Christine Claude écrit depuis toujours. De Montmartre, où elle est née jusqu'au Bénin, en passant par les États Unis, la Bretagne comme les Antilles et avant de s'enraciner au Maroc, Christine Claude sillonne le monde, découvrant des univers variés : théâtre, galerie d'art et d'encadrement. Une vie riche de rencontres humaines singulières, qui ont sans aucun doute inspiré son recueil "Les pieds de la femme boutonnière" qui rassemble trois nouvelles : "Les pieds de la femme boutonnière", "Du jasmin sur la gouttière" et "La faute à Lilou", trois récits empreints d'un humanisme coloré et lumineux.
"La femme boutonnière" donne la parole à Milo, coursier qui sillonne Paris depuis plus de 10 ans. Il se souvient de sa rencontre avec Ma et de son étonnement quand elle lui a déclaré être boutonnière : "Des boutonnières, mais qu'est-ce que ça pouvait bien être ? Elle vendait des trous avec du tissu autour, je ne voyais pas bien… mais ça m'amusait… une femme boutonnière". C'est que Ma est une fille peu ordinaire : elle peint la devanture de sa minuscule boutique de la rue Lepic dans une explosion de couleurs vives et ses pieds lui rappellent ses trahisons, lui imposant le port d'étranges bottines… préambules à de régulières disparitions qu'elle explique par un panneau apposé à la devanture de sa boutique "Fermeture momentanée pour cause d'absence". Et Ma réapparaît, jusqu'au jour où son absence dure longtemps… très longtemps.
"Du jasmin sur la gouttière" raconte la vie joyeuse de l'immeuble du 14 de la rue des Belettes. Quand Habiba, infirmière humanitaire, part en mission, Ahmed, le gardien la regarde monter dans son taxi, attentif et prévenant, car "En réalité, il était bien plus qu'un gardien, il était le garant de cet équilibre joyeux, le grand ordonnateur du feu, l'allumeur de calumet, la nounou des galopins en mal de parents, le confident de la mégère, le maître queux des soirées d'été.".
Habiba se souvient de ces amitiés qui se sont tissées et ont grandi en même temps que le jasmin, de ces coups de gueule qui cimentèrent de profonds attachements. Mais de retour de mission, elle découvre que la crise est passée par le 14 rue des Belettes…
"La faute à Lilou" donne la parole à petite fille. Son papa, est complètement fasciné par Lilou, petite fille géniale de 12 ans dont il est l'impresario. "Il était complètement sous son charme, il y avait de quoi. Ils conversaient, je n'avais rien à dire. Alors, je la fermais, me contenais, bien polie, bien élevée. Je la fermais. Je m'inclinais devant la majesté et le talent de cette petite fille". Si la petite fille souffre de la comparaison avec Lilou et de la complicité qui la lie à son père, elle n'en nourrit pourtant ni colère ni jalousie. Elle trouve même Lilou charmante, Lilou qui a eu une petite enfance difficile, contrairement à elle qui n'a connu que le confort bourgeois. Jusqu'au jour où, de retour de vacances chez ses grands-parents, elle lâche brutalement à son père : "Je suis malheureuse ici". Une phrase fondatrice.
Une écriture intimiste et sensible qui porte en elle l'accent de la sincérité. Milo, Habiba et la petite fille sont trois narrateurs poétiques qui vivent chacun une rencontre particulière qui change la couleur et le cours de leur vie. Christine Claude a trempé sa plume dans l'encre de l'optimisme et de l'humanisme, tricotant des personnages bienfaisants et désintéressés, capables de voir le meilleur chez l'autre. Un moment de lecture rafraîchissant, heureux et généreux.
Agathe Bozon
Les pieds de la femme boutonnière de Christine Claude, éd. Le texte vivant, (2012)
chère...excusez
Merci à Agathe Bozon pour sa lecture attentive des petites nouvelles... c'est toujours une jolie gratification, un cadeau et un encouragement dans la poursuite de l'écriture.