
Il est tout petit le livre de V.S. Naipaul mais d’une densité remarquable pour évoquer la question des racines, cruciale dans son oeuvre comme dans la question plus générale de l’identité.
Il est né à Trinidad en 1932 mais son ascendance est brouillée. "Je connais mon père et ma mère, mais je ne peux aller au-delà (...). Mon père a perdu son père lorsqu’il était encore bébé. Telle est l’histoire qui m’est parvenue, et tout ce qui remonte si loin n’est qu’une histoire de famille, sujette à des enjolivures ou à l’invention pure et simple, si bien qu’on ne pourrait s’y fier ".
L’aveu est celui d’un homme aujourd’hui âgé mais qui, arrivé en 1950 à Londres pour ses études, avait honte de ses origines et ne s’intéressait pas à la grande histoire des migrations qui mâtinait l’histoire des siens. Le livre commence par cet examen simple, presque clinique qui préfigure l’ensemble du texte. Il part à la recherche d’une Inde qui lui est étrangère, s’attachant longuement à la figure de Gandhi, exilé comme lui, qu’il rencontre lors d’une conférence en Afrique du Sud.
On retrouve dans Le Regard de l’Inde les traits d’écriture de VS Naipaul, un réalisme documentaire allié à une vision satirique du monde. Récompensé par le Prix Nobel de littérature en 2001, Vidiadhar Surajprasad Naipaul le cosmopolite a construit son identité dans l’écriture.
Son oeuvre, déclinée en romans, nouvelles et récits documentaires, a souvent été critiquée pour sa vision pessimiste du colonialisme et du nouveau nationalisme dans le Tiers-Monde : Guérilleros (1975) et À la courbe du fleuve (1979) en témoignent particulièrement.
Karine Papillaud
Le Regard de l’Inde, V.S. Naipaul (Grasset), 2010