
Les récompenses ont été attribuées : le 28 novembre 2014 à la Maison de la Radio, Lire dans le noir a distingué pour la sixième année consécutive, les lauréats de l’année de publication 2014. Mapuche de Caryl Ferey, lu par Feodor Atkine (Gallimard, coll « Ecoutez lire »), est le gagnant en catégorie nouveautés. Parmi les classiques revisités cette année, c’est La Promesse de l’aube de Romain Gary, lu par Pierre Hervé pour le même éditeur qui remporte la palme. En catégorie « documents », la récompense est attribuée au biologiste Pierre-Henri Gouyon lisant son Evolution aux éditions De vive voix, une mise en questionnement de la théorie de l’évolution à la lumière des recherches scientifiques récentes. Enfin, le prix Lire dans le noir « jeunesse » est donné à Halb, l’autre moitié, de Sigrid Baffert, lu par Elsa Zylberstein publié aux éditions des Braques.
Pour en savoir plus sur les Prix
C’est en 2002 que les éditions Lire dans le noir ont été créées par des journalistes de Radio France. Ils rendaient alors hommage, à travers l’aventure de cette association, à Julien Prunet, un journaliste de France Info disparu brutalement quelques mois auparavant à 29 ans. A l’époque, il était encore compliqué de trouver des nouveautés dans le secteur des livres audio, bien moins développé que dans le nord de l’Europe. C’est l’axe éditorial choisi alors par l’équipe, rejointe ensuite par d’autres maison d’éditions sonores. Peu à peu, Lire dans le noir a pris de l’ampleur, en publiant d’abord ses propres livres audio, puis en devenant le label que le milieu du livre salue désormais unanimement.
Si, au départ, le livre audio s’adressait à des publics particuliers, les malvoyants ou aveugles, des éditeurs ont compris peu à peu que la lecture oralisée s’accordait judicieusement aux rythmes contemporains, en particulier urbains, faits d’interminables heures de transport ou d’ emplois du temps qui requièrent de faire plusieurs choses en même temps. Le livre audio permet ce que la lecture silencieuse interdit.
Le livre audio, un livre comme les autres ?
Oui, ou presque. Comme la librairie traditionnelle, le secteur marque le pas dans un paysage économique qui tarde à s’adapter aux nouveaux supports, que sont par exemple le applications, et à surmonter la crise de la librairie. Mais les ventes progressent chez les principaux éditeurs sonores. Ce sont les nouveautés qui séduisent le plus, face à un fonds classique moins séduisant. Ce qui n’empêche pas l’éditeur Frémeaux & associés de vendre La Gloire de mon père à 2000 exemplaires cette année, ni Naïve livres d’écouler La Vie matérielle de Marguerite Duras lue par Laure Adler à 2400 exemplaires (sources Livres-Hebdo). Outre la littérature, le bien-être est une cible très intéressante pour le livre audio, avec des thématiques zen, philo ou encore méditation en plein essor.
De nouvelles tendances
Les applications pour téléphones ou tablettes sont, et c’était prévisible, un nouvel enjeu. Book d’oreille a sorti ses versions ipad et android l’an passé et publie son application iphone cet automne ; Lire dans le Noir a déposé ses éditions sonores chez Audible, la plateforme d’Amazon, quand Audiolib faisait figure de pionnier avec une première proposition dès mars 2010 sur iphone et ipod touch. Les éditions Gallimard quant à elles, misent sur le téléchargement et la lecture en streaming, bientôt suivies par les éditions Naïve livres.
Chez Naïve encore, on a envie de varier l’offre et cette fois-ci, c’est le liseur qui étonne. Dans sa nouvelle collection, plus d’auteur ou de comédien, mais des personnalités, qui lisent le livre qui a marqué leur vie. Eloge de l’Ombre, de Junichiro Tanizaki, lu par Angelin Preljocaj, vient ainsi d’être élu meilleur livre audio de l’année, par la rédaction de « Lire ».
Le livre audio est forcément tributaire de la politique éditoriale du livre papier, mais ses marges d’évolution sont prometteuses, compte tenu que son ouverture au grand public est assez jeune encore. Le « Young adult », secteur en plein développement chez les éditeurs, qui concerne les lecteurs de 13 à 30 ans, fait partie des enjeux d’Audiolib qui publie déjà la série Hunger games, déclinée du livre papier au cinéma. Des perspectives encourageantes qui pourraient l’être plus encore si les synergies papier-audio se renforçaient sur les lieux de vente de la librairie traditionnelle.
Karine Papillaud