora, la coqueluche du cinématographe, Annie de Pène, la journaliste tout-terrain » viennent vivre sous le toit de la grande dame en 1914. « Alors que leurs hommes sont partis, dans un Paris où il n’y en a d’ailleurs plus beaucoup, ces quatre femmes décident de vivre en communauté, formant ce que Colette appelle un ‘phalanstère’. » Le but de cette biographie est de donner à lire une Colette différente : « Ce que j’aime lorsque je travaille une biographie, c’est de ne pas considérer le personnage tel que nous le considérons aujourd’hui mais d’assister à son éclosion. La vie d’un être humain est un chemin. Pour Colette, il a été très chaotique. Ça secoue, ça tangue, de la campagne bourguignonne à la scène de l’Alcazar et au jury Goncourt. Aujourd’hui, on la voit comme un monument national, comme la grande dame décorée et honorée que l’on consultait à tout propos, mais Colette ne fut pas cela tout de suite. Elle l’est devenue peut-être même à son corps défendant. » C’est une femme éprise de liberté que décrit Dominique Bona et qui en cela seulement et non au sens politique fut féministe, puisque Colette se réservait  de « donner le fouet ou le harem » aux suffragettes.

 

 

Féministe sûrement, Rosa Montero, l’auteur de La chair (éditions Métailié), confie à Charlotte Persicaire dans Transfuge : «  J’ai toujours détesté les femmes misogynes. » Cette voix majeure de la littérature hispanophone cherche à sublimer la vie au travers de son héroïne, Soledad, qui atteignant la soixantaine, fuit l’obsession de la mort qui la hante. Rosa Montero met en scène la force des corps et de la survie. «  Soledad est une figure de femme qui affronte l’idée de la mort. La plupart des romans contemporains questionnent la mort, mais je crois que les miens, plus encore que les autres, sont obsédés par cette question. En cela, on peut dire que j’écris des romans existentialistes : le passage du temps y est palpable, les ravages du temps sur les psychés. Soledad, je crois qu’elle est venue à moi, pour m’apprendre à vieillir. (…) J’ai commencé à écrire sur le vieillissement du corps dans mon premier roman, j’avais 28 ans. Aujourd’hui, près de 30 ans plus tard, je garde les mêmes obsessions. Notre emprisonnement dans cette chair, qui nous fait souffrir et nous tuera, mais qui nous fait aussi toucher la gloire, la sensualité, l’amour. C’est étrangement la chair qui nous permet de nous croire par instants éternels. » 

 

L’éternité à quoi cela ressemblerait ? Peut-être à une Traversée en eau claire dans une piscine . C’est le titre fantastique des textes de Cookie Mueller que l’on découvre aujourd’hui en France, grâce aux éditions Finitude. Philippe Azoury nous parle dans Grazia de cette «  indispensable au New York des années 80, actrice, performeuse et écrivain » : «  une définition de la vie de Cookie : une série d’emmerdes maison, d’histoires à dormir debout qui devraient vous démolit mais qui, bien racontées, deviennent des leçons de vie. La morale de Cookie, c’est qu’on vit pour apprendre. Et qu’on apprend pour raconter. … Dans Traversée, elle décrit un viol par un maboul semi-impuissant. Il faut la voir transformer cette merde en littérature. Ca nous rappelle Virginie Despentes, sa petite sœur punk de France. Cookie fut donc actrice, icône, gogo, dealeuse. Elle fut surtout un grand écrivain américain, ce pays où la littérature est un ring et où il faut savoir s’y battre. Cookie : anagramme K.O » Survivrons-nous à la lecture de ce punch ?

 

Des coups, celle que Bernard Pivot appelle « l’insoumise des îles Solovki » dans le Journal du Dimanche, a su en prendre et en rendre, jusqu’au dernier coup de feu.  Evguénia Iaroslavskaïa-Markon a écrit son autobiographie, quelques jours avant d’être fusillée, à 29 ans, au goulag des îles Solovki. Sous le titre de Révoltée  (Seuil), choisi par Olivier Rolin, ce texte est enfin traduit en français. « Issue de la bourgeoisie juive de Petrograd, Evguénia est une intellectuelle attirée par la révolution bolchevique puis, très vite, déterminée à la combattre. Le cynisme et la politique répressive du nouveau pouvoir ne pouvaient qu’indigner une femme acquise à toutes les libertés, y compris à l’anarchie. » Une passionnée qui épouse le poète Alexandre Iaroslavski qu’elle adore: «  Absolu de la passion amoureuse comme de la passion politique qui semblent comme fusionnées dans le feu de cette courte vie «  écrit Olivier Rolin dans son indispensable préface. » Amputée des pieds suite à un accident de train, elle continue à se battre, à voler pour survivre et se révolter, jusqu’à être déportée, après la mort de son mari. «  Dans sa prison des îles Solovki, elle a rédigé elle-même le procès-verbal de son interrogatoire (…). Bravant ses juges et la mort, Evguénia a dit et écrit que « les bolcheviks ont mis la classe ouvrière ‘sous tutelle’, comme on le fait de personnes mineures ou de faibles d’esprit » et qu’elle appelle de ses vœux des «  insurrections paysannes » et la désertion de l’Armée rouge pour constituer «  une force armée antibolchévique. » » Nous ne pouvons que partager l’exclamation admirative comme un sifflement de Bernard Pivot : «  Quelle femme ! » Une femme, une vraie, une en chair en os et en colère. Loin des princesses et des contes de fées.

 

Fairy tale, traduction de « conte de fées », c’est le titre du premier roman d’Hélène Zimmer (P.O.L) qui a impressionné Gérard Lefort dans les Inrocks. C’est Cendrillon mais version Téléphone plus que Disney que nous dépeint la talentueuse jeune romancière : « Fin du conte de fées et début d’un cauchemar domestique où une jeune femme Coralie se démène entre un compagnon au chômage, trois gamins chiants, un boulot de vendeuse de merde dans un quelconque Gifi, et le tourment des finances. Pour sauver ce qui lui reste de meubles, Coralie a un projet qui passe par le pire : inscrire Loïc, son compagnon, à Fairy Tale, une télé-réalité sur les chômeurs. » Hélène Zimmer boxe ce portrait de femme avec un art accompli de scénariste, dans «  des dialogues où la langue est chargée de mots crus pour se venger de la biendisance ambiante et des injonctions publicitaires ». L’amour des femmes n’est pas toujours tendre.

 

 

Et la réponse du berger à la bergère pour ne laisser aucun sexe de côté. Dans Marianne, Nathalie Azoulai loue un « jouissif duo de mufles » : Nicolas Fargues et Igor Gran, les deux auteurs d’écrire à l'élastique (P.O.L.). «  Une correspondance mesurant les différences entre un homme marié et sédentaire et un séducteur compulsif et nomade se convertit en roman épistolaire machiavélique fomenté par deux écrivains complices, cyniques et concentrés sur le même objectif : ferrer Léonor, une jeune femme séduite par Nicolas juste avant son départ pour la Nouvelle-Zélande qu’Iegor s’engage à lui envoyer par avion. » C’est sous la plume de Nicolas que vous lirez cette formule : «  La femme stupide ? Un produit d’utilisation simple, ludique et 100% recyclable. »  Un peu comme un livre donc. Que les femmes s’empresseront d’ouvrir, car c’est ainsi qu’elles sont dangereuses. Surtout pour les auteurs. Choisissez-les bien et bonne lecture !

 

© Abeline Majorel

 

 

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