
Haruki Murakami, né le 12 janvier 1949 à Tokyo, a poursuivi des études à l'université de Waseda. Après son premier roman "Le Chant du vent", paru en 1979 au Japon et récompensé du prestigieux prix Gunzo, il s'installe à l'étranger.
De l'Europe aux États-Unis, il se forge une culture cosmopolite qui imprègne son œuvre. En 1995, choqué par le tremblement de terre de Kobé et l'attentat de la secte Aum dans le métro de Tokyo, il revient dans son pays.
1Q84, best-seller au Japon a vu ses deux premiers tomes publiés en août 2011 en France. Le troisième est attendu… par des milliers de lecteurs en mars 2012.
Entre une jeune et séduisante tueuse à gages et un professeur de mathématiques qui se rêve un avenir d'écrivain, Murakami nous tricote une histoire faite de passages. Passage du réel à l'imaginaire, du bien au mal, du merveilleux à l'horreur, du possible à l'impossible… Il nous emmène tout en douceur dans un monde où le pire devient inéluctable.
Violences faites aux femmes, perversité du monde de l'édition, fanatisme religieux… 1Q84 est un roman militant dans lequel on plonge et qui se dévore avidement. Construit sur le mode de l'alternance, le lecteur va et vient d'Aomamé à Tengo.
Aomamé, à la vie sentimentale débridée, tue certains hommes d'une façon particulière et croise une vieille femme avec laquelle elle partage un lourd secret. Tengo, à la vocation d'écrivain frustrée, se retrouve presque malgré lui à réécrire le roman de Fukaéri, une adolescente de 17 ans taciturne dont il découvrira l'histoire.
Ces deux là n'ont a priori rien de commun mais sont les fruits de deux enfances malheureuses qui connaissent deux grandes solitudes affectives…
Aomamé navigue dans un monde parallèle qu'elle décide de renommer : "J'ai besoin d'attribuer à ce monde un nom qui me sera propre, pour le démarquer du monde d'autrefois, celui où les policiers étaient munis de leurs vieux revolvers. Après tout on donne bien des noms aux chiens ou aux chats. Il n'y a pas de raison que ce nouveau monde altéré n'en ait pas. 1Q84 – voilà comment je vais appeler ce nouveau monde. Q, c'est la lettre initiale du mot Question. Le signe de quelque chose qui est chargé d'interrogations."
Aux personnages se mêlent des créatures fantastiques dans des espaces temps qui se télescopent dans une construction magistrale.
Le style simple de Murakami laisse à l'histoire tout l'étendue possible pour s'épanouir. Une virtuosité narrative qui happe le lecteur et créé une connivence, voire une dépendance. Ses descriptions hyperréalistes très visuelles, d'un monde parfois fantastique, sont teintées de mélancolie. Quant à ses personnages, leur part d'ombre illumine le destin de ceux qu'ils croisent.
On ne peut s'empêcher de voir là un hommage à George Orwell et à son cultissime 1984.
Agathe Bozon
1Q84, Haruki Murakami, Belfond, (2011)
A lire : écoute le chant du vent Flipper, 1973, romans inédits .
Magnifique ...
Je suis tout à fait d'accord avec Jacqueline F : ravissement est tout à fait le terme qui convient. Un an après la lecture des 3 tomes à la suite (en anglais) je n'ai pas changé d'avis : difficile à lâcher !
Je viens de terminer ce n°3, et contrairement aux "suites" de certains auteurs qui me déçoivent, l'écriture de Murakami reste pour moi un vrai ravissement... Le suspens reste présent, les caractères singuliers, les situations mi- réelles, mi-extra-ordinaires...Je rejoins tout à fait le propos d'Agathe Bonzon : on est happé , on entre en dépendance...
"Pour obtenir des choses importantes, les hommes doivent en payer le prix. C'est une des règles de notre monde"
1Q84 On attend le troisième tome avec impatience.... sorti en mars 2012 ...