
Dans Le jour où ma fille est devenue folle, Michael Greenberg est moins un écrivain qu’un père : il livre un récit humble, inédit, bouleversant sur la maladie bipolaire de sa fille. Voyeurs en quête de trémolos ou de douceurs complaisantes s’abstenir.
Juillet 1996, Sally a 15 ans et son caractère tumultueux vient de trouver un nom au cours d’une attaque aussi fulgurante que violente : psychose maniaco-dépressive. Une secousse qui ébranle cette famille recomposée, reposant la question du lien qui unit tous ses membres. La grande politesse de Greenberg pour son lecteur est de ne pas avoir fait de la maladie l’héroïne du livre, mais la famille elle-même.
Sa fille n’est pas seulement évoquée sous l’angle pathologique mais aussi à travers ses fulgurances, sa poésie et tout ce qui fait d’elle un individu fascinant, singulier, romanesque.
La question de la maladie mentale quitte rarement le domaine réservé de la littérature psychiatrique. Qu’on la décline à travers les noms de ses manifestations ou qu’on la nomme folie, elle met mal à l’aise, comme si rejeter l’humanité des souffrants était la condition sine qua non du bel équilibre social des « normaux ». Michael Greenberg parvient à mettre en défaut ce principe de normalité sans jamais chercher à agresser son lecteur ou à imposer un propos.
Avec beaucoup de simplicité, et une lumineuse intelligence, il apprivoise la question des frontières entre génie et folie, entre marge et normalité. C’est sans doute la raison pour laquelle, ce premier roman de Michael Greenberg, auteur de nombreux récits de voyages et de nouvelles, est un succès international.
Karine Papillaud
Le Jour où ma fille est devenue folle, Michael Greenberg (Flammarion), 2010