
Il y a Houellebecq en France et James Frey aux Etats-Unis. Les Américains ne nous avaient pas habitués à un écrivain de cette trempe, capable de déclencher des scandales pour des questions… de style.
Son précédent livre Mille morceaux avait ainsi défrayé la chronique et scandalisé Oprah Winfrey non parce que James Frey y racontait l’histoire d’un drogué, mais parce qu’il avait ensuite déclaré qu’il n’était pas drogué lui-même et que cet apparent témoignage n’était qu’une fiction.
Le « je » doit-il forcément dire vrai ? En France, la question ne fait pas débat, mais l’affaire a ébranlé le continent nord-américain. Tout a fini par rentrer dans l’ordre et Oprah a pardonné. Jusqu’à ce nouveau roman, L.A. Story, qui a de quoi perturber encore une fois les medias.
James Frey y brosse le vrai-faux portrait d’une ville qu’il connaît bien, Los Angeles, qui représente encore le rêve américain pour tous les migrants. Leur but : venir à L.A. pour devenir célèbre, ou tout simplement réussir.
Dans un texte qui mêle anecdotes historiques, parcours d’immigrants et fictions inspirées de people hollywoodiens, Frey raconte froidement des itinéraires réalistes pavés d’horreurs et parfois de merveilles.
A ceci près qu’un bon quart des chiffres divulgués sont totalement inventés. La presse américaine a foncé droit dans le panneau, à la grande joie de Frey qui revendique le droit absolu à la fiction.
L’écriture est scénaristique, le style dépouillé, les chapitres courts : le texte ressemble à l’époque, il va vite et bombarde le lecteur d’informations. Frey est un auteur majeur qui trouve ses parrains chez Miller, Mailer ou Céline, et s’inscrit dans la lignée des Breat Easton Ellis et Jay McInnerney, ces écrivains américains qui énervent les médias et remettent en cause la société américaine.
Karine Papillaud
L.A. Story, James Frey (Flammarion), 2009