
Lauréat à deux reprises du Prix Hemingway de la nouvelle, Jean-Paul Didierlaurent nous livre avec Le liseur du 6h27 (Au Diable Vauvert), un premier roman aux allures de conte contemporain, véritable hommage au livre et à l’écriture. Une fable désopilante et parfois burlesque où l’auteur prend un plaisir jubilatoire à se jouer des mots, des genres littéraires et de la stylistique.
Un véritable phénomène éditorial qui a affolé les éditeurs. Vendu dans plus de 20 pays avant sa parution, celle-ci a même été avancée avant la date prévue, étant donné le "buzz" engendré. Même les producteurs américains s'activent pour les droits d'adaptation audiovisuelle.
Guylain Vignolles s’est vu dès sa plus tendre enfance affublé du ridicule anagramme Vilain Guignol. Il travaille au pilon dans une entreprise chargée de broyer et de recycler les livres invendus. La Zerstor 500, cette machine redoutable dévoreuse de livres, il la côtoie cinq jours par semaine. Mais pour casser cette routine et marquer une forme de résistance, Guylain lit tous les matins dans le RER du 6h27, les quelques feuillets qu’il réussit à sauver de la broyeuse. Peu importe l’absence de cohérence entre les pages, il a un public attentif qui en redemande.
Jean-Paul Didierlaurent possède le talent de transcender cet univers maussade et routinier en créant des personnages burlesques voués à la littérature et qu’elles qu’en soient les raisons. Pour exemple, Giuseppe Carminetti, opérateur en chef dont la broyeuse a dévoré les jambes mais qu’il est certain de retrouver en récupérant les exemplaires de l’édition d’un ouvrage faits avec la pâte à papier le jour de son accident….
Yvon Grimbert, le gardien de l’usine, féru de littérature classique, lui, ne s’exprime qu’en alexandrins tandis que les sœurs Delacôte passionnées par les lectures de Guylain, le sollicitent pour faire des lectures dans la maison de retraite où elles sont pensionnaires. Une population désopilante et attachante dans un quotidien plutôt marqué par la grisaille et la monotonie.
Pourtant, la vie linéaire de Guylain va progressivement prendre du relief avec la découverte d’une clé USB dans le RER. Celle-ci contient soixante-douze documents qui s’avèrent être un journal peu banal ; ces écrits vont donner une nouvelle tournure à sa vie…
Ce conte d’aujourd’hui n’est pas sans rappeler le cinéma de Caro et Jeunet, oscillant entre une réalité morose et une fantaisie désarmante, peuplé de personnages un peu tordus mais optimistes où chaque situation est empreinte d'humanité.
Un roman joyeux, savoureux dont l’écriture imagée se nourrit d’humour et de poésie, un univers qui vous séduit sans hésiter.