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" Les mains vides ", plus qu’une enquête, plus qu’un polar !

Un roman noir social

" Les mains vides ", plus qu’une enquête, plus qu’un polar !

Les mains vides de Valerio Varesi (Agullo), journaliste et diplômé de philosophie, cet auteur de nombreux romans, nous fait plonger avec cette nouvelle enquête du commissaire Soneri au cœur de la société italienne.

 

 

Deux de nos membres du Cercle livresque nous livrent leur avis.

 

 

L’avis de Marie Kirzy

Une chaleur caniculaire s'abat sur Parme, reflet parfait de l'enquête poisseuse aux mille visages que va mener l'inspecteur Soneri sur le meurtre d'un commerçant, Galuzzo. La mort de ce dernier n'est en fait un détail presque insignifiant d'un projet plus vaste dans lequel la principale victime est la ville de Parme elle-même.

 

Très nettement, ce qui intéresse Valerio Varesi dans cette enquête, ce n'est pas de définir qui a tué, mais plutôt pourquoi, de s’interroger sur les causes du mal.

 

J'ai beaucoup apprécié le personnage de l'inspecteur, un double de l'auteur, attachant, ancré à de saines valeurs, profondément humaniste. Il va découvrir les coupables mais surtout les mécanismes qui l’empêchent de révéler la vérité.

 

Si on retrouve bien les codes du polar Les Mains vides contourne le genre en s'inscrivant dans le roman noir social, voire moralisateur faisant le constat des changements néfastes à l'œuvre dans nos sociétés. A mesure que l'enquête avance, le roman est traversé d'un pessimisme croissant, d'une amertume, d'une mélancolie profonde en mettant en scène un nouveau type de crime, déguisé en sociétés financières et immobilières aux montages imparables, remplaçant la vieille garde de la pègre classique. Le basculement de Parme vers la perdition devient une métaphore de la déroute de l'Italie actuelle, un corps affaibli prêt à s'attraper n'importe quelle maladie. Les truculents dialogues entre l'inspecteur et Gerlanda le vieux mafieux usurier sont exemplaires à ce titre.

 

« Ne vous faites pas avoir par les gens respectables : les industriels, les entrepreneurs, les banquiers, les avocats ... Ils utilisent tous les mêmes méthodes, ils possèdent tous une sauvagerie sans limites, sinon, ils ne seraient pas là où ils sont. Les affaires te font régresser au stade primitif, là où la raison sert uniquement à organiser la violence. Ou bien à se garantir des complices en politique, grâce à l'argent qui ouvre toutes les portes. Le reste, les rites de notre prétendue démocratie ne sont que de la dramaturgie, rien d'autre que du théâtre. »

 

 

Tout est juste dans ce polar désenchanté qui pénètre tel un soc dans la réalité contemporaine. J'ai cependant trouvé que la litanie moralisatrice dénonçant le néo-libéralisme voyou assez répétitive, elle aurait pu être allégée sans pour autant perdre en force d'indignation. 

 

 

© Marie Kirzy

 

 

L’avis de GeorgesSmiley

« Jamais il ne s’était senti à ce point les mains vides ». Les Mains Vides, étrange ce titre. Il fait penser à l’opération Mani Pulite, en français Mains Propres, celle qui fit croire, un instant, que l’Italie pouvait s’affranchir de ses mafias. Souvenons-nous de ce qu’écrivait Enzo Biagi :

« Tout a commencé en février 92, lorsque, armé d'un mandat d'arrestation, une voiture au gyrophare bleu s'arrêtait au Pio Albergo Trivulzio et en emmenait son président, Mario Chiesa, homme du Parti Socialiste Italien voué à l'ambition de devenir maire de Milan. Ils le prirent tandis qu'il empochait une enveloppe de sept millions de lires, la moitié de son dû, du propriétaire d'une petite entreprise de nettoyage, qui comme d'autres entrepreneurs, devait verser sa commission, 10 % de l'appel d'offre qui, dans ce cas, se montait à 140 millions de lires. »

 

Enzo Biagi écrivait aussi : « J'ai toujours rêvé de devenir journaliste… J'imaginais que c'était un vengeur capable de réparer les torts et les injustices

 

Si je commence par « Mains propres » et Enzo Biagi, c’est pour vous dire que le commissaire Soneri est un peu à la police parmesane ce qu’Enzo Biagi était au journalisme, un rêveur idéaliste, un redresseur de torts, un rempart contre la barbarie. La mort d’un commerçant du centre-ville, vraisemblablement battu à mort, va le conduire à une enquête darwinienne où le suspect principal, celui que tout désigne comme le principal prédateur de la cité, est en passe d’être dévoré à son tour.

 

J’ai beaucoup aimé la description de l’atmosphère de Parme au mois d’août, écrasée sous la canicule. Valerio Varesi a le talent de vous faire transpirer, suffoquer avec ses personnages et regretter la fraîcheur d’une cave.

 

Et l’intrigue ? L’enquête, me direz-vous ? Parce que dans un policier, l’enquête, les suspects, les coupables, les rebondissements, ça compte, non ? Pas d’énigme à la Agatha. On demeure dans un certain classicisme wallenderien de bon aloi (lente progression de l’enquête nourrie par les assistants, relations compliquées avec l’autorité judiciaire et la presse), mais les adeptes des coups de théâtre et des rebondissements terminaux resteront sur leur faim. L’intérêt de ce roman réside dans son atmosphère sociologique et financière dominée par la description d’une société pourrissant à petit feu dans l’apathie et l’inertie générale.

 

Si vous aimez les policiers réalistes, sans complaisance, ce commissaire nostalgique, qui lutte sans se raconter d’histoires, vous plaira comme il m’a plu. Vous finirez peut-être Les Mains Vides mais avec la conscience tranquille de celui qui a lutté de son mieux, dans un Parme désenchanté, bien loin de celui de Stendhal et de l’idée que s’en faisait Proust.

 

 

© GeorgesSmiley

 

 

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