
Ils viennent de réaliser un rêve partagé par beaucoup : leur premier roman arrive en librairie.
Un aboutissement ? Le début du parcours, plutôt.
L’histoire commence, en général, par des enveloppes postées avec beaucoup d’espoir. L’aspirant écrivain vient de boucler son manuscrit et le transmets aux maisons d’édition. Un premier geste déjà déterminant. Il faut choisir avec soin l’éditeur dont la ligne éditoriale serait cohérente avec l’ouvrage. On n’enverra pas un roman à l’eau de rose aux éditions de Minuit, ni une réflexion sur le déterminisme constructiviste chez Robert Laffont. "J’aimais le catalogue de la maison Intervalles, qui comptait des auteurs intéressants dans l’univers du voyage. Naturellement, je suis allé vers eux", confirme simplement Guillaume Jan, auteur de Le cartographe, excellent premier roman sorti en mars dernier, qui narre une odyssée dans les Balkans.
Suivent alors les longues semaines d’attente. Voire les mois. Au fil des réponses, la plupart des impétrants recevront des lettres-type de refus. Pour certains, une réponse manuscrite et personnalisée. Car les places sont rares. Pour cette rentrée littéraire de septembre 2011, on compte 74 premiers romans (un chiffre en baisse par rapport à l’an dernier) parmi les 654 à paraître. Or, chaque éditeur reçoit plusieurs milliers de manuscrits chaque année. Un nombre qui croit régulièrement, alors que les ventes de livres baissent. Bref, tout le monde veut écrire, mais les lecteurs se font de plus en plus rares.
Eternel débat : faut-il être pistonné pour se faire publier ?
Pas forcément. La plupart des nouveaux venus sont des "sans-réseau", publiés sur la seule qualité de leur œuvre. Reste que parmi les primo-romanciers, bon nombre ont des liens professionnels, mondains ou familiaux avec la communauté éditoriale. Ce qui peut aider. Mais il arrive aussi que les "pistonnés" soient refoulés. En résumé, le milieu de l’édition n’est ni plus ni moins corrompu que n’importe quel autre secteur culturel. Au moment de la parution, le jeune auteur exulte. "Il y a deux grandes émotions dans tout le processus", continue Guillaume Jan. "Quand le manuscrit est accepté par l’éditeur, et quand on a l’objet pour la première fois entre les mains. C’est l’aboutissement du travail, le livre est derrière soi."
Auréolé de son nouveau statut, l’écrivain est alors pris en photo et, parfois, interviewé. Son livre est recensé sur divers sites internet. Il va en librairie pour l’admirer. Le jeune romancier peut alors rêver de ventes faramineuses. "Il faut vraiment avoir beaucoup d’articles pour être remarqué, pour que la mécanique se mettent en marche et que les ventes décollent", constate l’auteur, dont l’ouvrage a été salué par le Figaro magazine, Livres-hebdo et Be. Sur les 74 auteurs de la rentrée, une toute petite poignée franchira le barrage médiatique. Passée l’euphorie de la parution, au bout de quelques semaines, le nouveau venu revient à la vie normale.
Son livre se vendra à quelques centaines ou milliers d’exemplaires. Il conservera quelques coupures de presse dans un dossier. Et il se remettra à écrire. Sans forcément s’imaginer que son second roman peut être refusé. En effet, une bonne partie des auteurs ne publie jamais de deuxième œuvre. L’année suivante, il faut laisser de la place à ceux qui sortent un premier roman.
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