
Daniel Lacotte est né à Cherbourg en 1951. Ingénieur et docteur en sciences physiques, il est rapidement rattrapé par son amour de l'écriture et des lettres. Une passion qu'encourage Jacques Prévert, qui sera le premier à lire sa prose. Daniel Lacotte a déjà publié plus d'une trentaine de livres (documents, romans, essais, biographies…). Son Dictionnaire des mots retrouvés complète la liste d'ouvrages qu'il a déjà publié sur la langue française.
Comme l'explique Daniel Lacotte dans l'avant-propos "Par définition, une langue qui vit évolue se transforme. Et rien ne l'empêche de puiser aussi dans son patrimoine. Cette idée toute simple (…) m'a conduit à plonger dans une chasse très pacifique aux mots disparus. Ceux qui ne figurent plus dans les dictionnaires usuels de ce début de XXIe siècle. Ceux dont chacun s'est doucement déshabitué. Ceux que l'on a volontairement laissé choir en leur préférant un fringant synonyme badigeonné de modernité provisoire.".
Entre Abadie (n.f., XIXe) et Zoïle (n.m., XVIIIe), ce sont quelque mille mots que Daniel Lacotte a exhumés. Certains totalement oubliés ont épousé la camarde (1). Bien sûr la parlure (2) doit évoluer et loin de l'auteur l'idée de se harpailler (3) contre son évolution.
Chaque année environ 1500 nouveaux mots font leur entrée dans le dictionnaire, fruits de l'apport des nouvelles technologies, de l'évolution sociétale, de l'actualité et des cultures étrangères. En même temps, discrètement, certains mots sont remerciés pour les bons et loyaux services qu'ils ne rendent plus à la langue. C'est dans ce réservoir de mots oubliés que Daniel Lacotte a inlassablement fouillé, menant une chasse systématique dans les dictionnaires d'antan.
C'est non sans humour qu'une fois retrouvé, le mot ressuscite sous la plume de Daniel Lacotte, dans des exemples cocasses d'utilisation qui mettent en scène Robert et Marie-Chantal, dont nous suivons les aventures actuelles avec des mots d'hier.
Ce dictionnaire est une promenade pleine de surprises. On y apprend au détour d'une page que vinaigrette, mot introduit au XIVe siècle, désignait une petite voiture à deux roues (analogue à une chaise à porteurs), tirée par un seul homme. Le lecteur découvre aussi que les Lolita du XIIIe siècle étaient appelées tendrons.
Un lexique analogique permet de rechercher les mots par thématique : agriculture, arbre, architecture, argent, attitude, bateau bavardage, boisson, bruit, calculer, colère, combat, corps humain, courage, délinquance, difficulté, durée, écriture, enfance, ésotérisme, exagération, famille, festin, gentillesse, grossièreté, habillement, hypocrisie, laideur, législation, littérature, maison, malheur, marcher, marine, médecine, mendier, mesurer, météorologie, métier, misère, mort, musique, nature, nettoyer, niaiserie, nonchalance, nourriture, objet, outil, paysage, pédagogie, police peinture, règne animal, religion réparer, repos, respect séduction, sexe, stupéfaction, théâtre, transport, vanité, vêtement, violence, voler.
Cet étonnant dictionnaire est un voyage dans le temps qui donne envie de réhabiliter certains mots oubliés en les saupoudrant au hasard de discussions très actuelles pour tenter de leur offrir une seconde vie.
(1) Camarde : (n. f., XVIe) – Dans sa chanson intitulée "Supplique pour être enterré à la plage de Sète", Georges Brassens (1921-1981) a popularisé le mot camarde, synonyme de mort. Ainsi utilisait-on l'expression imagée "baiser (ou épouser) la camarde" pour exprimer le fait de mourir.
(2) Parlure : (n. f., XIIe) – Dérivé du verbe parler (Xe), la parlure désigne le langage, la manière de s'exprimer. (ex : la parlure distinguée de Marie-Chantal enchante toujours Robert).
(3) Harpailler : (v.pron., XVIIIe) – Il ne fait pas bon se harpailler entre collègues ou amis puisque le verbe véhicule l'idée de querelles très méchantes, aigres, violentes, voire indécentes. (ex : Marie-Chantal ne supporte pas quand Robert et Julie se harpaillent).
Agathe Bozon
Le dictionnaire des mots retrouvés de Daniel Lacotte, éd. l'Archipel, (2012)